«Garderies à 10 $» : ces garderies qui refusent les subventions

Troisième de trois reportages

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Le gouvernement fédéral et celui de l'Ontario ont signé une entente qui offrira aux parents des garderies à 10 $ par jour en 2025. Photo: iStock.com/PeopleImages
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Publié 19/12/2024 par Andréanne Joly

À Toronto, cinq garderies de langue française refusent de faire partie du programme fédéral menant à la création du réseau public de «garderies à 10 $ par jour».

Cependant, le 1er janvier, elles pourraient être touchées par les changements dans les formules de financement qui vise l’ensemble du secteur.

Les fonds seront alors dirigés vers les garderies subventionnées où, pour les parents d’enfants de moins de 6 ans, la facture passera 22 $ par jour – une baisse devant mener à une facture de 10 $ par jour en mars 2026.

Avec la perte de subventions de fonctionnement et de la bonification salariale aux éducatrices et éducateurs de la petite enfance en place depuis 2016 et chiffrée 2$/heure, les établissements non participants risquent-ils de mettre la clé sous la porte?

L’Association of Day Care Operators of Ontario (ADCO) estime qu’environ 500 établissements de la province, soit de 8 à 10 % des garderies, sont à risque, avec la perte de cette subvention.

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Les 31 garderies agréées de langue française à Toronto. Infographie: Andréanne Joly, l-express.ca

Inquiétudes

Dans les articles précédents, les parents se disent heureux de la facture allégée du réseau de garderies subventionnées, mais inquiets de l’instabilité à laquelle les administrations sont confrontées, avec les changements successifs accompagnant la mise en place progressive du réseau «à 10 $».

Pour leur part, les garderies participantes craignent ne pas pouvoir équilibrer leur budget, puisqu’il se fonde sur les frais d’exploitation 2023. Parmi les enjeux: la rétention des éducatrices, attirées par de meilleures conditions de travail dans d’autres types d’établissements. [NDLR: Le salaire minimum des éducatrices est fixé à 23,86 $/heure.]

Des parents préfèrent payer le plein prix

Dans ces établissements de langue française de Toronto, on ne se formalise pas du fait que les subventions soient redirigées vers le réseau public – elles n’en recevaient pas, simplement, et ne se sont jamais montrées intéressées à joindre ce programme.

L’une des directrices à qui l-express.ca a parlé avoue avoir envoyé un courriel aux parents, à l’annonce du programme, en 2021. Un seul parent a réagi tièdement. «L’intention du programme est bonne. Les services de garde pour enfants, ça coûte cher.»

Mais elle est soulagée de ne pas s’être engagée dans cette voie.

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Elle perdra la subvention de 2 $/heure bonifiant le salaire du personnel d’éducation. Mais pour elle, cette perte «n’est pas la fin du monde».

Au grand angle, elle se dit déçue du système: certaines catégories de personnel d’éducation à la petite enfance, comme les assistantes formées, n’y sont pas reconnues. De plus, le ratio enfant/personnel ne répond pas aux normes qu’elle a établies dans son établissement, explique-t-elle.

C’est le seul établissement qui a indiqué recevoir un soutien financier.

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Certaines garderies choisissent de ne pas se prévaloir des subventions publiques. Photo: iStock.com/Rawpixel

Privé rime avec liberté

À Ma Première École, dans le quartier des Beaches, Carole Mindjimba dit tenir à rester privée et à s’autofinancer. Pour elle, privé rime avec liberté. «Je veux avoir le choix du tarif, du salaire des employé-e-s, du programme. Je n’ai aucun compte à rendre [aux gouvernements]», dit-elle.

Les directrices ont indiqué à l-express.ca que leur clientèle s’attend à payer les pleins frais et à contribuer financièrement à l’amélioration des installations et des programmes, retient-on des conversations tenues avec les administrations de ces services de garde.

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Dans un cas, la note s’élève à 2500 $ par mois – cinq fois plus que dans un établissement subventionné où le tarif se chiffrera à 22 $/jour, dès janvier.

Des listes d’attente ici aussi

Des listes d’attente se formeront, observent les directrices des établissements non participants de langue française, et ce, même si le réseau de garderies à tarif réduit «crée l’impression que les services de garde ne coûtent pas cher».

Il y a quelques années, ces garderies ont connu un exode de la clientèle de 4 à 6 ans, avec la mise en place du programme d’apprentissage par le jeu en maternelle-jardin. Cette clientèle s’est dirigée vers les écoles.

Il semble cependant s’opérer un retour du pendule, du moins avec les groupes plus jeunes, avec l’établissement du réseau pancanadien de services de garde abordables.

Dans les dernières années, les garderies ont accueilli des familles qui ont quitté ce réseau de garderies subventionnées et des familles qui refusaient que leurs enfants fréquentent ces établissements. «Ils ont tous leurs raisons», estime Carole Mindjimba.

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De plus en plus, un système double se profile, ajoute l’une des directrices. «Ce sera au privé d’offrir quelque chose de plus, un programme structuré, spécial, comme un programme en français», fait-elle valoir.

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