La Fresnaye: un peintre libre comme l’air

Michel Chazat, Roger de La Fresnaye, Éditions Hazan.2017, relié, 26,56x20 cm, 130 illustrations, 256 pages. La couverture reproduit Les baigneurs, 1912, Washington, National Gallery of Art. À droite: La Conquête de l'air, 1913, New York, Museum of Modern Art, p. 95
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Publié 25/03/2018 par Gabriel Racle

Pour beaucoup d’entre nous, le peintre Roger de La Fresnaye ne porte pas un nom connu qui semble bien ne pas figurer dans la liste des œuvres détenues par des musées canadiens. C’est ce qui ressort de nos recherches infructueuses.

Le nom de La Fresnaye n’est pourtant pas inconnu au Canada. Si l’on consulte le Dictionnaire biographique du Canada, on peut lire à la rubrique La Fresnaye ce qui suit: «Pierre-Antoine, diacre, récollet, né à Montréal le 8 octobre 1677, fils aîné d’Antoine de La Fresnaye de Brucy… Pierre-Antoine de La Frenaye fit ses études au collège des Jésuites à Québec, étant pensionnaire au séminaire de cette ville. En 1693, à 16 ans, il opta pour la vie religieuse et entra au noviciat des Récollets, au couvent de Montréal, fondé l’année précédente.»

Y a-t-il un lien de parenté, même éloigné, entre Pierre-Antoine et Roger de La Fresnaye? Il faudrait retracer la généalogie des La Fresnaye a travers les âges pour le savoir. Si quelqu’un veut tenter cette entreprise…

Études classiques

Roger André de La Fresnaye est né le 11 juillet 1885 dans la ville française du Mans dans le département de la Sarthe, à l’ouest de la France. Il se trouve dans une famille aristocratique, très traditionaliste et stricte en ce qui concerne éducation et formation.

Roger reçoit donc une éducation classique à l’ancienne, qui comprend le latin enseigné par l’abbé Lechatellier, un latiniste, et la formation d’un jeune homme sérieux bien éduqué. Ses parents le verraient bien en ecclésiastique, mais Roger se passionne pour l’art.

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Ses parents décident finalement de l’envoyer à Paris suivre une formation artistique à l’École des beaux-arts, puis on le retrouve à l’Académie Ranson, une école d’art fondée par le peintre Paul-Élie Ranson (1864-1909). Cette période de formation (1906-1908) se termine en quelque sorte par une première toile, un Autoportrait au chevalet (1907-1910).

La Fresnaye
Femme assise, 1912, Paris, Centre Pompidou, p. 40

Un aristocrate qui dérange

Dans l’ouvrage d’art que les éditions Hazan ont récemment publié sur Roger de La Fresnaye, on peut lire que ce dernier est libre comme l’air «à plus d’un titre. Membre d’une avant-garde maîtrisée, classique dans ses goûts et ses sources, il réunit en apparence les ingrédients du credo vingtiémiste.

Et pourtant, cet aristocrate dérange. Inclassable dans sa vie privée comme dans sa peinture, Roger de La Fresnaye compte parmi les artistes les plus déconcertants et les plus indépendants de son temps.

Ses peintures reflètent son goût apollinien de l’ordre et de la clarté, son ascétisme, sa passion du labeur parfait. S’y révèlent, pour peu qu’on sache les lire, des tensions qui font écho à celles de son âme.» Les nus féminins abondent dans son œuvre.

La Fresnaye
La Madelon, 1917, aquarelle, p. 139

La conquête de l’air

L’allusion à l’air faite à propos de cet artiste n’est pas qu’une simple figure de style. Au début du XXe siècle, la conquête de l’air passionnait de nombreux artistes et parmi eux, Roger de La Fresnaye.

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En 1913, il en propose une vision sur une grande toile intitulée La Conquête de l’air et en fait également réaliser plusieurs transpositions. Il s’agit d’une allégorie, certainement importante pour le peintre, comme on peur le voir dans l’illustration jointe, qui se trouve dans l’ouvrage cité, en page 95.

Deux nouveautés s’y rejoignent, la conquête de l’air et donc la technologie avancée du moment, et le cubisme, un nouveau mouvement pictural auquel La Fresnaye s’est rallié.

En conjuguant ces nouvelles réalisations, puisque la conquête n’est plus alors une hypothèse, mais une réalité, avec le cubisme qui s’affiche ouvertement, Roger de La Fresnaye s’inscrit délibérément et volontairement dans la modernité.

La Fresnaye
Le Viaduc de Meulan, p. 80

Cubiste

Jusqu’en 1914, le cubisme sera le monde artistique préféré de Roger de La Fresnaye. «Le cubisme est un mouvement artistique du début du XXe siècle, qui constitue une révolution dans la peinture et la sculpture, et influence également l’architecture, la littérature et la musique.» (Internet)

Un représentant bien connu de ce mouvement est Pablo Picasso.

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À partir de 1911 La Fresnaye peint des œuvres très colorées, de grandes compositions avec des figures ayant les formes géométrisées du cubisme. Il peint aussi des paysages et des natures mortes. Il voit dans le cubisme «un ensemble d’éléments nouveaux susceptibles de contribuer à une renaissance de la tradition classique».

Dès 1912, il dépeint ce qu’il voit en fragmentant la réalité à la manière cubiste, La cheminée d’usine (p. 81), Le Viaduc de Meulan (p. 80), La ville de Meulan (p. 79) et autres tableaux.

Livre d’art

En 256 pages, un ouvrage des éditions Hazan permet de découvrir Roger de La Fresnaye, peintre et sculpteur, dans les trois grandes sections qui divisent l’ouvrage: Les années d’apprentissage, 1885-1908, Les années cubistes, 1911-1914, Chronique d’une mort annoncée, 1914-1925. Articles (12) et illustrations (130) permettent de suivre l’évolution de l’artiste jusqu’à son décès, le 27 novembre 1925 à Grasse.

On ne peut plus ignorer Roger de La Fresnaye lorsque l’on a ce superbe volume entre les mains, et cet artiste mérite bien d’être connu.

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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