La fin de Quatrième de couverture?

Anne Forrest-Wilson envisage déjà un projet moins cher et moins exigeant

médias radio
Anne Forrest-Wilson, créatrice et animatrice de l'émission radiophonique Quatrième de couverture.
Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 04/04/2019 par Michèle Villegas-Kerlinger

Le 25 mai 2019 marquera la fin d’une très belle initiative. Créé en 2016 par Anne Forrest-Wilson et animé par elle depuis novembre de la même année, Quatrième de Couverture est une émission de radio enregistrée en direct.

Les trois invités de chacune de ces tables rondes littéraires, qu’ils soient auteurs, libraires, éditeurs ou simples lecteurs, viennent chacun d’un continent différent: de l’Afrique, de l’Europe ou des Amériques.

Des invités de marque

Nombreux sont les invités de marque qui ont déjà participé aux émissions: Zachary Richard, chanteur louisianais bien connu, Elvis Nouemsi et Éric Robitaille de Radio Canada, Denis Desgagné, l’ancien directeur du Centre de la francophonie des Amériques, Christine Klein-Lataud, ancienne professeure de l’université York, Chloé Leduc-Bélanger, éditrice aux éditions Prise de Parole, et j’en passe.

On y retrouvait aussi Paul Fournel, un des premiers «oulipiens». L’Oulipo est un groupe international de littéraires et de mathématiciens fondé par François Le Lionnais et Raymond Queneau qui pratique l’écriture sous diverses contraintes.

La première année, les chroniqueurs ont commenté l’actualité littéraire. Mais depuis deux ans, ils parlent des livres qu’ils ont lus selon le thème choisi pour l’émission.

Publicité
À Quatrième de couverture: l’animatrice Anne Forrest-Wilson et les chroniqueurs Elvis Nouemsi, Chloé Leduc Bélanger et Christine Klein-Lataud.

Café littéraire

Les sujets sont très variés et portent des titres comme «Secrets de famille», «Le carnaval des animaux», «Quand nourriture rime avec littérature», «Les premiers romans, une nouvelle vague», «Liberté, je crie ton nom» ou «Mystère et langue de bois».

Les auditeurs qui se déplacent pour l’enregistrement de Quatrième de couverture ont souvent le privilège de suivre, grâce à Skype, le travail d’un oulipien à qui Mme Forrest-Wilson lance de beaux défis à relever. Les spectateurs ont aussi la chance de gagner un des nombreux prix généreusement offerts par les nombreux partenaires de l’émission.

Quatrième de couverture est une émission conçue, produite et réalisée par L’écriture en mouvement, un organisme culturel à but non lucratif. Chaque émission dure 60 minutes après quoi les auditeurs sont invités à prendre un café (de Balzac) en compagnie de Mme Forrest-Wilson et des chroniqueurs.

Là, chacun a l’occasion de s’exprimer tout en bouquinant sur place grâce à la présence de «Il était une fois», la librairie française d’Oakville.

Des ponts entre les continents

En créant Quatrième de couverture, Mme Forrest-Wilson voulait suivre l’actualité littéraire mensuelle sur les trois continents déjà mentionnés. Par ailleurs, elle tenait à établir des ponts solides entre les francophones de ces continents, ce qui permet à chacun de s’enrichir au contact de l’autre.

Publicité

Comme Toronto est une ville très cosmopolite, on y retrouve des francophones de partout. Par conséquent, la francophonie torontoise est très hétérogène. Mais, même si les différentes communautés partagent la même langue, elles ne se connaissent pas forcément.

Quatrième de couverture comble ce vide et sert de trait-d’union entre les différentes communautés, les rassemblant grâce à la littérature. Les émissions sont une belle occasion d’unir les francophones de la ville pour partager l’actualité littéraire francophone dans toute sa diversité.

Quatrième de couverture est produite avec le concours de Radio-Canada (de CHOQ-FM la première année), de l’Université de Toronto, du Collège universitaire Glendon, du Français pour l’avenir et du Centre de la Francophonie des Amériques.

