Michael V. Smith : pas doué pour la normalité

Mais grand talent pour le genderqueer

Michael V. Smith, Ceci est mon corps, récit autobiographique traduit de l’anglais par Benoit Laflamme, Montréal, Éditions Triptyque, coll. Queer, 2019, 294 pages, 24,95 $.
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Publié 29/12/2019 par Paul-François Sylvestre

Auteur de trois romans et de trois recueils de poésie, Michael V. Smith, 48 ans, est originaire de Cornwall. Il a obtenu son baccalauréat du Collège Glendon et une maîtrise de l’Université de la Colombie-Britannique en création littéraire.

Smith est maintenant professeur à la Faculté de création et d’études critiques de cette université au campus de Kelowna.

Son tout dernier roman, My Body is Yours, vient d’être traduit sous le titre Ceci est mon corps, dans la collection Queer des Éditions Triptyque, dirigée par Pierre-Luc Landry.

Queer : une attitude

Landry définit queer comme une attitude, un rapport décentré au monde, un esprit insaisissable que la collection souhaite incarner par la publication d’œuvres littéraires sans mention de genre, qui posent des questions aux différentes «normalités».

Michael Smith écrit qu’il y avait tant de non-dits dans sa famille qu’il a consacré son art à tout dire.

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Son récit autobiographique est une sorte de confession intime sur la manière dont la relation complexe qu’il entretient avec son propre corps a façonné la personne qu’il est devenu aujourd’hui: un genderqueer.

Pas un vrai gars

Tout adolescent qui découvre son homosexualité se sent confus et vit un mélange de trouble, parfois de désespoir, voire de terreur.

Le jeune Michael ne se perçoit pas comme un gars à part entière. Il n’aime pas son corps maigrichon, mais le fait que d’autres gars le regardent avec désir semble confirmer sa valeur.

Être gai, note-t-il, c’est apprendre à jauger les situations et à anticiper les possibilités. À 17 ans, il découvre que le sexe avec un gars est «un lieu sûr, un endroit où je n’étais pas seul». Ses baises durent six heures, trois orgasmes chacun!

Célébrer son identité

«Par mon coming out, je ne voulais pas seulement avoir la liberté de faire ce qui me plaisait au lit avec qui je le souhaitais; je voulais aussi célébrer mon identité tout entière, la personne complexe qui se cachait en moi.»

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Accepter son identité homosexuelle et la célébrer en s’affirmant gai équivaut à abandonner les règles et rituels qui accompagnent le fait d’être «un homme»: on a le droit d’être tendre, doux et sensible, d’embrasser un homme sur la joue, de porter du rose ou du vernis à ongles, de pleurer au cinéma, de parler de ses peurs en public.

Sexe anonyme

Smith raconte que pour combattre sa dépendance à l’alcool, il s’est tourné vers la drague dans les parcs deux à quatre fois par semaine. «Je pouvais, en moyenne, avoir jusqu’à trois orgasmes par nuit avec cinq hommes différents.»

Le sexe avec des inconnus devient une manière d’expérimenter et d’inventer son identité. «Le sexe anonyme me permettait d’explorer des parties de ma personnalité sans risquer d’être démasqué.»

La drague, écrit-il, est fondamentalement un exercice d’observation et de contrôle. Cela nécessite une grande sensibilité aux messages envoyés par l’autre et une excellente stratégie de maîtrise du déroulement de la gestuelle: «où se tenir, quoi toucher, quand et comment se pencher ou se relever, quels signes corporels envoyer et lesquels réprimer».

Pas de vie normale… svp

Pour Michael Smith, il n’y a pas de différence entre du sexe chaque soir pendant quatre ans avec le même gars ou du sexe chaque soir pendant quatre ans avec un homme différent: «la quantité de sexe est la même, qu’est-ce qu’on en a à foutre, pourvu qu’on ne prenne pas de risques?»

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L’auteur conclut que la vie de genderqueer était bien plus satisfaisante que la vie de garçon normal. «Et de toute façon, je n’avais pas un grand talent pour la normalité.»

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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