La biographie d’Omer Deslauriers: portrait minutieux et rigoureux

Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 04/11/2008 par Paul-François Sylvestre

Chaque État, chaque nation, chaque communauté linguistique a ses pionniers, ses bâtisseurs, ses figures de proue. En Ontario français, des leaders tels que Élisabeth Bruyère, Napoléon-Antoine Belcourt, Samuel Genest, Almanda Walker-Marchand et Robert Gauthier ont marqué notre paysage politique, culturel ou religieux. Il faut ajouter à ces noms celui d’Omer Deslauriers qui vient de faire l’objet d’une biographie bien étoffée, intitulée Omer Deslauriers (1927-1999): visionnaire, rassembleur et bâtisseur, lancée lors du Salon du livre de Toronto.

Le nom d’Omer Deslauriers est connu par une foule d’acteurs dans nombre de sphères d’activités, de l’éducation à la santé, en passant par la politique et le droit/nos droits. Omer Deslauriers a été frère enseignant, directeur d’école, président de l’Association des enseignants franco-ontariens, de l’Association canadienne-française de l’Ontario et du Conseil des affaires franco-ontariennes, instigateur du Collège agricole d’Alfred, candidat aux élections provinciales, délégué général de l’Ontario à Bruxelles, fondateur de centres médico-sociaux communautaires, et j’en passe. Il a été un as du lobbying, capable d’allier diplomatie et revendication au profit de la communauté franco-ontarienne.

Le chercheur Jean Yves Pelletier et l’écrivain François-Xavier Simard ont brossé un portrait aussi minutieux que rigoureux du Franco-Ontarien qui a le plus marqué le dernier quart du XXe siècle. Né à Hawkesbury en 1927, Omer Deslauriers entre chez les Frères des écoles chrétiennes à l’âge de 17 ans (il demeurera en communauté jusqu’à l’aube de ses 43 ans). Deslauriers joue un rôle de premier plan dans l’établissement des écoles secondaires publiques de langue française en Ontario. Son leadership est reconnu et apprécié, il a l’étoffe d’un visionnaire, d’un rassembleur, d’un bâtisseur. Le ministre de l’Éducation, William Davis, s’en rend compte; devenu premier ministre, il fait appel à Deslauriers pour présider le Conseil des affaires franco-ontariennes. Le nouveau président va dès lors jeter les bases de ce qui deviendra, dix ans plus tard, la Loi ontarienne sur les services en français.

Omer Deslauriers a grandi dans le comté de Prescott, au milieu de cultivateurs et fermiers. Il sait que la communauté a besoin d’une institution de formation agricole. Aussi milite-t-il en faveur de la création du Collège agricole d’Alfred, affilié à l’Université de Guelph. Fort de son expérience de lobbyiste pour la cause scolaire, Deslauriers ne tarde pas à découvrir que les Franco-Ontariens demeure souvent trop éloignés des arcanes du pouvoir politique. Aussi décide-t-il de se porter candidat aux élections provinciales du 19 mars 1981, sous la bannière conservatrice. Le premier ministre Bill Davis aurait dû lui offrir le comté (sur) de Prescott-Russell et non le parachuter dans Ottawa-Est, bastion libéral. Le député sortant, Albert Roy, défait aisément Deslauriers. À mon avis, ce saut en politique, dans Ottawa-Est, a été une erreur de jugement.

Peu après les élections de 1981, Omer Deslauriers est nommé premier délégué général de l’Ontario à Bruxelles. Certains ont dit que ce poste était une récompense pour avoir porté le flambeau conservateur dans Ottawa-Est. Les apparences sont trompeuses. Deslauriers avait les compétences d’un diplomate et il en avait fait la preuve dans tous les dossiers qu’il avait pilotés depuis une dizaine d’années. Il a rempli son rôle avec un rare dynamisme, évoluant aisément dans les dossiers éducatif et culturel, comme sur les fronts économique et politique.

Publicité

Après l’éducation, la politique et la diplomatie, Omer Deslauriers se tourne vers la santé. Membre actif de la communauté franco-torontoise, il se rend vite compte que ses compatriotes sont très mal desservis en matière de services médico-sociaux. Il rassemble les forces de la communauté et ouvre la voie à la création d’un Centre médico-social communautaire. Le succès retentissant de cette expérience le pousse à jouer encore une fois le rôle de bâtisseur, ailleurs en province: Cornwall, Timmins, Elliot Lake, Sault-Sainte-Marie, Hamilton, North Bay et j’en passe.

Les auteurs de cette biographie fort attendue n’hésitent pas à souligner, heureusement, que la contribution d’Omer Deslauriers a été reconnue à plusieurs reprises. Il a évidemment reçu des honneurs bien mérités (Ordre du mérite franco-ontarien, Ordre du Canada, Ordre de la Pléiade); son nom a aussi été donné à une école secondaire (Ottawa) et à un centre de soins de longue durée (Toronto).

La biographie d’Omer Deslauriers se lit comme un roman d’aventure. Le style est rythmé et les rebondissements sont nombreux. Jean Yves Pelletier et François-Xavier Simard méritent le Prix Christine-Dumitriu-Van-Saanen, voire le Prix Trillium. Qui vivra verra! Cela dit, je dois déplorer que l’index ait été dressé à la dernière minute, ce qui a engendré de nombreuses erreurs (qui seront corrigées lors du prochain tirage ce mois-ci). J’aurais aussi aimé que cette biographie nous renseigne davantage sur la «sortie» de communauté d’Omer Deslauriers, sur sa rencontre de Norah Paquette et sur le rôle joué par cette dernière dans la vie exaltante d’un grand visionnaire, rassembleur et bâtisseur.

Jean Yves Pelletier et François-Xavier Simard, Omer Deslauriers (1927-1999): visionnaire, rassembleur et bâtisseur, biographie, Ottawa, Éditions du Vermillon, 2008, 376 pages, 112 photos, 22 $.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur