Avec Le totem des Baranda (2001) et Le dernier roi faiseur de pluie (2003), Melchior Mbonimpa nous a habitués à l’Afrique des Grands Lacs d’avant la colonisation. Il récidive avec Diangombé l’Immortel, un roman dont l’action se situe au XVe siècle. Les États actuels du Rwanda et du Burundi sont alors dirigés par divers rois, auxquels s’ajoutent les monarques de Karagwé, Bushi, Nkore et Buha.
Cinq siècles passés, le pouvoir d’un roi se mesurait au nombre de troupeaux et de tambours sacrés. «Entre eux, les monarques savent que chacun doit montrer ses muscles pour être respecté par ses pairs.» Et pour éviter de perdre le pouvoir, les rois s’allient par le lit. Un monarque voisin est souvent l’oncle, le neveu, le cousin, le beau-frère ou le beau-fils d’un autre roi.
Dès le début du roman, le célibataire Diangombé entend une Voix, impérative et écrasante, qui ne répond pas à ses questions, qui ne dialogue pas. Il sait qu’il est investi d’une mission exigeant «que jamais je ne verse le sang des humains sur un champ de bataille». Il se soustrait donc aux volontés du roi qui ne peut le mobiliser pour participer à une bataille contre le royaume voisin.
Parlant de voix, chaque chapitre est la voix d’un personnage. L’auteur donne successivement la parole, à la manière d’un kaléidoscope, aux acteurs d’une révolution en marche. Il y en a une demi-douzaine, dont le Grand Maître Diangombé, sa mère Matama, son fils Binégo, Kabéja (mère de Binégo sans avoir épousé Diangombé) et Gahaya, «fiancée» de Binégo.
Les voix s’entrecroisent à qui mieux mieux. C’est un peu mélangeant au début, mais on se débrouille avec cette distribution moitié masculine moitié féminine d’un conte initiatique assez tordu par moments.