Fonction publique : «Il faut changer cette culture d’être unilingue»

unilingue, langues officielles
La présidente du Conseil du Trésor, Anita Anand, a affirmé en comité que les règlements d’application de plusieurs parties de la Loi sur les langues officielles seront pris «avant mars 2025». Photo: Chantallya Louis, Francopresse
Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 11/12/2024 par Inès Lombardo

Alors que les règlements qui serviront à appliquer plusieurs parties de la Loi sur les langues officielles (LLO) devraient être prêts d’ici mars 2025, la présidente du Conseil du Trésor, responsable de la fonction publique, Anita Anand, a assuré en comité qu’elle travaillait au «changement de culture» unilingue anglais.

«[La question], ce n’est pas juste de travailler en français, c’est d’apprendre le français», a lancé la présidente du Conseil du Trésor, Anita Anand, devant les sénateurs du Comité permanent des langues officielles, lundi.

«Il faut changer cette culture d’être unilingue. Je sais la réalité, c’est difficile d’apprendre le français dans les ruralités. C’est possible, je l’ai appris dans un domaine rural en Nouvelle-Écosse», a-t-elle ajouté, en réaction au commentaire du sénateur néo-écossais Réjean Aucoin sur les limites des services en français à la population.

Des règlements «avant mars 2025»

Le témoignage de la ministre portait sur le rapport annuel 2022-2023, qui dresse un portrait de la fonction publique canadienne avant la modernisation de la Loi sur les langues officielles.

Plusieurs sénateurs, à l’instar de l’Acadien du Nouveau-Brunswick René Cormier, ont partagé leurs inquiétudes à propos de l’attente des règlements de la nouvelle loi. Deux semaines plus tôt, le Commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge, avait lui aussi laissé entendre que le temps pressait.

Publicité

Si la ministre Anand n’a pas voulu fournir d’échéancier précis devant le comité, elle a assuré que les règlements sortiraient «avant mars 2025».

Les trois règlements attendus seront publiés en même temps que ceux dont Patrimoine canadien est responsable. Celui-ci a la charge de désigner les régions bilingues et des sanctions pécuniaires à l’encontre des entreprises fédérales.

Les trois règlements attendus pour l’application de la nouvelle LLO

  • les sanctions pécuniaires en cas d’infraction à la loi par des entreprises privées sous juridiction fédérale;
  • la désignation des régions désignées comme fortement francophones;
  • le plus attendu des trois, sur la partie VII, qui devra règlementer l’égalité de statut des deux langues officielles et des communautés de langue officielle.

«On a eu beaucoup de consultations déjà, pas seulement avec les provinces et territoires, mais avec les autres parties prenantes», assure Anita Anand, rappelant au passage avoir passé du temps à Halifax l’été dernier pour entendre les avis sur les règlements.

En attendant l’application de la loi

Devant la préoccupation persistante des sénateurs, Anita Anand s’est évertuée à souligner les progrès réalisés par le gouvernement fédéral.

«Quatre-vingt-quinze pourcent des employés des postes désignés bilingues satisfont aux exigences linguistiques. Et 25% [d’entre eux] ont le français comme première langue officielle. On a fait beaucoup de travail, mais on [en] a beaucoup à faire dans l’avenir», a-t-elle concédé.

Publicité

Anita Anand a tenté d’apaiser les sénateurs, indiquant que son ministère avait lancé le «tout premier cadre» sur la formation dans la deuxième langue officielle et augmenté le niveau de compréhension orale.

Superviseurs bilingues

«Le [Secrétariat du Conseil du Trésor] a commencé à préparer le terrain», a renchéri Carsten Quell, directeur général du Centre d’excellence en langues officielles aux ressources humaines du Conseil du Trésor.

Des employés sont sous supervision dans la langue de leur choix dans les régions bilingues et le niveau de l’offre de formation a augmenté d’une case.

Toutefois, en juin 2025 – quand tout employé pourra être supervisé dans la langue de son choix dans une région désignée bilingue, que son poste soit désigné bilingue ou non – le niveau de bilinguisme requis pour les postes des employés qui sont en formation pour apprendre une langue seconde ne sera pas augmenté jusqu’à ce que le poste se libère.

Autrement dit, l’exigence du bilinguisme ne sera pas revue à la hausse avant qu’une autre personne n’occupe ce poste.

Publicité

Sanctions si discriminations?

En cas de non-respect de la loi, que ce soit dans les entreprises privées sous juridiction fédérale – comme Air Canada, dont le patron avait déclenché une polémique sur le français – ou au sein de la fonction publique fédérale, la ministre s’est montrée évasive quant aux sanctions possibles.

«Nous savons que la nouvelle exigence va présenter des possibilités et aussi des défis», a affirmé la ministre Anand, en référence à la mesure qui laissera le choix à l’employé de parler ou d’être supervisé dans la langue officielle de son choix, dans la fonction publique.

Elle a été tout aussi évasive pour les entreprises sous juridiction fédérale. Les dirigeants devront être bilingues, assure la ministre, qui précise toutefois qu’il ne s’agit «pas d’une question de loi», mais d’une «question de culture dans l’organisation».

«C’est un two-way street. Si je n’essaie pas de parler les deux langues officielles, personne ne va parler français. Si on vous parle anglais, continuez, parlez le français, et peut-être qu’ils voudront [le] parler.»

«Je ne suis pas certaine que les entreprises privées sous compétence fédérale pensent comme vous», lui a répondu la sénatrice québécoise Marie-Françoise Mégie.

Publicité

Qui s’occupe d’appliquer la Loi sur les langues officielles?

Le Secrétariat du Conseil du Trésor est le ministère responsable de la mise en œuvre et de la coordination au sein des institutions de la Loi sur les langues officielles, modernisée en juin 2023.

Le ministère veille à la communication avec le public, au respect de la loi dans le cadre professionnel, ainsi qu’à la promotion de l’égalité d’usage et de statut du français et de l’anglais.

Le Conseil du Trésor est aussi responsable de la langue de travail.

Le Conseil du trésor doit aussi mettre en place des mesures positives, comme des clauses linguistiques ou des décrets pour faire respecter la loi au sein des entreprises sous juridiction fédérale.

Enfin, le Conseil du Trésor est chargé de l’entrée en vigueur des sanctions administratives pécuniaires que pourra utiliser le Commissariat aux langues officielles si besoin.

Publicité

Le ministère de Patrimoine canadien est quant à lui responsable de la partie IV de la Loi.

Langues autochtones

La ministre Anand a soutenu qu’en parallèle des consultations liées aux règlements sur les langues officielles, d’autres étaient en cours pour les langues autochtones.

«On évalue comment relever les défis des employés autochtones confrontés aux exigences des langues officielles. Mais [ces consultations] ne sont pas la raison pour laquelle nous allons arrêter notre travail.»

Elle a promis aux sénateurs de revenir une fois les règlements adoptés.

Auteurs

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur