Le défenseur des «sans»

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Publié 05/12/2006 par Aurélie Lebelle

Avec l’arrivée de l’hiver, les sans-abri affluent vers les centres d’accueil et cherchent des solutions de rechange pour affronter le froid. Gaëtan Héroux travaille dans un centre de Eastern Town et fait de son quotidien une lutte pour la défense des sans domicile fixe.

«Je suis venu habiter en Ontario en 1965 et j’ai trouvé un emploi à temps partiel en 1988 à Toronto, explique-t-il. J’ai travaillé pendant 10 ans dans une auberge de jour puis dans une auberge de nuit et dans une agence où l’on s’occupait des logements sociaux.»

Aujourd’hui, ce dévoué à la cause des «sans» travaille dans un centre pour les sans-abri, Street Health, qui se charge de remplacer les pièces d’identité des gens qui vivent dans la rue. «Je suis aussi militant dans une association, Coalition ontarienne contre la pauvreté (OCAP) et ce bénévolat est ce qu’il y a de plus important pour moi», souligne-t-il.

OCAP est connue pour ses manifestations régulières. Arrêté à plusieurs reprises, Gaëtan Héroux fait de son engagement un défi quotidien, une lutte de tous les instants. «Nous organisons une manifestation le 18 décembre devant le ministère des Finances de Monsieur Flaherty», explique le militant. «Nous servirons un repas en attendant de pouvoir le rencontrer.»

Lorsqu’il est arrivé à Toronto, Gaëtan Héroux a rencontré l’un de ses amis, David Kide, qui travaillait dans ce milieu. «Il était très actif et j’ai travaillé dans la même agence que lui. Je ne me rendais pas compte à l’époque qu’il y avait tant de gens impliqués.»

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Près de vingt ans plus tard, la situation des sans-abri va de mal en pis à Toronto. «Chaque semaine, des gens meurent à cause de la pauvreté, témoigne Gaëtan Héroux. Ce sont parfois des gens que je connais. Je perds espoir au fil des années car il y a toujours plus de compressions et la frontière entre les riches et les pauvres et de plus en plus grande.»

En 1995, de grosses compressions au niveau des logements sociaux ont été votées par le gouvernement ontarien, lorsque Mike Harris était au pouvoir. «À l’époque, un sans-abri recevait 633$ alors qu’aujourd’hui, avec le gouvernement McGuinty, il reçoit 536$», explique le travailleur social.

Les compressions proviennent du provincial mais également de la ville de Toronto. Généralisées, elles diminuent l’assurance-emploi, attaquent les structures des programmes sociaux, et criminalisent de plus en plus les sans-abri. «Depuis deux ans, Miller a introduit un projet appelé Streets to home qui interdit aux sans-abri de dormir devant l’Hôtel de Ville. Il y a eu tout un nettoyage du centre-ville. L’année prochaine, nous attendons encore des compressions car quatre auberges de nuit vont fermer ce qui représente 250 lits. La ville va arrêter de subventionner les églises ou les agences qui accueillaient ces sans-abri.»

La situation semble catastrophique. La décision de l’arrêt des subventions de la ville menace divers programmes de prise en charge. Le programme Out of the cold, qui existait pendant l’hiver par le biais des églises et qui accueillait des sans-abri depuis 10 ans, va également fermer.

«Avoir des sans-abri dans le centre-ville est mauvais pour le tourisme et le business», explique Gaëtan Héroux avant d’ajouter: «Avant, il y avait plus de 2000 centres d’accueil dans le centre-ville. Ici, à Eastern Town, il y a toujours eu de la pauvreté car c’était le quartier industriel où vivaient les ouvriers et les pauvres.»

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Aujourd’hui, les pauvres ne sont plus les bienvenus dans le quartier où s’élève peu à peu condos, centres commerciaux et hôtels. Tout le quartier se transforme et son histoire est oubliée et enfouie sous les nouveaux bâtiments. Gaëtan Héroux cherche à rendre hommage à ce passé si important pour la ville de Toronto. Depuis un an et demi, il travaille sur un livre qui évoque la lutte des pauvres dans ce quartier, tout en poursuivant sa lutte quotidienne contre la pauvreté.

«Cela fait 18 ans que je travaille ici et les gens vivent toujours dans une misère extrême. Ils sont -abandonnés et poussés de leur quartier. La ville va finir par se débarrasser d’eux. C’était comme cela en 1995 et la réalité est toujours la même.»

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