Fruits exotiques

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Publié 09/03/2010 par Martin Francoeur

Chaque année, quand arrive le mois de mars, je ressens l’irrépressible besoin d’aller profiter d’un peu de chaleur et de soleil sous des cieux plus cléments. Depuis une dizaine d’années, je pars en croisière. Généralement dans les Antilles. J’adore ces escapades à bord de navires aussi élégants que gigantesques. J’adore aussi tous les petits plaisirs qu’elles sous-tendent.

Je reviens tout juste de croisière, donc. Une des choses qui me frappent toujours, à bord de ces navires, c’est l’abondance de fruits frais, notamment dans les petits déjeuners ou comme desserts lors des dîners et des soupers. Et c’est toujours un régal.

Il faut dire que l’approvisionnement en fruits frais est facilité par les escales que les navires font dans les différents ports des Antilles. Il n’est pas rare de voir une livraison de fruits ou d’autres aliments lorsque le bateau est ancré dans un port insulaire.

J’adore les ananas, le cantaloup, la papaye, la mangue, la carambole, la goyave et les litchis. Pour ne nommer que ceux-là. Mais en croisière, je me suis demandé d’où venaient les noms que l’on donne à ces fruits. Des noms souvent aussi exotiques, sur le plan étymologique, que le fruit lui-même…

Commençons par le cantaloup. D’abord parce que ce fruit entraîne souvent des erreurs de genre et de prononciation. On dit «le cantaloup». C’est un nom masculin. Et on ne prononce pas le «p» final. On doit donc dire «cantalou» et non «cantaloupe». Cette prononciation erronée vient peut-être du fait que l’équivalent anglais est, justement, «cantaloupe».

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D’après le Grand dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue française, le nom de ce fruit vient sans doute de Cantalupo, nom d’une ancienne villa des papes située près de Rome, où ce melon était cultivé. Le mot est apparu en français au dix-huitième siècle, d’abord sous la forme de cantaloupe, puis de cantaloup.

Un cantaloup est un melon à la chair orangée, sucrée et parfumée, dont l’écorce jaune verdâtre est côtelée. Au Québec, on emploie généralement ce terme pour désigner un autre type de melon, le melon brodé, qui est beaucoup plus cultivé en Amérique du Nord.

«Ananas» aussi est intéressant sur le plan de la prononciation. Chez nous, on dit généralement «anana», mais la prononciation «ananas» est aussi acceptée dans les dictionnaires et assez répandue en Europe francophone. Le mot lui-même viendrait du tupi-guarani «anana», qui signifie «parfumé». Il serait apparu en français vers la fin du XVIIIe siècle. Auparavant, on avait vu certaines formes différentes, comme «amanas», «ainanas» et même «nana».

On sait peu de choses de la papaye. Sur le plan linguistique, s’entend. Parce que sur le plan nutritif, c’est sans doute autre chose. Mais le mot viendrait de la langue caraïbe des Antilles «papaya». On l’a vu pour la première fois en français vers 1579, selon le Petit Robert.

Le mot «mangue», lui, nous vient du portugais «manga», qui aurait des origines tamoules. En français, le mot a fait son apparition au tout début du XVIIe, ce qui laisse croire que les conquêtes coloniales, particulièrement celles des Antilles, ont eu un impact sur le vocabulaire français, notamment en ce qui a trait aux fruits encore inconnus jusque-là.

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Vous connaissez la carambole ? Elle est pourtant facile à reconnaître en raison de sa forme en étoile. Lorsque tranchée, la carambole peut devenir très décorative. Ce petit fruit jaune orangé nous vient du sud de l’Asie, mais on le retrouve dans plusieurs zones tropicales. Quant au mot «carambole», il vient de l’espagnol «carambola», lui-même tiré du portuguais et emprunté à une langue du sud de l’Inde. En marathi, on dit «karambal».

La goyave est un autre fruit délicieux. Et ses nombreuses transformations linguistiques avant d’atterrir en français sous la forme que l’on connaît sont impressionnantes.

Le fruit s’appelait autrefois «gouiave» (1601) ou «guayaba» (1555). Le mot viendrait de l’espagnol «guyaba», qui vient lui-même du caraïbe «guava». En anglais, cette dernière forme est encore utilisée de nos jours.

Enfin, un mot sur les litchis. Le mot «litchi» désigne non seulement un arbre d’Asie méridionale à fruit comestible, mais aussi et surtout ce fruit lui-même. Le mot vient directement du chinois «li-chi».

Il s’est transformé en «lechia», puis en «lichi» vers 1720, avant de prendre le «t» pour des raisons vraisemblablement phonétiques. La forme «letchi» est aussi attestée en français.

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La liste des fruits aux noms étranges pourrait être encore longue et les découvertes seraient sans doute nombreuses et étonnantes.

On pourrait se demander, par exemple, ce que sont l’alkékenge, la bergamote, le cynorrhodon, la grenade, le kaki, la plaquebière et le pomélo.

Mais je vous laisse le soin des les découvrir… À moins que vous les connaissiez – et savouriez – déjà !

Auteur

  • Martin Francoeur

    Chroniqueur à l-express.ca sur la langue française. Éditorialiste au quotidien Le Nouvelliste de Trois-Rivières. Amateur de théâtre.

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