Le 16 avril dernier, la Cour suprême du Canada a rejeté les demandes d’autorisation d’appel de Noël Ayangma dans quatre dossiers:
a) Ayangma c. Université de Moncton (dossier 39028);
b) Ayangma c. Université de Moncton et Association des bibliothécaires, professeures et professeurs de l’Université (dossier 39031);
c) Ayangma c. Commission scolaire de langue française et English Language School Board (dossier 39021);
d) Ayangma c. Commission des droits de la personne de l’Île-du-Prince-Édouard et English Language School Board (dossier 39000).
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Plaideur quérulent
Dans toutes les provinces, une règle de procédures ou un article d’une loi permet à la Cour supérieure de rendre une ordonnance interdisant à une partie d’introduire d’autres instances ou encore de continuer une instance déjà introduite devant ces tribunaux, à moins d’en avoir obtenu l’autorisation d’un juge.
Afin de déterminer s’il doit rendre une telle ordonnance, le juge peut tenir compte de toute ordonnance semblable rendue contre la personne en cause par tout autre tribunal, y compris un tribunal situé à l’extérieur de la province, ainsi que des instances que cette personne a introduites de façon persistante et sans motif raisonnable devant tout autre tribunal, y compris un tribunal situé à l’extérieur de la province.
Parmi les divers facteurs qui peuvent être pris en considération par le juge saisi de la motion afin de déterminer si un plaideur est quérulent ou non, il y a notamment:
(a) une propension à remettre en litige des questions qui ont déjà été entendues;
(b) le fait de soutenir des allégations d’actes irréguliers sans fondement contre une partie opposée, des avocats, la cour ou des fonctionnaires administratifs;
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(c) le refus de se plier aux règles et aux ordonnances judiciaires, notamment le refus de verser les dépens.
Ayangma c. Université de Moncton
Noël Ayangma occupait un poste de professeur à temps partiel à l’Université de Moncton où il a présenté en vain sa candidature à un poste à temps plein.
Il affirme que l’Université fait preuve de discrimination envers lui sur le fondement de sa race, de sa couleur et de son âge en embauchant une personne qui ne possédait pas les qualifications nécessaires.
Il intente alors une action au civil contre l’Université, dans laquelle il réclame des dommages-intérêts en réparation de conduite délibérée et négligente par l’Université, d’une assertion inexacte, de la mauvaise foi et d’une violation des droits que lui garantit la Charte canadienne des droits et libertés.
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Il dépose un avis obligeant l’Université à lui remettre un meilleur affidavit des documents que celui qu’il a reçu et qu’il considère inadéquat. Il présente une motion pour contraindre l’Université à déposer un affidavit conforme aux Règles de procédures.
L’Université dépose une motion demandant que les plaidoiries de Ayangma soient radiées et qu’il soit déclaré plaideur quérulent.
Ayangma exprime des craintes au sujet de l’impartialité du juge de première instance et dépose une motion pour que le juge se récuse. Le 17 décembre 2018, le juge Jean-Paul Ouellette rejette la motion en récusation.
Le 13 février 2019, il accueille la motion en jugement sommaire au motif que l’action était prescrite et déclare Ayangma plaideur quérulent.
Ayangma porte ces décisions en appel. Le 10 octobre 2019, le juge en chef de la Cour d’appel du Nouveau-Brunswick, Marc Richard, et ses collègues juges Kathleen Quigg et Barbara Baird, rejettent son appel avec dépens.
Par l’entremise de Maître Sacha Morisset, du cabinet Stewart McKelvey, l’Université fait entre autres valoir que la demande «témoigne d’un certain acharnement et abus du système judiciaire par un justiciable qui a eu l’opportunité de faire valoir sa thèse, mais qui n’accepte tout simplement pas le verdict rendu».
Ayangma réplique en affirmant que le juge Ouellette l’a déclaré plaideur quérulent seulement pour protéger l’Université. Il ajoute que le traitement qu’il subit constitue une erreur judiciaire fondamentale justifiant l’intervention du plus haut tribunal du pays, afin de restaurer la confiance dans l’administration de la justice au Nouveau-Brunswick.
Le 16 avril dernier, la Cour suprême du Canada rejette la demande d’autorisation d’appel dans le dossier 39028.
Ayangma c. Université de Moncton et Association des bibliothécaires, professeures et professeurs de l’Université
Au cours de la période où il a été au service de l’Université, Ayangma était membre d’une unité de négociation («l’Association»). En janvier 2018, l’Université informe Ayangma que des étudiants se sont plaints de la qualité de son enseignement.
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L’Université rappelle qu’une partie de son régime salarial comprend une prime étant donné qu’il est titulaire d’un doctorat. Elle demande à M. Ayangma de lui remettre une copie de sa thèse de doctorat. Au lieu de cela, Ayangma présente un résumé de sa thèse.
Constatant que ce résumé est analogue à celui d’un autre candidat au doctorat, l’Université retire la prime en attendant de recevoir le texte complet de sa thèse.
L’Université conclut aussi que Ayangma a violé la convention collective parce qu’il a omis de déposer en temps voulu les évaluations des étudiants. Il est suspendu avec salaire puis, par la suite, congédié.
Il dépose onze griefs par l’entremise de son syndicat. Un arbitre est nommé. Le jour de l’audience, il se présente sans sa thèse et refuse de la produire, faisant valoir que l’Université n’a pas établi sa pertinence.
L’arbitre ajourne l’audience et lui accorde cinq jours pour produire sa thèse. Devant le refus d’Ayangma d’obtempérer, l’arbitre rejette le grief. Ayangma demande la révision judiciaire de cette décision. Sa demande de révision judiciaire est rejetée. Le 10 octobre 2017, la Cour d’appel du Nouveau-Brunswick rejette son appel.
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Ayangma demande l’autorisation d’en appeler en Cour suprême. L’Université souligne l’illogisme de la démarche: «Il est un non-sens pour quelqu’un de contester par grief une mesure quelconque, pour ensuite prendre la position que son propre grief est irrecevable par un arbitre.»
En réplique, Ayangma réitère que l’arbitre n’avait pas compétence pour être saisi du grief.
L’avocat de l’Association avait demandé à Ayangma s’il avait plagié sa thèse ou s’il y avait d’autres raisons de la sorte qui pourraient justifier que l’Association s’oppose à ce qu’une copie soit remise à l’employeur.
Le demandeur avait affirmé que ce n’était pas le cas et c’est sur la base de cette affirmation que l’Association a mandaté son avocat de maintenir la position que la dissertation était pertinente. En réplique, Ayangma affirme que le traitement qu’il subit est une parodie de justice.
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Le 16 avril dernier, la Cour suprême du Canada rejette la demande d’autorisation d’appel dans le dossier 39031
Ayangma c. Commission scolaire de langue française et English Language School Board
En juillet 2015, Ayangma dépose une déclaration contre les deux conseils scolaire de l’Île-du-Prince Édouard, alléguant que celles-ci ont fait preuve de discrimination à son égard dans deux concours de recrutement, le premier pour doter le poste de directeur général du conseil scolaire de langue française, en août 2012, et le deuxième, pour doter le poste de directeur des ressources humaines du conseil scolaire de langue anglaise, en septembre 2013.
Ayangma avait précédemment été débouté dans une plainte relative aux droits de la personne fondée sur essentiellement les mêmes faits devant le Tribunal des droits de la personne. Le 16 novembre 2018, les intimées obtiennent du juge James Gormley, de la Cour suprême de l’Île-du-Prince-Édouard, une ordonnance de radiation de la déclaration au motif que celle-ci ne révèle aucune cause d’action valable.
Ayangma interjette appel. Le 31 juillet 2019, la Cour d’appel de l’Île-du-Prince-Édouard accueille l’appel en partie, mais confirme la décision du juge à l’effet que la demande ne révèle aucune cause raisonnable d’action basée sur une violation de la convention collective, du devoir de conduite honnête et du droit constitutionnel à la mobilité.
Ayangma demande l’autorisation d’en appeler en Cour suprême. Au nom des deux conseils scolaires, les avocates Karen Campbell et Jessica Gillis, du cabinet Cox & Palmer, répondent notamment que la demande ne soulève aucune question d’importance publique ou nationale ni aucun débat jurisprudentiel nécessitant l’intervention du plus haut tribunal du pays.
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Le 16 avril dernier, la Cour suprême du Canada rejette la demande d’autorisation d’appel dans le dossier 39021.
Ayangma c. Commission des droits de la personne de l’Île-du-Prince-Édouard et English Language School Board
En septembre 2013, l’English Language School Board (« ELSB ») doit pourvoir au poste de directeur des ressources humaines. Un comité de sélection est formé pour examiner les besoins liés au poste et déterminer les exigences minimales du poste en matière de scolarité et d’expérience.
L’avis du poste à pourvoir prévoit notamment que le candidat doit posséder un grade universitaire et une vaste expérience dans un rôle principal de gestion des ressources humaines dans un milieu syndiqué complexe.
La demande de M. Ayangma est l’une des dix demandes reçues par l’ELSB. Ayangma fait partie des sept candidats éliminés à la présélection parce qu’ils ne possédent pas les compétences et l’expérience nécessaires. Trois candidats ont été présélectionnés pour une entrevue.
Ayangma dépose une demande à la Commission des droits de la personne («CDP»), alléguant que l’ELSB a fait preuve de discrimination à son égard sur le fondement de la couleur, de la race ou de l’origine ethnique ou nationale, et parce qu’il a déjà déposé des plaintes. L’ELSB rejette sa demande de communication de tous les documents de demande de chacun des trois candidats présélectionnés pour une entrevue.
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La direction principale de la CDP conclue que M. Ayangma n’a pas établi qu’il y a discrimination du seul fait qu’il n’a pas été convoqué à une entrevue lors du processus d’embauche.
La demande de M. Ayangma en révision par le président de la CDP est rejetée. Sa demande subséquente en contrôle judiciaire est rejetée également.
Le 25 juillet 2019, le juge en chef David Jenkins, de la Cour d’appel de l’Île-du-Prince-Édouard, et ses collègues juges Michele Murphy et John Mitchell rejettent son appel.
Au nom du English Language School Board, les avocates Maître Karen Campbell et Jessica Gillis signalent que, le 19 décembre 2013, le directeur général de la Commission des droits de la personne a suspendu temporairement l’instruction de la plainte en attendant le résultat de la révision judiciaire dans un dossier similaire (Ayangna c. Commission scolaire de langue française, 2014 PESC 18). Elles affirment qu’en aucun temps, le demandeur n’a été privé d’équité procédurale.
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Le 16 avril dernier, la Cour suprême du Canada rejette la demande d’autorisation d’appel dans le dossier 39000.
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Avocat et notaire depuis 1988, ex-directeur général de l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario. Souvent impliqué dans des causes portant sur les droits linguistiques. Correspondant de l-express.ca, votre destination pour profiter au maximum de Toronto.
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