Le Capital, une immersion dans le monde cynique de la haute finance

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Publié 11/09/2012 par Guillaume Garcia

Le réalisateur Costa-Gavras s’intéresse dans son dernier film, présenté en première au TIFF, au monde de requins qu’est la haute finance mondiale. Inspiré du bouquin Le Capital de Stéphane Osmont, faisant lui-même écho au livre Le Capital de Marx, le film met en scène Gad Elmaleh dans un rôle de patron de banque dont la maxime est «Voler aux pauvres pour donner aux riches». Gad Elmaleh et Costa-Gavras nous ont fait le plaisir de répondre à nos questions dans un hôtel du centre-ville.

Parlez-nous de votre personnage, Marc Tourneuil, le Robin des bois des riches?

Gad Elmaleh: C’est un personnage qui est finalement victime du système même s’il reste le héros du film. Ces mecs qui sont au pouvoir en veulent toujours plus, ils n’en auront jamais assez. Ce n’est même plus l’argent qu’ils veulent, c’est le pouvoir. Ils préfèrent avoir le contrôle que les millions. Le personnage est un homme sans qualités, sans valeurs. C’est un cynique, un menteur. Mais ça ne veut pas dire qu’il est fautif. C’est un des mecs de la machine.»

Le film ne donne-t-il pas dans la caricature du monde de la finance?

On a rencontré des banquiers avant de faire le film. Et bien, c’est assez proche de la réalité. La seule différence, c’est que pour la première fois la France est impliquée dans le film. Avant c’était toujours aux États-Unis, comme si nos banques n’avaient rien à voir là-dedans.

Avez-vous suivi la crise de près? Dans quelle mesure étiez-vous concerné?

J’étais dedans. Je lis l’actualité financière, ça m’intéresse. Je suis patron d’une boite, j’ai des employés. Maintenant que j’ai fait le film, je suis encore plus fataliste. Des fois je me dis que ça ne m’étonnerait même pas si j’allais à la banque et qu’on me disait « On n’a plus votre argent. C’est à cause d’une mauvaise manip, on a tout perdu ».

Vous avez tourné avec Woody Allen, Peter Jackson, Costa-Gavras. Vous voulez encore faire de la comédie, du stand-up?

Oui je veux continuer à faire les deux. Après, c’est certain que des expériences comme ça me montrent que je suis capable de faire autre chose. En plus avec un réalisateur comme Costa-Gavras, ça rend les choses plus faciles.

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On a à peine terminé l’entrevue que Gad Elmaleh doit déjà rejoindre d’autres médias. C’est Costa-Gavras qui prend sa place dans le fauteuil.

Vos films ont toujours une saveur politique. Vous avez beaucoup traité du fascisme. La haute finance est-elle une dictature mondiale fasciste?

Costa-Gavras: C’est un peu ça non? (sourire en coin) Oui, elle contrôle le monde, mais il n’y a rien de nouveau là-dedans. L’économie, c’est éminemment politique. Face à cette puissance financière, les démocraties sont des placebos locaux.

Quand on voit la crise, tout le monde a dit qu’il fallait réguler les marchés. Obama l’a dit, Sarkozy l’a dit, et personne n’a rien fait. Le lobby est trop puissant.

Ça fait longtemps que le sujet vous intéresse?

J’ai lu Le capitalisme total de Jean Peyrelevade. J’ai trouvé ça extraordinaire. Après j’ai cherché encore et je suis tombé sur Le Capital, de Stéphane Osmont.

Êtes-vous fataliste ou bien restez-vous optimiste sur la question de la haute finance?

Il ne faut pas tomber dans le fatalisme, c’est la négation de tout, c’est le renfermement sur soi-même. L’argent est devenu une religion, une religion qui pousse à l’individualisme, et l’individualisme c’est ce qu’il y a de plus négatif pour une société. Nos démocraties sont faibles face aux banques irrégulées.

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Pensez-vous que le mot Capital ait une connotation négative?

Je ne voulais pas garder le nom, faire le parallèle avec Marx. Mais ça aurait une négation du livre de changer le titre du film. Aujourd’hui le corollaire de capital, c’est l’argent. La définition des gens se fait par l’argent. Il y a même des magazines qui classent les gens selon leur richesse.

Pensez-vous que les banques vont se rappeler de votre nom au moment de vous faire un chèque pour votre prochain film?

(il rit). Les banques s’en fichent bien. Si elles pensent qu’elles peuvent faire de l’argent, elles seraient capables de financer un nouveau film contre elles.

Vous avez confié le rôle principal à Gad Elmaleh. C’est un pari risqué non?

Il a dit «je casse mon image», mais a accepté très vite. Avec le temps, je me suis aperçu que les comiques, Montand (Yves), Garcia (José), sont souvent plus intéressants que ne la sont les autres comédiens. Ils ont un rythme différent. C’est très positif.

Auteur

  • Guillaume Garcia

    Petit, il voulait devenir Tintin: le toupet dans le vent, les pantalons retroussés, son appareil photo en bandoulière; il ne manquait que Milou! Il est devenu journaliste, passionné de politique, de culture et de sports.

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