La main: un outil pédagogique essentiel

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Publié 01/02/2011 par Gabriel Racle

Il ne faudrait pas croire que la machine fait tout et que le numérique est la panacée universelle. Dans toute bonne pédagogie de l’apprentissage des basses fondamentales dont a besoin tout apprenant, la main doit trouver sa place. Si elle ne la trouve pas, des troubles d’apprentissage risquent de survenir.

L’exemple type est celui du langage qui se déroule linéairement. Pour lire, il faut donc décoder un système selon un processus linéaire allant de gauche à droite (langues européennes), avec retour «à vide» vers la gauche, changement de hauteur c’est-à-dire orientation vers le bas, pour passer d’une ligne à l’autre.

Au cours de cette opération, toutes les lettres, tous les mots doivent être traités de gauche à droite. Autrement dit, le sens directionnel général, gauche à droite commande la perception globale du texte (sens des lignes) et la lecture détaillée des composantes (mots et lettres), auquel s’ajoute un mouvement haut en bas.

Orientation spatiale

Tout ceci suppose une parfaite adaptation à des orientations spatiales précises, sous peine d’erreurs ou de difficultés de lecture. L’acquisition de la gymnastique spatiale nécessaire est à la base de la lecture qui comprend donc plus que le décodage de lettres.

D’où l’intérêt d’activités comme la représentation spatiale de la forme des lettres avec les doigts, et de l’écriture manuelle, qui ajoute à ces dimensions linéaire et spatiale la commande de mouvements manuels.

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Écrire, c’est traduire le langage selon un code spatial comportant à la fois des mouvements de gauche à droite, avec retour à gauche vers la zone de départ pour la direction générale de l’écriture, et des mouvements plus fins de gauche à droite, de droite à gauche, de haut en bas, de bas en haut, circulaires ou semi-circulaires, pour la réalisation graphique des lettres.

L’encodage écrit nécessite une adaptation de la main qui écrit au découpage spatial conventionnel et ceci, que l’on écrive de la main droite ou de la main gauche, et une coordination complète de la main elle-même et de sa contre-main, c’est-à-dire du pouce.

L’écriture manuelle…

Des études présentées au colloque «L’écriture dans tous ses états» de l’Université d’Aix-en-Provence, en France, sont très intéressantes. Dans L’apport cognitif de la main: clavier ou écriture manuelle?, les auteures se demandent si le «délaissement de la main – au profit de la machine – risque d’entraîner des pertes de compétences».

Il ressort de leur étude que «sur l’ensemble des sujets, le nombre de fautes commises en écriture manuelle est significativement inférieur à celui constaté en mode clavier…

Si la main se révèle supérieure au clavier en ce qui concerne les fautes de français, l’expérience présentée ne permet pas de décider quel est le facteur explicatif: acquisition manuelle de l’écriture ou ressources attentionnelles plus marquées en manuel.»

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L’explication vient peut-être d’une autre étude: La Main écrit sur le Papier et … sur le Cerveau. Voici la conclusion: «L’acte même d’écrire est une source d’informations à caractère cognitif susceptible d’intervenir, comme les informations visuelles et auditives, dans la spécification symbolique des caractères écrits et par là dans les apprentissages linguistiques.»

…favorise la lecture

Autrement dit, le geste moteur de l’écriture transmet au cerveau une information sur la forme des lettres et leur enchaînement, en écrivant des mots, des phrases. Le geste sensoriel est donc porteur d’informations cognitives qui se répercutent sur la lecture.

«Nos études, disent les auteures, soulignent l’existence de liens fonctionnels étroits entre écriture et lecture… ils suggèrent que notre façon d’écrire pourrait influer sur notre façon de lire.» Un autre exemple: encourager les petits à compter sur leurs doigts ne serait pas une mauvaise idée, bien au contraire.

Des travaux récents démontrent que la représentation de la grandeur des nombres stimule les neurones du lobe pariétal, qui est aussi associé à la représentation des objets dans l’espace. Main, cerveau et apprentissage sont étroitement reliés.

La main et le toucher

La main joue donc un rôle capital en pédagogie fondamentale. La célèbre formule de G. Révész: «Votre destin est vraiment entre vos mains, ou mieux en ce que vos mains créent ou font» (The Human Hand), même à partir d’un simple crayon, ne peut que faire réfléchir et porter à la main une attention toute pédagogique, de la part des parents, des enseignants, des intellectuels et des décideurs.

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Pour compléter ces propos et les élargir, on prendra connaissance avec intérêt de: Gentaz, Édouard. La main, le cerveau et le toucher, Dunod, 172 p. L’auteur traite spécialement du toucher, un sens méconnu et si important pour le bébé, l’enfant, l’adulte voyant et non-voyant. «Les outils de l’activité virtuelle favorisent-ils l’apprentissage de l’écriture?» montre le rôle du toucher dans ce processus.

Un livre pour les parents et futurs parents, pour comprendre leur bébé, les enseignants, les étudiants universitaires en psychologie et en pédagogie, rédigé de façon claire, bien illustré, d’actualité.

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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