Patrimoine canadien et Justice font-ils partie du même gouvernement?

Des interprétations différentes des droits linguistiques

Maître Michel Bastarache, ancien juge à la Cour suprême du Canada.
Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 05/06/2019 par Gérard Lévesque

La partie VII de la Loi sur les langues officielles (LLO) engage le gouvernement à promouvoir le développement des minorités de langues officielles dans la conception et la mise en œuvre de ses programmes. Malheureusement, là encore, le ministère de la Justice a donné une interprétation très restrictive de cette obligation. C’est comme si le ministère de Patrimoine et celui de la Justice n’appartenaient pas au même gouvernement.

On peut se demander si l’intervention en cour du ministère de la Justice pour donner une définition restrictive de la partie VII de la LLO est compatible avec la politique du gouvernement.

C’est ce qu’a déclaré Maître Michel Bastarache, le 30 mai dernier, lors du colloque sur les 50 ans de mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles, à Gatineau, dans le cadre du 87e congrès de l’Association francophone pour le savoir (ACFAS).

Présentés sous le titre Une loi pour la minorité linguistique ou une loi pour le Canada?, les propos de celui qui a été, pendant plus d’une décennie, juge de la Cour suprême du Canada et qui est maintenant avocat-conseil au cabinet CazaSaikaley, s’inscrivent dans les débats publics sur la nécessité de moderniser la législation fédérale en matière de langues officielles. 

Technologie et offre active

Selon Michel Bastarache, jusqu’ici, on n’a pas tenu compte des changements dans la technologie qui pourraient permettre d’élargir l’offre de services. Il constate qu’on ne dispose pas d’une règlementation généreuse et claire, et qu’on accorde peu d’importance à l’offre active de services et à l’égalité des services offerts.

Publicité

Interprétation progressive

Donnant comme exemple la situation de l’Office national de l’énergie qui agit parfois comme un organisme quasi judiciaire et souvent comme un organe administratif, il propose de préciser l’obligation de donner une interprétation progressive à la LLO.

En ce qui concerne la possibilité pour le Commissaire aux langues officielles de faire un examen des services de Radio Canada, il suggère d’éliminer l’imprécision en identifiant clairement quelles agences peuvent être enquêtées par le Commissaire.

Le fédéral doit s’impliquer de maintes façons

Maître Bastarache est d’avis que le gouvernement fédéral doit augmenter la visibilité du français hors Québec et dans les institutions fédérales; il doit négocier avec les provinces pour améliorer l’accès à des services en français à l’extérieur du milieu scolaire; il doit favoriser les échanges pour encourager l’inter culturalisme et la bonne entente.

Il voit une place nouvelle et essentielle pour une intervention fédérale visant à convaincre les autorités provinciales d’encourager les conseils scolaires de la minorité de langue officielle à intégrer dans les écoles des maternelles et des pré-maternelles.

Domaine judiciaire

Notant que le droit au procès dans sa langue est très limité en dehors de celui qui a trait aux cours fédérales, Maître Bastarache indique qu’il faut certainement questionner le droit du juge de décider lui-même de sa capacité d’entendre une affaire dans sa langue seconde.

Publicité

«Il faudra aussi régler la question de la traduction des jugements et de leur publication dans l’Internet. Dans le cas des affaires criminelles, il faudrait préciser si les procédures avant le procès seront bilingues, si les jugements seront dans la langue de l’accusé, s’il y aura un droit d’appel dans la langue du procès.»

Auteur

  • Gérard Lévesque

    Avocat et notaire depuis 1988, ex-directeur général de l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario. Souvent impliqué dans des causes portant sur les droits linguistiques. Correspondant de l-express.ca, votre destination pour profiter au maximum de Toronto.

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur