Inside Out choie son public francophone

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Publié 13/05/2008 par l-express.ca

Le 18e festival de films gais et lesbiens Inside Out offrira au public torontois du 15 au 25 mai plus de 250 films dont 65 longs-métrages. Cette année, le Festival a décidé de voir plus grand: outre sa programmation cinématographique, il organise plusieurs expositions, ainsi qu’un symposium de deux jours, les 17 et 18 mai, en collaboration avec l’Université de Toronto.

Comme l’explique Jason Saint-Laurent, directeur de la programmation d’Inside Out, cette expansion du festival était nécessaire: «Avec les expositions, nous souhaitons faire les choses différemment pour élargir nos activités et faire du festival un événement “city-wide”. Nous avons aussi organisé ces conférences avec l’Université de Toronto pour donner une dimension plus large, plus éducative au festival. Ces discussions nous permettront de nous interroger sur l’avenir de ce festival de cinéma gai et sur celui des cinéastes gais. Nous essayons de trouver notre place aujourd’hui et ce symposium sera l’occasion d’y réfléchir.»

Inside Out se penchera donc sur son avenir, et pourra nourrir sa réflexion en regardant tout le chemin parcouru ces dernières années. «Il y a 18 ans, explique Jason Saint-Laurent, Inside Out était une fête beaucoup plus communautaire; diffuser ces films, c’était quasiment un événement politique! Aujourd’hui, on ne parle plus seulement des gais et lesbiennes mais aussi de la transexualité et de l’intersexualité.

Par ailleurs, dans certaines communautés culturelles, être homosexuel représente un enjeu bien particulier. Nous voulons donc désormais refléter cette diversité, pour dépasser les clichés que nous montrent trop souvent les médias et pour que ces personnes se reconnaissent dans des films. Voir leur histoire sur grand écran, cela peut vraiment aider les personnes qui se cherchent.»

L’an passé, le festival avait attiré plus de 32 000 spectateurs; Jason Saint-Laurent en attend au moins autant cette année, tant des membres de la communauté gaie et lesbienne qu’un grand public ouvert à ces questions. Huit longs-métrages francophones sont au programme; nous vous présentons cinq d’entre eux.

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Les Chansons d’amour, de Christophe Honoré. Avec Louis Garrel, Ludivine Sagnier et Chiara Mastroianni. France, 1h40, 2007.

Ismaël et Julie, jeune couple parisien, inaugurent un concept jusqu’alors étranger au sein de leur vie: le ménage à trois. Mais l’arrivée d’Alice dans leur quotidien ne se fait pas sans heurts et Julie nourrit peu à peu une certaine jalousie à l’égard d’Alice, sans pour autant se détacher d’elle.

Alors que le trio peine à trouver une saine stabilité, il est frappé par un événement macabre. Au sortir d’un concert, Julie est victime d’une attaque cardiaque et passe de l’autre côté de la barrière. Ismaël, très proche de la famille de Julie, joue de son côté charmeur et comique pour soutenir ses soeurs. Mais de son côté, alors qu’il montre un visage fort et positif à tout le monde, il entame une crise identitaire majeure, à la recherche de lui-même.

Avec Les Chansons d’amour, Christophe Honoré avait pris un risque: celui de renouer avec un genre totalement démodé en Europe, en l’occurrence la comédie musicale. Et le pari est plus que réussi!

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Si l’on regrette parfois la musicalité des interprétations, leur contenu est troublant, touchant et pertinent. Les chansons servent à merveille le propos du film qui, sans pour autant atteindre des sommets, est porté avec brio par Louis Garrel (Ismaël) en bobo parisien.

Sa compagne à l’écran, Ludivine Sagnier (Julie), joue avec une justesse irréprochable tandis que Chiara Mastroianni, dans le rôle de sa grande soeur Jeanne, adopte une attitude un peu maternelle à l’égard d’Ismaël qui lui sied à ravir.

