Peu de francophones de Toronto se disent franco-ontariens
Quand on en parle, comme au récent débat du MOFIF, les tensions identitaires remontent facilement à la surface
Débat sur l'identité franco-ontarienne organisé par le MOFIF: l'animateur Étienne Fortin-Gauthier et les panélistes Arielle Kayabaga, Carol Jolin, Fété Ngira-Batware Kimpiobi, Nathalie Nadon.
François Bergeron •
Rédacteur en chef •
2 octobre 2018
Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes
Parmi la cinquantaine de participants au débat du MOFIF sur l’identité franco-ontarienne, le 24 septembre dernier au siège social de TFO à Toronto, à peine une dizaine ont levé la main quand l’animateur Étienne Fortin-Gauthier a demandé qui se considérait «franco-ontarien».
Les autres se sentent davantage «franco-canadiens», «québécois», «français», «algériens», «rwandais», etc.
Souvent parce qu’ils n’ont pas vécu en Ontario aussi longtemps que dans leur pays natal (normal).
Parfois parce qu’ils estiment avoir subi ou subir encore de la discrimination de la part des Canadiens-Français «de souche» (bien vu).
Mais aussi par inconfort ou honte d’être associés à une francophonie ontarienne qu’ils perçoivent comme inculte ou peu dynamique (moins drôle).
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Personne n’a dit ça ouvertement, mais c’est bien ce qu’on télégraphiait en affirmant qu’on refusait d’être «assimilé» aux Franco-Ontariens ou qu’on souhaitait conserver sa culture et son accent, merci, comme le garantirait l’idéal du multiculturalisme canadien.
Qu’est-ce qu’un Franco-Ontarien?
Il est vrai que cette salle était plus représentatrice de la francophonie torontoise que de celle d’Ottawa ou de Sudbury, c’est-à-dire établie en Ontario depuis moins longtemps, venant moins du Nord ou de l’Est de la province que du Québec, de l’Europe ou de l’Afrique. On y trouvait même des gens à l’anglais encore rudimentaire: exceptionnel en Ontario français.
Selon lui, «un Franco-Ontarien, c’est toute personne qui parle français en Ontario», la définition officielle la plus inclusive… qui en a fait sourire ou soupirer plusieurs.
Recul et incompréhension
Arielle Kayabaga, diplômée en science-politiques, première femme noire candidate dans un quartier de London aux élections du 22 octobre, est une ancienne militante du RÉFO (Rassemblement des étudiants franco-ontariens).
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Mais elle affirme aujourd’hui avoir pris du «recul» par rapport au mouvement associatif franco-ontarien, qu’elle «ne comprend plus».
Elle cherche désormais à empêcher que son jeune fils ne «s’assimile» à la francophonie qui chante Notre Place, afin de préserver la culture ancestrale (Burundi et Rwanda).
Respect et intégration
Fété Ngira-Batware Kimpiobi exhorte au contraire les immigrants à s’allier et s’intégrer aux Franco-Ontariens, en reconnaissant qu’«on arrive sur un territoire où il y a déjà un peuple: les Franco-Ontariens sont un peuple, avec leurs langue, accent, culture, us et coutumes, qu’il faut respecter».
Cette Congolaise de Niagara, qui a surtout vécu en France, avertit aussi les immigrants que les Canadiens n’ont jamais vraiment été consultés sur l’immigration. «Ça prend du temps avant de pouvoir dire qu’on chez nous en Ontario au même titre que les Franco-Ontariens: on est dans leur maison, ils ont des droits.»
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Fête et partage
Au milieu de ces tirs croisés, la chanteuse torontoise Nathalie Nadon (Les Chiclettes), originaire d’Ottawa, était celle qui voyait les identités multiples de la francophonie ontarienne comme des «opportunités de rayonnement».
Pour elle, toutes les occasions de fêter sont bonnes. Justement, le débat du MOFIF se tenait la veille du Jour des Franco-Ontariennes et des Franco-Ontariens, marqué par des levers de drapeaux, des rassemblements et des concerts un peu partout en province.
«Les Franco-Ontariens veulent partager leur patrimoine», a lancé Carol Jolin. Mais, apparemment, tous ne sont pas preneurs. Du moins pas avant que les immigrants soient mieux accueillis, que leurs diplômes soient reconnus, qu’ils trouvent un logement ou un emploi aussi facilement que les gens nés ici.
Attentes irréalistes
Par ailleurs, certains ont paru blâmer les Franco-Ontariens pour l’absence, à Toronto, de services publics en français ou d’institutions comparables à celles de la majorité anglophone.
On s’est plaint aussi que le marché local, pour leurs produits, services ou talents francophones, soient beaucoup plus petit que pour les anglophones.
Enfin, même si l’assemblée a paru apprécier qu’on ait pu ventiler des sentiments souvent réprimés, plusieurs observateurs ont admis rester dubitatifs face à ce genre de questionnement identitaire.
Une cinquantaine de personnes ont répondu à l’invitation du MOFIF. À l’avant: la députée Marie-France Lalonde, la dg du Centre francophone de Toronto Florence Ngenzebuhoro, la députée Amanda Simard, la présidente Fayza Abdallaoui.
Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.
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