Treize rebelles haïtiens jouent aux héros

Dans le dernier roman du Torontois Gabriel Osson

Gabriel Osson, Le jour se lèvera, roman, Ottawa, Éditions David, coll. Indociles, 2019, 208 pages, 23,95 $.
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Publié 28/01/2020 par Paul-François Sylvestre

Dans son tout dernier roman, Le jour se lèvera, Gabriel Osson tire de l’oubli une des plus téméraires et utopiques aventures pour renverser le régime dictatorial de François Duvalier en Haïti à l’été 1964.

La guérilla de 13 jeunes adultes suit le principe qu’«il n’y a point de liberté sans révolution. Il faut du sang pour améliorer le monde.»

Ces treize hommes sont Max Armand, Jacques Armand, Gérald Brierre, Mirko Chandler, Louis Drouin fils, Charles Forbin, Jean Gerdès, Réginald Jourdan, Yvan Laraque, Marcel Numa, Roland Rigaud, Guslé Villedrouin et Jacques Wadestrandt.

De l’histoire à la fiction

Bien que s’inspirant des faits historiques entourant leur soi-disant révolution, Le jour se lèvera demeure une œuvre de fiction. L’auteur a changé le nom des protagonistes, car il leur prête «des personnalités, un passé et des motivations qui n’étaient peut-être pas les leurs».

Au début des années 1960, les Noirs aux États-Unis sont toujours sous le joug des Blancs. Il n’y a qu’un pas pour que des étudiants à New York leur substitue «la figure des paysans haïtiens et des mulâtres persécutés dans une même opprobre».

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Ainsi naissent Jeune Haïti et un groupe de 13 idéalistes entre 21 et 39 ans. «Tous prêts à sacrifier leur existence pour libérer leur pays du joug de la dictature», ils s’entrainent à un endoctrinement marxiste, à des techniques de combat et de contre-interrogatoire, voire à une résistance à la torture.

Guérilla de courte durée

On apprend que les tontons macoutes de Duvalier sont officiellement des Volontaires de la Sécurité nationale. On passe des suppôts de Satan aux suppôts du régime.

Lorsque Papa Doc apprend que des rebelles ont débarqué aux environs de Jérémie, il ordonne aux tontons macoutes d’attraper ces cafards avant qu’ils ne s’incrustent dans le pays. La guérilla est de courte durée: du 12 août au 12 novembre 1964.

L’auteur écrit que, «à part les proches de Duvalier et leurs serviteurs, la seule chose qui prospérait en Haïti était l’indigence». Or, les paysans ne se soulèvent pas, ne joignent pas les rangs des treize rebelles qui comptaient réussir comme Che Guevara à Cuba.

Pas de révolution

J’aurais aimé que Gabriel Osson décrive moins la mort détaillée de chaque rebelle et élabore davantage sur leur incompréhension de la psyché et des foisonnements intérieurs des paysans haïtiens.

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Ce que j’ai retenu de ce roman, c’est que 13 jeunes hommes partis vivre ou faire des études aux États-Unis se croyaient pouvoir faire mieux que ceux qui étaient restés au pays. «Mais il fallait plus de courage pour élever une famille dans les conditions qui étaient les leurs que pour jouer aux héros.».

Il est carrément illusoire de croire à une victoire quand on ne peut pas rallier le peuple à sa cause.

Le Groupe des Treize – c’est mon expression – a prêché dans le désert. L’un d’eux se demande «qui racontera notre histoire?» Pour qu’on se souvienne d’eux, Gabriel Osson a écrit Le jour se lèvera «où la Révolution finira par triompher».

Il faudra attendre 22 ans pour le renversement de Jean-Claude Duvalier, dit Baby Doc, en 1986. C’est peu de temps dans l’histoire d’un pays.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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