Et que dire des images de Paris qui, loin des clichés habituels, nous font découvrir ou retrouver une ville intime et intrigante. Définitivement l’un des films à ne pas manquer au sein de cette programmation du festival Inside Out.

Au Royal Ontario Museum, vendredi 16 mai à 19h30.

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XXY, de Lucia Puenzo. Avec Inés Efron, Martín Piroyansky, Ricardo Darin. Argentine/Espagne/France, 1h 31min. 2007.

«Elle a les deux». Après avoir poursuivi et agressé Alex, voilà ce que constatent quatre jeunes: la jeune fille est en fait hermaphrodite, elle est victime de ce qu’on appelle scientifiquement une ambiguïté génitale.

Alex est âgée de 15 ans et ses parents ont refusé son opération lors de sa naissance. Depuis, ils ont quitté Buenos Aires pour se mettre à l’abri des regards le long des côtes uruguayennes.

Lors d’un été, ils reçoivent la visite d’un couple et de leur fils Alvaro. Le père est chirurgien, montre un intérêt scientifique pour l’adolescente et va tenter de convaincre les parents d’Alex de la faire opérer.

L’histoire s’emballe, Alvaro, en proie avec des questions d’identité sexuelle tombe amoureux d’Alex. Loin des questionnements d’adultes, ils vont se découvrir une passion l’un pour l’autre, passion qui sublime la souffrance de ces deux adolescents en quête de réponses.

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Loin de tomber dans le voyeurisme et la crudité des images, Lucia Puenzo signe avec XXY un film tout en pudeur, tendre malgré la noirceur du sujet. Le message est clair et prône la tolérance face à une situation compliquée où les repères habituels tombent à l’eau.

Malgré un rythme parfois un peu lent, la réalisatrice propose pour son premier film, un opus très réussi. La jeune Inès Efron (Alex) livre ici une prestation remarquable dans un rôle pas évident à interpréter. Martin Piroyanski (Alvaro) lui donne la réplique en l’adolescent torturé traversant sa crise d’identité sexuelle.

Le film propose une réflexion sur le regard que l’on peut porter sur les gens différents; les critiques sont unanimes et le film a déjà reçu de nombreuses récompenses, dont le Grand prix de la semaine de la critique du Festival de Cannes. Un film à voir, traitant d’un sujet tabou mais ne sombrant jamais dans la facilité.

Au cinéma Isabel Bader, dimanche 25 mai à 19h30.

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La naissance des pieuvres, de Céline Sciamma. Avec Pauline Acquart, Louise Blachère et Adèle Aenel. France, 1h25, 2006.

L’éveil des sens, chez des jeunes filles de 15 ans, peut justement parfois partir dans tous les sens. Sans expérience, sans repères et sans pitié elles se découvrent et se toisent. Sur fond de piscine, seule attraction d’un quartier sans âme, trois jeunes filles naviguent à vue entre enfance et adolescence, entre cruauté et insouciance.

Marie se découvre une attirance pour la capitaine de l’équipe de natation synchronisée, Florianne, qui flirte avec tous les garçons du coin. Pendant ce temps Anne, la meilleure amie de Marie, assume tant bien que mal son surpoids et son amour pour l’une des conquêtes de Florianne.

Les trois adolescentes ne partagent rien si ce n’est ce désir qui les prend soudainement et qu’elles ne savent de quelle façon assouvir.

La naissance des pieuvres raconte le développement de la sexualité chez trois jeunes adolescentes, comme un monstre qui se réveille dans leur corps et qu’elle ne peuvent réfréner. Il déploie ses tentacules petit à petit, de façon souvent maladroite, les jeunes filles manquant de conseils et vivant le sexe comme un tabou fascinant.

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Les plans sont audacieux et souvent évocateurs des sentiments des adolescentes, et les scènes sous l’eau sont originales. Cependant Céline Sciamma s’attarde peut-être un peu trop sur ses personnages aux dépens du rythme, et certaines scènes manquent de crédibilité.

