La faim au Canada: moins de familles monoparentales, plus d’ainés

Plus d'un million de Canadiens visitent chaque mois une banque alimentaire (ici la banque Compass à Mississauga).
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Publié 19/11/2019 par Marc Poirier

Pour ceux qui préfèrent le verre à moitié plein, le dernier rapport de l’organisme Banques alimentaires Canada compte des signes encourageants: comparé à 2018, le nombre de visites à l’échelle du pays a légèrement diminué; parmi les utilisateurs, le pourcentage de familles monoparentales ainsi que celui des enfants sont à la baisse.

Pour ceux qui voient plutôt le verre à moitié vide, les chiffres sont inquiétants: près d’un utilisateur sur deux est une personne vivant seule; la proportion de personnes âgées qui fréquentent les banques alimentaires ne cesse d’augmenter.

À la banque alimentaire Compass à Mississauga.

Tendances troublantes

La directrice des communications de Banques alimentaires Canada, Sylvie Pelletier, affirme que la situation est encore loin d’être rose.

«Bien que les visites se soient stabilisées dans la dernière année, on voit quand même des tendances troublantes. On parle quand même de 1,1 million de visites dans un mois seulement à travers le Canada. C’est quand même des niveaux qui sont très élevés.»

Le Bilan-Faim 2019 publié la semaine dernière, provient de données recueillies en mars dernier auprès d’environ 5000 banques alimentaires du pays.

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Banques alimentaires Canada produit ces rapports annuels depuis 2001. C’est en 2011, trois ans après la récession de 2008, que le nombre de visites a atteint un sommet, soit plus de 1,2 million dans un mois. Huit ans plus tard, ce chiffre n’a diminué que d’environ 100 000.

Une clientèle changeante

Si le nombre de visites change peu, la composition de la clientèle, elle, a grandement varié ces dernières années.

Ainsi, la proportion des enfants qui visitent les banques alimentaires est passée de 37,2% en 2010 à 34,1% en 2019. Un chiffre qui est cependant loin de satisfaire Sylvie Pelletier. «Les enfants représentent 20% de la population générale. Alors ils sont surreprésentés dans l’utilisation des banques alimentaires et ça, c’est inacceptable.»

Le pourcentage de la clientèle provenant de familles monoparentales a également diminué au fil des ans: de 27,5% en 2010, il est maintenant de 18,3%, une baisse de près de 10 points.

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Par contre, ce sont maintenant les personnes vivant seules qui sont les plus présentes. Presque une personne sur deux qui se rend à une banque alimentaire fait partie de ce groupe. Du jamais vu, souligne Sylvie Pelletier.

«C’est un groupe dont on ne parle pas dans les médias en général. Les gouvernements les ignorent dans leurs politiques.»

Les oubliées du filet social

Des propos qui résonnent auprès de la directrice de la banque alimentaire de Mississauga, en Ontario. Meghan Nicholls constate aussi que les personnes vivant seules sont les oubliées du filet social.

«Si vous vivez avec 766 $ par mois sur l’assistance sociale en Ontario, c’est carrément impossible de joindre les deux bouts. Vous ne pouvez même pas louer un logement pour 766 $ ici.»

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Si le rapport Bilan-Faim 2019 fait état d’une légère baisse dans l’achalandage, c’est plutôt le contraire à Mississauga, où le nombre de visites a grimpé coup sur coup de 13% en 2018 et 16% cette année.

La situation est similaire à banque alimentaire de Kapuskasing, dans le nord l’Ontario. «Le nombre de clients a fortement augmenté. Elle a presque doublé en trois ans», rapporte le gestionnaire Rick Bartlett. Il explique cela en partie par l’arrivée de nouveaux clients, dont des étudiants internationaux au campus de l’Université de Hearst et des gens venus du sud de la province attirés par un coût de la vie moins cher.

On voit poindre un autre groupe qui a de plus en plus recours à cette aide alimentaire, soit les personnes âgées. En trois ans, rapporte le rapport, leur nombre a fait un bon de 30%.

Honte

À l’Île-du-Prince-Édouard, du côté de la banque alimentaire de Summerside, gérée par l’Armée du Salut, on voit malheureusement le phénomène s’accentuer.

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«Quand les personnes âgées viennent ici, c’est avec la tête baissée. Vraiment baissée», souligne le responsable Wayne Green. «Ils ont honte de venir. Ils ont vécu de façon indépendante toute leur vie et c’est très difficile pour eux de se résigner à venir nous voir. Mais ce sont aussi ceux qui sont les plus reconnaissants.»

À la banque alimentaire Compass à Mississauga.

Quelques solutions

Dans son rapport annuel, Banques alimentaires Canada propose aux dirigeants politiques quelques moyens pour s’attaquer aux causes profondes de la faim au pays:

• Aide à la création de services abordables d’apprentissage et de garde des jeunes enfants au pays.

• Soutien accru aux adultes vivant seules à faible revenu.

• Mise en œuvre immédiate de l’Allocation canadienne d’aide au logement.

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• Établissement de projets pilotes dans le dossier du revenu de base pour tous.

• Efforts de réduction de l’insécurité alimentaire dans le Nord.

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