L’école francophone victime de son succès?

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Publié 29/08/2006 par Yann Buxeda

En 2005, la fréquentation des écoles du Conseil scolaire de district du Centre-Sud-Ouest a pour la première fois dépassé le chiffre de 7000 élèves. Une progression également constatée dans les écoles du conseil catholique, qui comptera quant à lui 300 élèves de plus à la rentrée prochaine. Au-delà de la satisfaction de séduire de plus en plus de familles, de nouveaux problèmes se posent pour l’enseignement en langue française.

Entre la pénurie d’enseignants qui touche le Canada français et la croissance constante des effectifs, les conseils francophones tentent tant bien que mal de faire entendre leurs voix.

Trois cent élèves de plus dans les écoles francophones dans la région du Grand Toronto. Un chiffre optimiste révélé en début de semaine dernière par le Conseil scolaire de district catholique Centre-Sud (CSDCCS), et qui concerne toutes les filières de la maternelle à la 12e année.

Pour Bernard Lavallée, directeur de l’éducation du Conseil catholique, cette tendance à l’augmentation observée depuis trois ans est le résultat direct d’une conjonction de deux facteurs: «La conjoncture générale nous est très profitable. Tout d’abord, la bonne santé économique de la région permet aux Torontois d’investir plus dans l’éducation de leurs enfants et donc d’avoir le choix de l’enseignement en français. Ensuite, les dernières vagues d’immigration, à forte teneur francophone, ont elles aussi eu un impact mesurable.»

Mais le directeur de l’éducation du CSDCCS n’oublie pas de mentionner l’importance du travail effectué ces dernières années au sein du Conseil pour améliorer les services proposés aux parents francophiles et francophones: «Je crois vraiment qu’aujourd’hui, cette augmentation est intimement liée au niveau d’enseignement que nous proposons. Nous offrons une qualité de services qui est saluée par les parents.»

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Quelles qu’en soient les raisons avérées, l’annonce est certes encourageante pour le CSDCCS, mais pose également de nouvelles problématiques. Car cet afflux massif de nouveaux francophones et francophiles contraint le conseil à trouver des solutions pour absorber les nouveaux arrivants.

En premier lieu, il sera question d’embaucher une soixantaine de nouveaux enseignants afin de satisfaire aux exigences gouvernementales concernant les effectifs maximum par classe. Une solution qui, selon Bernard Lavallée, ne remet pas en cause la qualité des prétendants potentiels à l’éducation des jeunes francophones: «Malgré ce besoin soudain de main d’oeuvre, nous n’avons pas eu de difficultés à recruter des enseignants de qualité les années précédentes et nous ne nous faisons pas de soucis pour cette cuvée 2006. Nous avons un important vivier d’enseignants francophones de qualité.»

Malgré tout, il a bien conscience que cette solution devra être accompagnée d’une évolution des infrastructures si la tendance s’accentue.

Et là encore, l’avenir semble avoir été envisagé: «Nous prévoyons l’ouverture de trois écoles dans les régions de Milton, Orangeville et Newmarket. Des projets qui devraient suffire à satisfaire un éventuel afflux de demandes dans les années à venir.»

Un problème d’édifices

Du côté du Conseil scolaire de district du Centre-Sud-Ouest (CSDCSO), la situation est semblable. Depuis mars, les équipes du Conseil se chargent d’évaluer les augmentations probables de la rentrée 2006. Une évolution qui oscillerait entre 5 et 8 % et qui devrait se faire sentir essentiellement au niveau de l’élémentaire.

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Évidemment, la prise en charge de ces effectifs surgonflés a un coût, et le CSDCSO compte sur la participation active des autorités, comme le soutient Jean-Luc Bernard, directeur de l’éducation du Conseil public francophone: «Le gouvernement nous alloue pour le moment des fonds qui nous permettent d’engager de nouveaux professeurs afin de prévenir cette tendance à l’augmentation. Mais ce n’est qu’une solution à court terme, puisque nous allons manquer d’édifices d’ici peu de temps. C’est sur ce point que nous devons trouver un accord avec le ministère de l’Éducation de l’Ontario, parce que nous nous dirigeons peu à peu vers une impasse.»

En terme de recrutement, les analyses du CSDCSO et du CSDCCS divergent, puisque le secteur public constate quant à lui qu’il est de plus en plus difficile de trouver un personnel qualifié: «Nous assistons actuellement à une pénurie d’enseignants dans le Canada français et il nous est par conséquent difficile de pallier efficacement les départs en retraite et de gérer les fluctuations d’effectifs. Nous sommes obligés de faire venir des professeurs du Québec et de l’Ouest canadien pour assurer certains cours», déplore Jean-Luc Bernard.

Une situation qui n’est apparemment pas du ressort du ministère de l’Éducation, qui considère que «malgré l’importante croissance des deux conseils scolaires francophones au cours des dernières années, il n’y a pour le moment pas lieu de modifier les subventions allouées à chacun des quatre conseils torontois».

Autre pratique pointée du doigt par le ministère: les demandes de subventions pour les infrastructures. Alors que les dossiers de demandes de fonds auraient dû être envoyés avant le 31 janvier 2006, il semblerait que le dernier des dossiers francophones – sans pour autant préciser s’il s’agissait du dossier du conseil catholique ou public – soit arrivé au ministère le 16 août dernier. Une situation qui, selon les autorités, ne «facilite pas le traitement des données».

Sans pour autant pouvoir faire déjà état d’un bras de fer entre les autorités provinciales, il est fort probable que des négociations soient entreprises dans les mois à venir, afin de travailler sur la rénovation, voire l’acquisition de nouveaux édifices.

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