Qui es-tu, poète, et que fais-tu? Comme le chantait Léo Ferré, quels sont les papiers du poète? Pour le dernier jeudi littéraire de la saison, on revenait au commencement à l’Alliance française. Finalement, qu’est-ce que cet ultime jet de l’écriture, cette pointe de la littérature que l’on nomme poésie? Les trois poètes Lélia Young, Paul Savoie et Hédi Bouraoui ont essayé d’y répondre, ou du moins d’exprimer ce qu’est leur propre poésie.
La réflexion sur l’art de dire les choses et d’exprimer l’indicible a commencé par une minute de silence. Un recueillement proposé par Hédi Bouraoui en l’honneur des poètes disparus, et notamment Aimé Césaire. De ce regard vers ceux qui sont déjà le passé, la discussion s’oriente vers la forme originelle de la poésie. Une dernière et essentielle interrogation avant de clore pour la saison les réunions des jeudis littéraires.
«Le poète a toujours raison», disait Aragon. Pourquoi pas, mais quelles sont ses raisons, à lui? Pourquoi certaines personnes décident de dire le monde et de coucher sur papier leurs émotions, leurs ressentis? «Je n’ai jamais rêvé d’être poète», tranche Paul Savoie.
Pour l’auteur de Crac!, l’écriture est venue d’elle-même, soudainement, comme une échappatoire. «Une zone de fuite, explique-t-il. Je n’ai jamais écrit sur l’endroit où j’étais, et je me suis longtemps distancié de mes écrits.» Dans ses perspectives littéraires, Paul Savoie a besoin de points de fuite.
C’est qu’il se livre complètement dans ses vers, se met à nu et dévoile sur la place publique ses émotions. Une nudité qui en intimiderait plus d’un. Il a donc écrit en français quand il était dans des milieux majoritairement anglophones, et en anglais quand il est arrivé à Montréal; et toujours sur des endroits qu’il venait de quitter.