La pénurie d’enseignants freine le bilinguisme

Le commissaire aux langues officielles demande un leadership national

Photo: Francopresse, Lucas Pilleri
Le commissaire aux langues officielles du Canada, Raymond Théberge, a présenté un rapport sur la pénurie nationale d'enseignants de français langue seconde, à l’École Bilingue Elementary School de Vancouver. (Photos: Francopresse, Lucas Pilleri)
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Publié 16/02/2019 par Lucas Pilleri

Après des décennies de croissance exponentielle, les programmes de français langue seconde des conseils scolaires du pays peinent à trouver un nombre suffisant d’enseignants qualifiés, selon le commissaire aux langues officielles du Canada, Raymond Théberge.

Un «leadership clair» est nécessaire, dit-il en visant la ministre Mélanie Joly, si le gouvernement fédéral veut élever le taux de bilinguisme national de 17,9% à 20% d’ici 2036 – une cible que d’aucuns trouvent encore peu ambitieuse.

C’est à Vancouver, le 13 février, que M. Théberge dévoilait un rapport sur la pénurie nationale d’enseignants de français langue seconde. Sa présence au sein de l’École Bilingue Elementary School servait à illustrer le problème.

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Les nouveaux locaux de l’École Bilingue Elementary School, à Vancouver, témoignent de l’engouement pour le français.

Jamais vu

«De toutes mes années comme enseignante de français langue seconde et de formatrice à l’Université de la Colombie-Britannique, je n’ai jamais vécu une situation comme celle que nous vivons actuellement avec une telle demande», a déclaré Wendy Carr, également vice-présidente de Canadian Parents for French au niveau national.

Il faut dire que le succès des programmes de français langue seconde ne faiblit pas, à l’instar de l’immersion. En 1976, environ 23 000 élèves étaient inscrits. Quarante ans plus tard, en 2015, ils sont 430 000 (en hausse de 20% en seulement quatre ans).

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«Les Canadiens veulent que leurs enfants profitent des avantages du bilinguisme»

 

Aussi, listes d’attente et systèmes de loterie sont le quotidien de bien des parents qui veulent placer leurs enfants en immersion. «Plus que jamais, les Canadiens veulent que leurs enfants profitent des avantages du bilinguisme», a souligné le commissaire face à l’assemblée.

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L’élève de 7e année Patrick McCate s’est dit chanceux d’être bilingue. À ses côtés: son enseignant de français Olivier Salvas, à l’École Bilingue Elementary School à Vancouver.

Chanceux

L’un de ces apprenants en 7e année, Patrick McCate, a donné sa perspective: «Je sais que je suis chanceux d’être dans un tel programme et je suis motivé à ce que ce soit possible pour tous les enfants canadiens.»

Chaudement applaudi par l’auditoire, le témoignage du garçon montre que les défis du recrutement et de la rétention des enseignants s’imposent plus que jamais.

Dans une conférence 100% bilingue, le commissaire a présenté ses recommandations devant une soixantaine de personnes, incluant des partenaires communautaires, des chercheurs, des professeurs, des représentants du gouvernement, des directeurs d’écoles et de conseils scolaires, sans oublier une vingtaine d’élèves aux premiers rangs.

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Le tout premier programme d’immersion française de l’Ouest canadien a vu le jour à Coquitlam, en C.-B., en 1968.

Plateforme d’offres d’emplois

Pour pallier le manque, le commissaire propose d’abord une table de consultation nationale. Il invite aussi à plus de collaboration entre provinces et territoires, ministères, facultés et conseils scolaires.

Au niveau de la formation, Raymond Théberge souhaite plus de places dans les facultés d’éducation, ainsi qu’une campagne de valorisation des carrières en enseignement auprès des jeunes.

Autre mesure concrète: créer une plateforme en ligne regroupant les offres d’emploi de tous les conseils scolaires du pays. Afin de faciliter la mobilité des enseignants, le commissaire suggère une harmonisation des exigences pour pouvoir enseigner d’une province à l’autre.

commissaire Raymond Théberge
80% des Canadiens souhaitent plus d’efforts pour le bilinguisme chez les jeunes.

Le problème sous-estimé

Côté financement, le commissaire engage le gouvernement à «veiller à l’allocation opportune et efficace des fonds prévus dans le Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023».

Rappelons ici que le fédéral a promis 31,3 millions $ pour appuyer des stratégies de recrutement et 12,6 millions $ pour des bourses d’études. «C’est un pas dans la bonne direction», a-t-il commenté. «Mais ça va demander des investissements plus importants, car on sous-estime l’ampleur du problème.»

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commissaire Raymond Théberge
Les conditions de travail et les avantages salariaux ont une grande influence sur les enseignants.

Formation, conditions, immigration

L’étude, dirigée par les chercheuses Mimi Masson et Elizabeth Jean Larson, indique par ailleurs que les possibilités de perfectionnement professionnel pour les enseignants manquent à l’appel.

Plus largement, une amélioration des conditions de travail est demandée.

Enfin, il faudrait faciliter la venue des immigrants d’expression française détenteurs d’un diplôme en éducation.

En dépit de l’étude, aucun chiffre précis n’existe sur le nombre d’enseignants manquants au pays. «On ne sait pas jusqu’à quel point on ne répond pas à la demande potentielle», concède Raymond Théberge.

commissaire Raymond Théberge
Le coût de la vie et l’isolement de certaines communautés peuvent décourager les enseignants.

210 000 élèves en immersion

L’étude montre qu’après le Québec, le Nouveau-Brunswick compte le plus haut taux d’inscription aux programmes de français langue seconde dans les écoles de langue anglaise (86%).

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L’Ontario est de loin la province qui compte le plus grand nombre d’inscriptions aux programmes de français langue seconde, notamment en immersion, avec plus de 210 000 élèves en 2016.

C’est presque deux fois plus que les 110 000 élèves inscrits dans les écoles élémentaires et secondaires des quatre conseils scolaires laïcs et huit conseils scolaires catholiques franco-ontariens.

commissaire Raymond Théberge
Pénurie d’enseignants: en couverture du rapport du commissaire aux langues officielles du Canada.

Auteur

  • Lucas Pilleri

    Journaliste à Francopresse, le média d’information numérique au service des identités multiples de la francophonie canadienne, qui gère son propre réseau de journalistes et travaille de concert avec le réseau de l'Association de la presse francophone.

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