La dinde et la farce

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Publié 21/12/2009 par Martin Francoeur

Je ne suis pas du tout dans l’esprit des Fêtes… Pourtant, je l’étais jusqu’à il y a quelques jours. Comme c’est le cas chaque année, j’avais même du retard dans l’achat des cadeaux que j’allais offrir à mes proches. Mes décorations, assez sommaires, étaient complétées, mais c’est sans grande conviction que je les avais installées, sachant que j’allais être absent pour une partie de la période au cours de laquelle on les met normalement en valeur. Il est difficile d’être véritablement dans l’esprit de Noël quand il fait 28 ou 29 degrés Celsius et qu’une mer turquoise s’abreuve des rayons du soleil.

J’écris ces lignes depuis Cuba, où le travail m’a envoyé pour quelques jours. Pas ma collaboration pour L’Express, non. Il n’y aurait probablement aucune raison de m’envoyer sur la plus grande île des Antilles pour trouver l’inspiration pour une chronique «En bon français».

C’est plutôt mon travail habituel de journaliste pour Le Nouvelliste, le quotidien de la région de Trois-Rivières, qui fait en sorte que je me retrouve ici. Quelques jours à peine. Pour travailler tout en profitant du soleil.

J’avoue que je ne déteste pas ça. La seule idée de faire un pied de nez aux grands froids m’enchante. Normalement, je le fais en mars, quand l’hiver rigoureux est sur ses derniers milles. Mais je n’allais pas rater l’occasion de goûter au bonheur de sentir le sable sous mes pieds, de laisser les vagues venir me souhaiter la bienvenue, de découvrir la riche histoire de La Havane et de siroter quelques cocktails exotiques pendant quelques jours.

Par acquit de conscience, j’avais apporté un seul livre, dans lequel je m’étais promis de trouver l’inspiration pour cette chronique. J’ai remporté mon pari.

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Je crois que j’ai déjà glissé un mot, dans ces pages, de l’ouvrage de Robert Henry, intitulé Petites histoires savoureuses des mots que l’on mange. Je me suis arrêté, cette fois, sur deux ou trois pages consacrées à la «dinde» et à sa «farce». Histoire, bien sûr, de rester dans l’esprit des Fêtes.

La dinde, donc. Tradition oblige, il y a fort à parier que des milliers de familles piqueront leur fourchette dans une dinde pendant le temps des Fêtes.

Dans son bouquin, Robert Henry nous apprend que lorsque les nobles dames de la cour du roi Louis XIV virent une dinde pour la première fois, elles demandèrent d’où venait cette «poule». Quelqu’un leur aurait répondu «Elle est d’Inde», en faisant allusion au fait que l’Inde symbolisait à l’époque tout ce qu’il y avait de mystérieux et qui venait d’Orient.

Mais en fait, le volatile aurait plutôt, selon certains, été ramené du Mexique au seizième siècle. L’Amérique, à cette époque, était identifiée comme étant les «Indes occidentales».

L’auteur nous apprend que selon d’autres sources, la dinde serait venue, bien avant la découverte de l’Amérique, d’Abyssinie, qu’on appelait aussi Inde. Un peu comme tous les pays lointains à l’époque.

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Comme ces oiseaux transitaient par la Turquie pour entrer en Europe, on leur donna rapidement le nom anglais de «turkey». On dit aussi qu’en France, l’acclimatation du dindon fut longtemps l’apanage des jésuites, si bien que ces deux mots – dindon et jésuite – étaient devenus synonymes. Ce qui, selon l’auteur, choquait Alexandre Dumas, qui trouvait cette confusion offensante… pour les dindons!

Depuis l’arrivée des colons européens en Amérique, la dinde et le dindon sont associés à différentes fêtes, dont Noël et Thanksgiving.

Chez nous, la dinde est souvent accompagnée d’une farce, lorsque celle-ci n’est pas carrément insérée à l’intérieur de la volaille, débarrassée de ses abats.

Le mot «farce» désigne non seulement ce hachis parfumé d’herbes, mais aussi, comme tout le monde le sait, une comédie plus ou moins bouffonne insérée dans une pièce sérieuse. La parenté de sens entre la farce qu’on introduit à l’intérieur d’une dinde et celle que l’on insère dans une œuvre dramatique devient ainsi évidente.

Évidemment, il y aurait bien des choses à raconter sur l’étymologie ou sur l’histoire de certains autres mots de la gastronomie des Fêtes. Que de trouvailles nous réservent les mots «ragoût», «tourtière», «sandwich» ou «pain de viande»…

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Mais je les conserve pour de futures chroniques!
À vous tous, de très joyeuses Fêtes!

Auteur

  • Martin Francoeur

    Chroniqueur à l-express.ca sur la langue française. Éditorialiste au quotidien Le Nouvelliste de Trois-Rivières. Amateur de théâtre.

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