Dans une salle toute blanche, quelques êtres humains en costume cheminent sur un sentier de télévisions. Sur les écrans, ils observent, intrigués, des images d’une nature fragmentée et reconstruite. Bienvenue dans Continuum, l’exposition troublante et visuelle de Pierre Tremblay pour la Semaine de la francophonie à la galerie Glendon.
«On a besoin de décalage parfois, pour voir les choses.» Pierre Tremblay, caméra à la main, ne pouvant s’empêcher de filmer les gens déambulant dans son exposition, s’exprime sur son œuvre. Une installation de trente-cinq télévisions, diffusant en continu trois variations de ses films d’une Nature déconstruite et fragmentée, eux-mêmes triplement modifiés par un système propre.
Lui qui vit sur une falaise de Scarborough trouvait que Toronto avait trop tendance à oublier les rives du Lac Ontario. «Mais je ne savais pas comment rendre sa beauté». Il pense alors au cubisme, et lui ajoute le mouvement. Il tourne des heures de film, à pied ou à bicyclette, puis les retravaille chez lui, les découpe, les recolle, les monte et les démonte. «J’adore faire plusieurs choses à la fois.»
«Il s’agit de faire regarder, tout simplement, dit-il sans arrêter d’observer tous ces gens qui passent et repassent devant ses petits écrans. La télévision nous bombarde d’images, Coca-Cola et compagnie, ici la télévision prend son temps, pour le plaisir des yeux, pour une fois.»
Professeur à l’école d’Art de l’image de Ryerson depuis 1998, Pierre Tremblay s’amuse dans le décalage avec cette exposition Continuum, qui devient une étrange série sans fin, évoluant presque indépendamment grâce à ce système de six canaux. «On voit alors toujours différemment.»