Macabre, lugubre, profane, mais aussi didactique et esthétique, la fabuleuse exposition Body Worlds 2 – «Le monde du corps» – au Centre des Sciences de l’Ontario, donne une extraordinaire leçon d’anatomie humaine.
Un scientifique allemand, Gunter von Hagens, de l’Institut de plastification d’Heidelberg, a trouvé le moyen de conserver des cadavres par injection d’une solution de caoutchouc et de silicone. La première matière permet d’abord de mettre les organes dans la position voulue pour mieux les présenter, la seconde donnera la rigidité nécessaire à leur maintien. Il faut ajouter que pour mieux présenter leur anatomie, les corps ont été débarrassés du gras et de la peau qui cacheraient les os, les fibres musculaires, les vaisseaux et les nerfs. Grâce à quoi, tout l’agencement de ces organes apparaît de manière claire et distincte, avec les couleurs réelles de blancs, roses, jaunes, rouges, bleus.
La première salle présente d’abord le squelette et ses différentes parties. On y montre le travail des orthopédistes remplaçant – par des tiges ou des boules de métal – les tibias, les rotules et autres os brisés, attaqués par l’arthrose ou même amputés totalement. On voit comment on reconstruit ainsi un corps et comment on peut lui redonner le mouvement. Quelques remarques de physiologie expli-quent, par exemple, le fonctionnement du biceps (servant à rapprocher) par rapport au triceps (fait pour l’extension). Mais l’ensemble de l’exposition reste essentiellement anatomique, présentant seulement les formes et leurs structures.
La seconde salle se déploie spectaculairement. On la découvre du haut d’un immense escalier, que l’on descend comme celui d’une salle d’opéra. On est alors frappé par le spectacle de dizaines de corps, érigés comme autant de statues de vivants, qu’on viendrait d’écorcher vifs.
Chacun de ces corps est dans une posture qui permet de bien observer les fibres musculaires en même temps que le circuit des vaisseaux et des nerfs, comme dans ce Penseur, assis, jambes croisées, bras replié. Sans doute parce qu’il est dans l’attitude de la réflexion, lui a-t-on ouvert le crâne pour pouvoir admirer son cerveau! Parfois toute une partie de squelette est enlevée, comme dans Le lanceur de javelot, dont le thorax est fendu en deux et écartelé pour en montrer l’intérieur.