La conceptrice et animatrice de l’émission, Anne Forrest-Wilson au micro, avec le Français Éric Bourhis et l’Islandais Torti Tulinius via Skype.

L’argent et la logistique

Avec tant à offrir, on pourrait se demander pourquoi Mme Forrest-Wilson annonce la fin du programme.

Selon l’animatrice, il y aurait le Conseil des arts de l’Ontario qui a coupé son budget de cinq millions de dollars l’année dernière. Les subventions sont de plus en plus difficiles à décrocher pour tous les artistes et initiatives artistiques de la province.

Publicité

Deuxièmement, la logistique représente un défi de taille. Tout d’abord, il faut trouver une salle où faire les enregistrements et aller chercher tout l’équipement nécessaire.

En 2016 et 2017, les émissions se faisaient chez Augustus Jones au coin des rues River et Queen. Mais l’entreprise n’étant plus en mesure d’offrir ces locaux à partir de 2018, Mme Forrest-Wilson a dû chercher un autre endroit dont l’acoustique et l’accessibilité convenaient aux besoins du programme.

Ensuite, trouver des thèmes et lire une demi-douzaine de livres par mois demandent un investissement en temps considérable difficilement compatible avec une activité professionnelle pour Mme Forrest-Wilson et les chroniqueurs des émissions.

Troisièmement, un projet de cette envergure ne se fait pas sans collaborateurs. Il faut que tant les organismes, publics et privés, que les individus s’investissent comme mécènes, invités ou auditeurs. Si un de ces éléments n’est pas au rendez-vous, les émissions ne peuvent se réaliser.

Encourager la lecture

Mais dans une province où 48% des francophones seraient analphabètes, ne devrait-on pas promouvoir des initiatives du genre de Quatrième de couverture qui, justement, encourage la lecture et l’amour de la littérature?

Publicité

Si le nombre de francophones en Ontario a augmenté entre 1996 et 2016 (de 6 711 630 à 7 452 075), le pourcentage a diminué (passant sous la barre des 5%).

Le vieillissement de la population, les mariages exogames et le peu d’immigrants francophones accueillis par la province sont autant de facteurs qui contribuent à l’assimilation des francophones.

Est-ce que des projets comme Quatrième de couverture n’apportent pas une piste de solution à ce phénomène en alimentant l’amour et la beauté de la langue française?

Quatrième de couverture est enregistré devant public.

La fureur de lire

La dernière émission de Quatrième de couverture aura lieu bientôt, mais ce sera sans doute le début d’un tout nouveau projet envisagé par Mme Forrest-Wilson si les conditions peuvent être réunies.

Elle prévoit de lancer le même jour La fureur de lire tout de suite après l’enregistrement du dernier Quatrième de couverture. Le nouveau programme promouvra la lecture, la littérature et la littératie, à l’égal que le premier, mais sous un autre format, moins cher que le premier et moins exigeant du point de vue logistique.

Publicité

Par contre, l’animatrice tient à ce qu’un volet annuel du nouveau programme se fasse avec une plus grande participation du public.

Tous les francophones et les francophiles de la grande région de Toronto sont cordialement invités à assister à cet enregistrement dont la date et le lieu restent à déterminer. L’écriture en mouvement informera le public dès que possible sur le lieu et l’heure de l’événement. Mais sachez déjà qu’il y aura des invités, de très nombreux prix, du café, des pâtisseries et beaucoup, beaucoup de livres!

Auteur

  • Michèle Villegas-Kerlinger

    Chroniqueuse sur la langue française et l'éducation à l-express.ca, Michèle Villegas-Kerlinger est professeure et traductrice. D'origine franco-américaine, elle est titulaire d'un BA en français avec une spécialisation en anthropologie et linguistique. Elle s'intéresse depuis longtemps à la Nouvelle-France et tient à préserver et à promouvoir la Francophonie en Amérique du Nord.

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur