Lois du travail: à gauche toute!

Manif américaine pour un salaire minimum à 15$, une revendication des syndicats, de mouvements populaires et de politiciens au Canada, aux États-Unis et ailleurs depuis quelques années déjà.
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Publié 31/05/2017 par François Bergeron

Salaire minimum à 15 $ l’heure dès 2019, parité salariale obligatoire pour le temps partiel et le temps plein, davantage de congés d’urgence personnelle, minimum de trois semaines de vacances après 5 ans d’emploi dans la même entreprise…

Le gouvernement libéral de l’Ontario a dévoilé le 30 mai un train de réformes des lois du travail qui, après le retour du contrôle des loyers, une baisse des tarifs d’électricité, la gratuité de médicament pour les jeunes et un projet-pilote de revenu minimum garanti, le place résolument à gauche de l’échiquier politique, un an avant les prochaines élections.

Le salaire minimum à 15 $ surtout – réclamé par les syndicats et les mouvements populaires avec de plus en plus d’insistence depuis quelques années – est hautement symbolique et clairement destiné à attirer des électeurs tentés par le Nouveau Parti démocratique, face à un Parti progressiste-conservateur en tête des sondages.

Aux électeurs moins interventionnistes, la première ministre Kathleen Wynne pourra au moins faire valoir l’atteinte de l’équilibre budgétaire après une décennie de déficits depuis la crise de 2008-2009.

L’Ontario adopte ces mesures «historiques», fait valoir le gouvernement, «afin de créer plus de possibilités et de sécurité pour les travailleuses et travailleurs grâce à un plan pour l’équité en milieu de travail et de meilleurs emplois».

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«Aucun travailleur à temps plein en Ontario ne devrait vivre dans la pauvreté», a déclaré Kathleen Wynne.

Kathleen Wynne
Kathleen Wynne

Bonne performance

Profitant d’un bon rendement de l’économie de l’Ontario ces trois dernières années (surpassant celui de tous les pays du G7) avec un taux de chômage à son plus bas en 16 ans, les Libéraux disent constater néanmoins que «de nombreux travailleurs éprouvent de la difficulté à subvenir aux besoins de leur famille avec un emploi à temps partiel, contractuel ou au salaire minimum» et veulent agir «face à la précarité de l’emploi».

Le gouvernement veut aussi rendre plus équitable la planification des horaires de travail, ce qui comprend exiger que les employés soient payés pendant trois heures si leur quart de travail est annulé dans les 48 heures précédant l’heure de début planifiée.

Pour appliquer ces changements, la province embauchera jusqu’à 175 agentes et agents des normes d’emplois et lancera un programme de sensibilisation des employés et des petites et moyennes entreprises concernant leurs droits et obligations aux termes de la loi actuelle sur les normes d’emploi.

Précarité

Ces réformes vont dans le sens du rapport final de l’Examen portant sur l’évolution des milieux de travail que les conseillers spéciaux C. Michael Mitchell et John C. Murray ont mené pendant une période de deux ans pour le compte du gouvernement provincial.

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Le rapport évalue que plus de 30% des travailleurs ontariens avaient un emploi «précaire» en 2014. On calcule que près du quart des travailleurs de l’Ontario recevraient une hausse salariale grâce à l’augmentation proposée du salaire minimum.

Le gouvernement va jusqu’à affirmer que la hausse du salaire minimum limite le roulement des travailleurs ou favorise leur rétention dans les entreprises… ce que d’aucuns interprètent plutôt comme un gel de l’embauche de nouveaux travailleurs, notamment des jeunes.

Syndicats

Enfin – la cerise sur le sundae – le plan libéral comporte également une «modernisation» des règles relatives à la création d’un syndicat qui permettrait d’étendre l’accréditation aux travailleurs temporaires, à ceux du bâtiment ainsi qu’à ceux du secteur des soins à domicile et en milieu communautaire.

On cherchera aussi aussi à limiter la classification des travailleurs comme «entrepreneurs indépendants» afin qu’ils aient accès à de meilleurs bénéfices.

Les syndicats, jusqu’au Congrès du travail du Canada, ont promptement applaudi ce coup de barre en Ontario, qui a suscité son lot de commentaires de politiciens et de chroniqueurs de toutes les régions du pays.

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Trump

«Nous faisons face à des défis uniques d’un nouveau genre», a indiqué Mme Wynne, qui cite les «interrogations suscitées par le président Trump» dans le domaine du commerce. «Les nouvelles technologies et l’automatisation menacent l’existence de certains emplois. Nos entreprises sont florissantes et créent de la richesse, mais tout le monde n’en profite pas.»

«Dans ce contexte d’incertitude, nous devons protéger les salaires et le bien-être des citoyens.»

Heureusement, «de nombreuses entreprises ont déjà su créer un milieu de travail équitable», reconnaît Mme Wynne, qui dit s’inspirer de la Chambre de commerce de l’Ontario – le principal lobby d’affaires – selon qui «les objectifs de croissance économique et de progrès en matière de droits des employés ne s’excluent pas mutuellement».

Nous devons veiller à ce que les entreprises disposent de ce dont elles ont besoin pour continuer de croître et nous devons également nous assurer que tous les habitants de la province peuvent bénéficier de cette croissance», résume la première ministre.

Le projet de Loi de 2017 pour l’équité en milieu de travail et de meilleurs emplois a été déposé ce jeudi 1er juin à l’Assemblée législative.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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