Quand la police passe les menottes aux élèves turbulents

Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 18/04/2012 par Jeri Clausing (The Associated Press)

à 12h31 HAE, le 18 avril 2012.

Les enseignants américains font de plus en plus souvent appel à la police pour ramener l’ordre dans leurs classes. Ce phénomène suscite un vaste débat national, régulièrement alimenté par de nouveaux abus, comme l’arrestation récente d’une fillette de six ans, menottée et emmenée au poste pour un accès de colère.

Autre cas signalé récemment au Nouveau-Mexique: un enseignant a demandé à une collégienne de 13 ans d’arrêter de bavarder avec un camarade et de changer de place. Elle a refusé et l’enseignant a appelé la police.

Les enfants sont arrêtés parce qu’on leur reproche d’avoir un comportement d’enfant, note Shannon Kennedy, une avocate spécialiste des droits civiques qui a engagé un recours collectif en justice contre l’académie et la police d’Albuquerque en raison de l’arrestation de centaines d’enfants pour des infractions mineures au cours de ces dernières années, notamment la possession de téléphones portables en classe, la destruction d’un livre d’histoire et le gonflement d’un préservatif en cours, comme un ballon de baudruche.

D’après des défenseurs des droits civiques et des experts judiciaires, des enseignants et proviseurs frustrés appellent trop souvent la police pour des faits mineurs. Mais d’autres enseignants disent que la présence policière croissante, répondant aux politiques de tolérance zéro des années 1990 et aux tragédies comme celle du massacre de Columbine (15 morts dont les deux lycéens tueurs), est nécessaire pour garantir la sécurité des professeurs et des élèves studieux.

Publicité

Du harcèlement sexuel dans les écoles primaires et secondaires aux enfants qui lancent des objets en classe, « il y a davantage d’irrespect (…), de désintérêt de la part d’enfants qui s’en fichent complètement », souligne Ellen Bernstein, présidente du syndicat des enseignants d’Albuquerque.

Des experts insistent sur plusieurs facteurs qui entraînent ces arrestations: certains policiers interviennent sans y être spécifiquement formés; les responsables d’établissements ne savent plus quoi faire pour obtenir l’attention de parents indifférents; et les enseignants, accablés, n’ont pas conscience que le fait d’appeler la police pour désamorcer une situation peut entraîner des conséquences judiciaires graves.

« Je me suis inquiété du fait que pendant un bon moment, les écoles se sont un peu trop appuyées sur les policiers pour régler des problèmes de discipline », souligne Darrel Stephens, un ancien chef de la police de Charlotte, en Caroline du Nord.

Il existe peu de données au niveau national pour soutenir ces affirmations. Aucun chiffre n’est collecté aux Etats-Unis concernant la fréquence des sollicitations de la police par les établissements pour faire interpeller des élèves. Pour ces derniers, les conséquences d’une arrestation peuvent être très variables. Certains sont inculpés. D’autres sont libérés sans qu’aucune charge soit retenue contre eux.

A Milledgeville (Géorgie), une ville de 18.000 habitants située à 150 kilomètres d’Atlanta, la petite Salecia Johnson, six ans, a été accusée d’avoir jeté des livres et des jouets dans sa salle de classe dans un accès de colère vendredi dernier. D’après la police, elle a aussi fait tomber une petite étagère sur la jambe du principal et tenté de casser un cadre de verre.

Publicité

La police n’a pas expliqué l’origine de la colère de la fillette. La rectrice d’académie, Geneva Braziel, a qualifié le comportement de l’élève de « violent et perturbateur », affirmant que l’intervention de la police était nécessaire pour garantir la sécurité de l’élève, de ses camarades et du personnel de l’école.

Salecia a été menottée et conduite au commissariat. Elle ne sera toutefois pas inculpée, a assuré la police. Sa tante, Candace Ruff, a affirmé mardi que la fillette s’était plainte des menottes. « Elle a dit qu’elles lui avaient vraiment fait mal aux poignets », a-t-elle souligné. Selon une source policière, la politique de la police est de menotter tout le monde pour des questions de sécurité, quel que soit son âge.

La fillette a écopé d’une suspension de classe jusqu’en août. « Nous n’aimerions pas que cela arrive à un autre enfant, parce que c’est horrible », a déclaré sa tante.

A Albuquerque (Nouveau Mexique), plus de 900 des 90.000 élèves de l’académie ont eu affaire à la justice pendant l’année scolaire 2009-2010 et sur ce nombre, plus de 500 ont été menottés et arrêtés, selon les autorités. Les interpellations auraient toutefois baissé de 53% depuis qu’un recours collectif a été lancé en justice en 2010, ce qui a amené les autorités judiciaires à demander plus de prudence… avant de procéder à des arrestations.

Auteur

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur