En septembre 2005, Dalton McGuinty interdit tout arbitrage religieux en droit de la famille et met fin à un débat houleux qui secoue le Canada et l’Ontario depuis la publication du rapport Boyd. Le rapport, publié en décembre 2004, recommande la reconnaissance juridique du système de la charia en Ontario pour les questions du droit familial. Un documentaire retrace aujourd’hui les grandes lignes du débat en donnant la parole aux principaux intervenants de la communauté musulmane ontarienne.
«J’ai trouvé l’idée de réaliser ce documentaire excellente car elle posait à plat la question du multiculturalisme et la manière dont le Canada gérait les nouveaux immigrants musulmans», explique Dominique Cardona, la cinéaste derrière La Charia au Canada de la maison de production torontoise Médiatique.
L’arrivée massive d’immigrants musulmans ces dernières décennies a positionné l’islam en seconde position des religions pratiquées au Canada. La question de l’intégration culturelle et juridique de chaque citoyen a alors été évoquée lorsqu’en 2003, l’Institut islamique de justice civile a demandé l’instauration de tribunaux islamiques fondé sur les lois de la charia pour la résolution de différends familiaux et de successions. Cela a mis le feu aux poudres en Ontario mais plus encore dans la communauté musulmane.
«Ce n’est pas une question de liberté religieuse. La charia est un corpus juridique qui se superposerait aux lois canadiennes, souligne dans le documentaire, Fatima Houda-Pépin, députée à l’Assemblée nationale du Québec et Canadienne d’origine marocaine. Formés à l’étranger, les imams canadiens ont un agenda politique. Le Canada reconnaît le droit de chacun à sa religion, alors je dis oui à l’islam, non à l’islamisme!»
Les deux épisodes de 45 minutes du documentaire retracent les principaux points névralgiques du débat. Dans «Qu’est ce qui fait si peur?», Dominique Cardona donne la parole aux femmes francophones de la communauté musulmane. Aziza, Bouchra, Amira, Mounia et Noor évoquent leurs craintes, parfois de façon anonyme, face à ces tribunaux de la charia, qui leur enlèveront tous leurs droits. «Les imams au Canada durcissent leurs positions parce que les femmes musulmanes sont plus libres qu’avant», explique Amira, une musulmane pratiquante et progressiste.