Ottawa fête ses 150 ans

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Publié 24/07/2007 par Gabriel Racle

Cette année, plus encore que d’habitude, Ottawa est bien une destination à prendre. Tous les événements habituels de la ville portent la marque de son anniversaire, qu’il s’agisse de Bal de neige en février, du Festival des tulipes en mai, particulièrement réussi cette année, de la Fête du Canada, etc. Le boulevard de la Confédération s’orne de multiples bannières qui soulignent l’événement. Et de nombreux visiteurs du Canada et de l’étranger seront attirés par certains événements de la région qui, à eux seuls, valent bien le déplacement. Il en sera question dans la deuxième partie de cet article.

Un peu d’histoire

Il faut rappeler quelques faits. Le 18 juin 1812, les États-Unis d’Amérique entrent en guerre contre l’empire britannique et tentent d’envahir ses provinces du Canada. Décision est alors prise de construire un canal reliant la rivière des Outaouais au Saint-Laurent, en suivant le cours de la rivière Rideau. En effet, en cas de guerre, la colonie du Haut-Canada était particulièrement menacée entre Montréal et Kingston, le long d’une voie fluviale essentielle pour le transport des biens et des personnes jusqu’à la région des Grands Lacs.

Le lieutenant-colonel John By, chargé de ces travaux, s’installe alors avec ses hommes sur une colline dominant la rivière, pour superviser la construction du futur canal Rideau.

Et 2007 marque aussi le 175e anniversaire de l’ouverture de cette plus ancienne voie navigable en Amérique du Nord. Les bannières du boulevard de la Confédération soulignent aussi cet anniversaire.

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Centre de l’industrie du bois

Deux centres de peuplement s’établissent alors, l’un à l’ouest de la colline, la Haute-ville et l’autre à l’est du futur canal, la Basse-Ville. En 1828, le village compte près de 1 000 habitants et prend le nom de son fondateur, Bytown. Il devient rapidement le centre de l’industrie du bois, grâce en particulier au transport des billots de bois de la vallée de l’Outaouais à Montréal, au fil de l’eau. Le nombre de colons s’établissant dans la région s’accroît alors.

Il en résulte une population composite. D’un côté des émigrés anglais, irlandais et écossais, venus s’établir lors de la construction du canal.

De l’autre des Canadiens français de Montréal et de Québec, qui espèrent gagner leur vie dans les chantiers de l’Outaouais, sur de nouvelles terres ou dans l’exploitation forestière. Ces différents groupes ne s’estiment guère, sont en rivalité pour trouver du travail et les rixes n’y sont pas rares.

L’épouvantail du Canada

Un historien local, le père Alexis, écrit même: «Au milieu de ses forêts, Bytown était l’épouvantail du Canada». Il songeait peut-être aussi à l’arrivée des bûcherons au printemps, qui se répandaient dans la Basse-Ville où la bière coulait à flot et où prospéraient les bordels.

Est-ce pour redonner meilleure réputation à la ville? Est-ce pour lui assurer une «candidature plus éloquente lors du choix d’une capitale», elle fut renommée Ottawa en 1855, du nom de la nation des Outaouais (Odawa en algonquin), qui s’était établie dans la région.

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Car en même temps se manifeste une rivalité entre les principales villes pour devenir la capitale de la Province unie du Canada, créée le 10 février 1841 par l’Acte d’Union, adopté à Montréal.

Décision de la Reine Victoria

Le premier gouverneur de la Province unie, lord Sydenham, fait de Kingston sa capitale. Mais en 1844, elle déménage à Montréal.

En 1848, une foule met le feu aux édifices du Parlement à Montréal. La capitale déménage à Toronto. On conçoit un plan pour que la capitale soit tour à tour à Toronto et à Québec, en commençant par cette ville, un plan irréaliste. La capitale retourne à Toronto. En 1856, l’assemblée législative choisit Québec comme capitale permanente, mais le Conseil législatif refuse d’accorder le financement nécessaire.

L’assemblée législative soumet la question à la reine Victoria. Celle-ci choisit Ottawa, le 31 décembre 1857.

On a beaucoup spéculé sur le choix d’Ottawa. Une légende voudrait que la reine Victoria ait fermé les yeux et piqué une épingle au hasard sur la carte. Il n’en est rien. Le choix s’est fait pour de bonnes raisons.

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Ottawa occupait un beau site naturel, à la limite entre le Haut- et le Bas-Canada. Le gouvernement y possédait de vastes terres publiques. La ville comptait une population mixte, francophone et anglophone, dont la proximité favoriserait de meilleures relations entre les deux collectivités. Elle se trouvait à une bonne distance de la frontière américaine, fort utile en cas de guerre, et elle était accessible par eau et par chemin de fer.

Le Gouverneur général, Sir Edmund Head, avait demandé à cinq villes – Ottawa, Toronto, Kingston, Montréal et Québec – de fournir des arguments appuyant leur candidature. En les transmettant à l’Office des colonies, il ajoutait une note personnelle: «Ottawa est le seul endroit qui serait acceptable pour la majorité des gens du Haut et du Bas-Canada, à titre de juste compromis.»

Ottawa est d’abord devenu la capitale d’un petit pays, mais la situation allait changer après 1857. Le concept d’une confédération, déjà présent lors du choix de la reine, se concrétiserait dès 1867.

