La Dempster Highway et Inuvik, T.N.-O.

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Publié 07/06/2011 par Benoit Legault

… Suite de la semaine dernière

Dès l’entrée les Territoires du Nord-Ouest. La Dempster Highway épouse les courbes et les cols des montagnes Richardson. Tous les sens participent à l’expérience. Paysages, odeurs, son du roulement des pneus et du vent s’engouffrant dans les fenêtres baissées. Les deux mains sur le volant, on y vit pleinement.

À cette apothéose succède un plat pays infesté de gros moustiques. Et nous arrivons éventuellement à Fort McPherson. L’isolement des autochtones est impressionnant. Comment bien vivre dans un tel village? Le village suivant, Tsigehtchic, apporte une réponse: dans la joie. On y célèbre un mariage et c’est très émouvant.

Plus que quelques heures de gravier avant l’arrivée à Inuvik. C’est excitant mais je suis un peu déçu d’arriver si vite au bout de la route. La plus grande ville arctique au Canada, Inuvik compte moins de 4000 habitants mais c’est très étendu, et les bâtiments publics semblent énormes.

Quelle collectivité fascinante. À son cœur, les autochtones; solides, souriants, fiers mais déracinés. Et tout autour, les commerçants et administrateurs venus de partout. Des proprios du Moyen-Orient vendent de la poutine à 12,10$ au restaurant The Roost; le Dempster Burger y coûte 13,30$. Bienvenue aux prix du Grand Nord.

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Une des choses plus intéressantes à faire à Inuvik est simplement de demander aux gens pourquoi ils y habitent. Par exemple, je l’ai demandé au proprio chinois d’un dépanneur. J’avais un dépanneur à Toronto mais je dépensais tout mon argent dans les salons de massage et les casinos. Ici, je n’ai pas ces tentations, dit-il, avec un air duquel je discernais difficilement la satisfaction de la résignation.

Pas de transport en commun à Inuvik, mais des taxis qui demandent 5$, peu importe la destination… qui ne peut être très loin sur cette îlot d’urbanité dans le delta du Mackenzie. Mon chauffeur de taxi est arabe; autre cliché me direz-vous.

Il m’explique qu’il roule 12 mois par année avec des pneus d’hiver. La traction est meilleure dans la boue et le gravier, et on risque moins les crevaisons.

Nous dormirons dans le beau Arctic Chalet en marge d’Inuvik (articchalet.com & 1 800 685-9417). Les proprios coordonnent des excursions en petit avion vers Tuktoyaktuk (les locaux disent simplement Tuk). Le vol aller-retour et la visite guidée coûte quelques centaines de dollars. Ces dollars compteront parmi les mieux dépensés de ma vie.

Le vol de 200 km se fait essentiellement au-dessus du fascinant delta du fleuve Mackenzie. On bifurque vers la droite une fois arrivé à la mer de Beaufort, portion de l’océan Arctique.

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Juste avant d’arriver, on surplombe le parc national des pintos, ces incroyables monts d’une quarantaine de mètres de haut formés par l’action prolongée du gel, de l’eau et du pergélisol – autre surprise captivante de ce voyage. On peut aussi venir à Tuk en bateau, ce qui doit être tout aussi criant.

Une guide autochtone nous fait faire le tour la petite collectivité de quelques centaines d’habitants. C’est le soir mais le soleil est aveuglant. Les jeunes jouent au basketball. Ils jouent presque 24 heures sur 24 en été, raconte la guide, mais les adultes s’écroulent de fatigue malgré la lumière. Tuk n’est pas Westmount, mais la misère n’est pas évidente. Il y flotte une joie de vivre communautaire qui me rappelle, c’est étrange, la visite de villages reculés en Afrique noire… La nature humaine n’a pas de latitude.

La grande curiosité de Tuk est son congélateur communautaire naturel creusé depuis la nuit des temps dans le pergélisol. Mais le frisson de plaisir attendu de tous est le rituel de la trempette du gros orteil dans l’Arctique. L’eau est froide mais l’émotion est forte.

Retour à Inuvik où il fait plus de 20 degrés. Une dernière journée sans fin se termine. Le lendemain il faut repartir de ce terrain de jeu géant pour les vrais voyageurs. Il faudra bien revenir l’hiver, emprunter la route de glace jusqu’à Tuktoyaktuk. Ou bien au printemps quand les jours sont déjà longs, les jours pas trop froids, et que la neige permet mille activités.

Notes de voyage

On croise partout des visiteurs francophones du Canada et de l’Europe. Et la francophonie en résidence est très dynamique au Yukon, tout comme les nombreux Français et Canadiens français qui ont marqué l’histoire initiale du Yukon à Dawson City. Beaucoup de commerces touristiques sont opérés par des francophones et les services d’information du Yukon sont souvent bilingues.

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La Dempster Highway n’est pas pour tout le monde. Il faut gérer un certain goût du risque et être bien préparé (pneus de secours, véhicule en très bon état de marche, capacité à bien réagir en cas de panne ou d’accident à des centaines de km de services).

Mais pour bien des gens, c’est potentiellement le voyage le plus marquant d’une vie.

Infos touristiques: Yukon – travelyukon.com/fr & 1 800 661-0494; T.N.-O. – tourismetno.com & 1 866 849-9139.

Auteur

  • Benoit Legault

    Journaliste touristique basé à Montréal. Collaborateur régulier au Devoir et à l-express.ca. Responsable de la rédaction de guides Ulysse. Benoit Legault a remporté plusieurs prix de rédaction touristique. Il adore l'Ontario et ses Grands Lacs.

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