Malgré ces quelques longueurs, elle parvient toutefois à décrire de façon honnête la cruauté des sens, et les trois actrices principales livrent une interprétation réussie.

Au Royal Ontario Museum, lundi 19 mai à 19h30.

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Les Secrets, d’Avi Nesher. Avec Ania Bokstein, Michal Shtamler et Fanny Ardant. France/Israël, 2h, 2007.

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C’est dans la ville sainte juive de Safed, haut lieu de la kabbale, que le réalisateur israëlien Avi Nasher a decidé de tourner son film Les Secrets. Cette ville ne pouvait pas être mieux choisie pour révéler le parcours initiatique des trois femmes au coeur de l’histoire.

Naomi, experte de la Torah fuyant un mariage arrangé par sa famille orthodoxe, se réfugie pour un an dans une midrasha (école religieuse pour femmes) de Safed.

Elle y fera la connaissance de Michelle, envoyée là par ses parents afin de rentrer dans le droit chemin. Bien que tout semble les opposer, les deux jeunes femmes finissent par se lier d’amitié.

Chargées d’apporter à manger à une mystérieuse femme, Anouk, venue à Safed pour se laver du crime passionnel qu’elle a commis plusieurs années auparavant, les deux pensionnaires de la midrasha vont développer une relation ambigüe, bercée par l’atmosphère mystique de la cité et les rituels kabbalistiques menés pour délivrer Anouk.

Ce film troublant, servi par trois comédiennes remarquables, entraîne le spectateur dans un parcours à l’image du dédale des rues de Safed, un parcours sinueux, qui ne se clarifie que lentement.

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Sur fond de traditionalisme religieux, le réalisateur montre avec pudeur la naissance de l’amour qui unit progressivement les deux jeunes femmes, en dépit des tabous de la société juive orthodoxe et de la lourde atmosphère de la midrasha.

Il réussit le pari d’aborder ce sujet délicat sans voyeurisme, sans en dire ou en montrer plus que nécessaire. Et c’est certainement ce qui donne toute sa force à cet excellent film.

Au Royal Ontario Museum, dimanche 18 mai à 21h45.

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Les Témoins, d’André Téchiné. Avec Michel Blanc, Emmanuelle Béart, Sami Bouajila et Johan Libéreau. France, 1h55, 2007.

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Quand Adrien (Michel Blanc), docteur homosexuel à la recherche d’une nouvelle conquête, rencontre Manu (Johan Libéreau), il ne sait pas encore qu’il s’apprête à plonger dans une histoire qui finira par le dépasser.

L’été arrive et il présente Manu à son amie Sarah (Emmanuelle Béart), auteure de livres pour enfants qui vit mal son nouveau statut de maman, et à son mari Mehdi (Sami Bouajila), inspecteur de police.

Et contre toute attente, c’est entre Mehdi et Manu qu’une idylle va naître, bousculant tout sur son passage, l’amitié, l’amour, le couple…

Mais nous sommes en 1984, à Paris, et une nouvelle maladie vient de faire son apparition: le sida. Manu tombe malade et c’est tout un monde qui s’écroule pour ceux qui gravitent autour de lui.

André Téchiné se concentre sur ce drame à quatre voix pour montrer les contradictions, les peurs, la colère qui ravagent ces amis. Mais malgré la pertinence du sujet et la maîtrise de son travail cinématographique, on pourra reprocher au réalisateur la longueur de ce film (presque deux heures!) qui semble parfois s’embourber, égarant par la même occasion le spectateur.

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On notera tout de même l’excellente prestation des quatre acteurs et le talent d’un réalisateur qui nous replonge dans les prémices de l’épidémie du sida, une époque pas si lointaine que les progrès de la médecine auraient presque fait oublier…

Au cinéma Isabel Bader, vendredi 23 mai à 21h45.

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