Art exposé

Cet été, les visiteurs d’Ottawa et de sa région seront particulièrement gâtés. En plus des activités habituelles, comme les excursions sur le canal Rideau ou la rivière des Outaouais, le changement de la garde devant le parlement ou la résidence des gouverneurs généraux, la visite de lieux historiques, les musées offrent des expositions qui peuvent répondre de manière exceptionnelle aux intérêts culturel, historique, artistique les plus divers.

Le Musée canadien des civilisations, fidèle à sa mission éducative, offre, en plus de ses expositions permanentes dignes d’intérêt (sans oublier le musée des enfants et le cinéma Imax), trois expositions temporaires qui ne peuvent que retenir l’attention.

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Trésor de la Chine a quelque chose d’exceptionnel. Les quelque 120 pièces qui sont présentées proviennent directement du Musée national de Chine à Beijing et la plupart des ces œuvres d’art ou d’artisanat sortent de Chine pour la première fois. Dès la fin de l’exposition, les objets retourneront directement à Beijing.

C’est donc une occasion unique d’avoir un aperçu sur 5 000 ans d’histoire chinoise et de découvrir des contributions du peuple chinois à la civilisation humaine.

L’exposition est organisée de manière chronologique, selon trois grandes périodes historiques. La Chine ancienne, commençant avec l’âge de pierre (dont un outil date d’il y a 500 000 ans!) et se poursuivant avec les cultures néolithiques et des outils plus élaborés. La Chine dynastique, de 2100 av. notre ère à notre ère. La Chine impériale, jusqu’en 1911.

Toutes les pièces sont présentées avec des panneaux explicatifs permettant de se retrouver dans l’histoire de ce pays. On peut y voir des pièces étonnantes, comme celles qui sont présentées ci-après. Bref, une occasion remarquable de faire connaissance avec l’histoire d’un pays qui prend une place majeure dans notre monde moderne.

Maîtres des plaines est une autre exposition originale binationale, puisque c’est une réalisation canado-russe. Pour la première fois, une importante exposition présente côte à côte deux grandes cultures de l’histoire du monde, celles des peuples nomades, apparues il y a environ 5 000 ans, et qui ont subsisté jusqu’à l’époque moderne.

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L’exposition montre les ressemblances et les différences entre les anciens chasseurs de bisons des grandes plaines nord-américaines et les anciens nomades éleveurs de bétail des steppes d’Eurasie.

C’est une réalisation concertée entre le musée de Samara, en Russie, et le Musée des civilisations. Plus de 400 artefacts provenant de ces deux musées exposent les différents aspects de la vie de ces peuplades, dans une intéressante juxtaposition, qui fait ressortir similitudes et variations: bijoux, vêtements, outils, instruments divers. Une rétrospective sur un aspect souvent méconnu, tant de notre lointain passé que de celui d’un autre continent.

Au fil de mes jours est une autre exposition originale consacrée à l’art autochtone contemporain. Elle propose 15 œuvres de huit artistes, qui soulignent les liens entre l’expérience personnelle des artistes et leur histoire ancestrale.

C’est l’occasion de s’initier à l’art autochtone contemporain et «d’examiner de quelles façons diverses cultures s’expriment dans le présent… de découvrir les liens entre les artistes et la mémoire collective», pour citer le président de la Société du Musée canadien des civilisations. C’est, sans aucun doute, une découverte parfois surprenante.

Au Musée des beaux-arts du Canada, il ne faut surtout pas manquer d’aller voir Les paysages de Renoir, 1865-1883, dont L’Express a brièvement parlé, mais dont les 56 tableaux sont maintenant présentés. Un ravissement, sans aucun doute.

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On peut suivre l’évolution du style de Renoir, souvent plus connu pour ses portraits, de ses premiers paysages à un impressionnisme affirmé. Avant d’examiner en détail chaque tableau, il est bon de regarder à distance l’ensemble des œuvres d’une salle.

Ce qui frappe alors, c’est la luminosité que Renoir introduit dans presque tous ses tableaux: un nuage, une robe, un coin de ciel, des fleurs blanches, un reflet de soleil ou de l’eau.

Novateur en son genre, Renoir fait songer à un autre novateur et maître de la luminosité, Le Tintoret, bien illustré dans une récente rétrospective du musée du Prado, à Madrid. Une comparaison lointaine certes, dans le temps et dans l’espace, mais «un bel aperçu», comme me le disait Colin Bailey, coconservateur de l’exposition, auquel je soumettais cette réflexion.

Un intérêt artistique supplémentaire et une rare occasion de voir ainsi regroupées des œuvres de Renoir dispersées dans plusieurs musées.

Des activités dans les musées

En plus des expositions, les musées organisent des activités diversifiées, pour les petits et pour les grands. Ainsi, au Musée des beaux-arts, des concerts, des visites guidées ou en famille, des conférences… Au Musée des civilisations, festival de musique de chambre, atelier de découpage de papier chinois, café-causerie, ateliers de modélisme, etc.

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Et il y a encore le Musée Bytown, près des écluses du canal Rideau, qui présente une exposition spéciale pour célébrer et commémorer le 175e anniversaire du canal. Bref, Ottawa et sa région offrent de quoi se divertir et s’instruire en cette année du 150e anniversaire de la capitale.

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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