Le film d’une ancienne étudiante de l’AFT choisi pour Cannes

La solitude universelle

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Publié 09/04/2013 par Guillaume Garcia

Née en Iran, Hasti Saadi a 17 ans quand sa famille déménage à Toronto. Elle y restera sept ans et en profitera pour faire des études en photographie au College Georges Brown et à l’Université Ryerson, avant de suivre son mari et repartir en Iran. C’est là qu’elle se met au cinéma et se mêle à la communauté artistique de Téhéran. Aujourd’hui, son court-métrage Luminance est sélectionné dans la catégorie Corners au Festival de Cannes. Ancienne étudiante à l’Alliance française de Toronto, Hasti Saadi y présentait en primeur son film, mercredi soir dernier.

La projection à peine terminée que le public présent dans les locaux de Alliance française de Toronto à North York se lançait dans des réflexions alambiquées sur la condition de l’Iran et de son peuple.

Pourtant, la réalisatrice tenait bien à ce que son film ne soit pas politisé, ni mis en perspective à travers la situation politique iranienne.

Solitude partagée

Le court-métrage est tourné quasi intégralement dans une voiture et l’on comprend qu’un homme a fait appel aux services d’une prostituée. Les deux se parlent, se questionnent.

L’homme raconte ses difficultés avec sa mère et la jeune femme n’a pas honte de dire qu’elle pratique cette activité pour l’argent, en rêvant d’une vie meilleure une fois son pécule rassemblé.

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Mais plus que de prostitution, le film parle surtout de la solitude de ces deux êtres, très différents de prime abord, mais qui partagent plus qu’ils ne le croient.

«On a souvent beaucoup en commun avec des gens dont on pense qu’ils ont des vies très différentes de la nôtre», explique la réalisatrice.

«En Iran, beaucoup de gens se prostituent, parce que la manière la plus facile de faire de l’argent c’est d’utiliser son corps. Ça arrive partout, c’est le plus vieux métier du monde pour les femmes. Mais comme on les juge comme prostituées, on ne voit pas ce qu’il y a derrière», avance Hasti Saadi.

En Iran, la jeune femme a développé ses compétences de scénariste et réalisatrice en suivant des ateliers de formation avec le réalisateur iranien Abbas Kiarostami, qui lui a ensuite suggéré de tenter l’aventure du Festival de Cannes.

Besoin de parler

Son premier court métrage, Luminance a été écrit puis retravaillé plusieurs fois au cours des trois dernières années.

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«L’idée de la lumière dans le film vient du fait qu’il se déroule principalement dans le noir et certaines personnes cherchent la lumière dans la pénombre», dit très joliment Hasti Saadi.

Les personnages principaux de son film «ont besoin de parler à quelqu’un qu’ils ne connaissent pas. Quelqu’un qui ne va pas les juger», souligne la réalisatrice, répondant aux multiples questions du public, dont bon nombre d’Iraniens.

Plusieurs personnes de l’audience tentent de mettre en avant le côté iranien du film, tourné à Téhéran, avec une autorisation délivrée pour un autre script, mais Hasti ramène toujours le sujet à l’universalité du sujet.

«Quelqu’un qui a besoin d’aller voir une prostituée pour parler a un problème. Il est en âge d’avoir une femme. Il a un problème avec son passé, avec sa mère. Il ne peut créer de relation et ne cherche pas du sexe, mais quelqu’un à qui parler. »

En effet, comme l’a fait remarquer Christophe Plantiveau, directeur du centre de North York, le film pourrait se terminer avec une image d’un homme seul dans les condos du centre-ville de Toronto. La spécificité de la solitude à Téhéran n’a d’égal que l’universalité de ce sentiment.

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Hasti a également mis en avant la nécessité pour le peuple iranien de se mettre en question quant aux échanges entre les personnes.

«Les pères ne savent pas parler à leurs enfants. Les mères non plus dans un sens. Les gens ne savent plus se parler. Il y a bien sûr la politique, mais il faudrait commencer par «balayer devant sa porte», c’est ce que pensent beaucoup de gens de ma génération», a conclu la réalisatrice.

La discussion entre le public et Hasti a pu se faire grâce à la traduction, en français ou en farsi de Nima Tak, ancien journaliste en aujourd’hui professeur à l’Alliance française de Toronto, qui a eu Hasti dans sa classe.

Auteur

  • Guillaume Garcia

    Petit, il voulait devenir Tintin: le toupet dans le vent, les pantalons retroussés, son appareil photo en bandoulière; il ne manquait que Milou! Il est devenu journaliste, passionné de politique, de culture et de sports.

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