Difficile essor international du cinéma québécois

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Publié 18/09/2007 par Aline Noguès

Le Festival international du film de Toronto qui vient de s’achever a permis à plusieurs réalisateurs québécois de faire connaître leurs dernières oeuvres. Mais une fois éteints les projecteurs des festivals, le cinéma québécois est-il capable d’aller à la rencontre d’un public étranger?

En Europe, un peu, en Amérique anglophone, pas vraiment, si l’on en croit Joëlle Levie, directrice générale cinéma et production télévisuelle de la SODEC (Société de développement des entreprises culturelles du Québec).

Cette branche de la SODEC finance environ trente films par an en octroyant des aides financières aux scénaristes, producteurs, distributeurs et exploitants de salles et en contribuant à la diffusion de films québécois à l’étranger.

Pour Joëlle Levie, de nombreux facteurs expliquent la difficulté du cinéma québécois à percer au Canada anglais et aux États-Unis. «Le marché canadien anglophone est dominé par les films américains et le public n’a pas vraiment le goût de voir des films dans d’autres langues, à l’exception d’une minorité de citadins. Et puis, certains films ne sont tout simplement pas exportables, comme Les 3 p’tits cochons de Patrick Huard: l’humour ne passerait pas tel quel, il faudrait faire un remake du film.»

Par ailleurs, ajoute Joëlle Levie, peu de réalisateurs québécois ont acquis une reconnaissance internationale: «Denys Arcand est très connu mais qui connaît Jean-Marc Lavallée? Son film C.R.A.Z.Y. a pourtant été un franc succès mais si lui veut s’établir dans le milieu, il devra encore faire d’autres bons films!»

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Pour Anick Poirier, responsable des ventes chez Séville, une maison de distribution montréalaise, d’autres handicaps s’ajoutent.

«Le cinéma québécois n’a pas d’acteurs-vedettes internationalement connus et on ne peut pas vendre nos films avec la simple étiquette “cinéma québécois”, ce n’est pas en soi une marque de commerce, contrairement aux films français ou américains.»

La seule qualité du film ne suffit donc pas à en faire un succès…même si cela y contribue beaucoup!

Malgré la production de bons films ces dernières années, le cinéma québécois reste fragile. «Nos films dépendent beaucoup des festivals pour se lancer, déplore Anick Poirier, et une fois lancés, il n’est pas toujours aisé de les rentabiliser à cause du piratage – qui fait baisser les ventes de DVD – et de la réduction des créneaux horaires dédiés aux films par la télévision.»

Si les longs métrages de fiction ont souvent des difficultés à émerger, que dire alors de productions qui sortent des sentiers battus? Sylvain Corbeil est un producteur montréalais. C’est la quatrième année qu’il présente ses productions au Festival international du film de Toronto mais il diffuse surtout ses films au Québec. Son profil? Le court-métrage, et un cinéma d’auteur influencé notamment par la nouvelle vague asiatique.

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«La situation n’est pas rose pour le court-métrage, même chose pour le cinéma d’auteur. Nos films voyagent pas mal dans les festivals, nous avons déjà remporté deux Jutra, mais il est très difficile de faire parvenir nos films jusqu’aux simples citoyens, notre public est un public averti!» Pour le jeune producteur, l’obstacle majeur à une diffusion des courts-métrages est l’absence d’une bonne mise en marché. «Il faudrait faire beaucoup plus de publicité, encourager les exploitants de salles à prendre des risques afin d’ancrer le court-métrage dans les “habitudes de consommation” du public.» Facile à dire…plus difficile à faire…

Et si, pour percer sur la scène internationale, le cinéma québécois devait perdre son côté… québécois? Pour Pascal Maeder, producteur et distributeur montréalais de films de fiction et de documentaires, cela a été la clé du succès.

«Notre vision du cinéma ne s’arrête pas au territoire: des films purement québécois auraient beaucoup de mal à fonctionner ailleurs. Ce que nous cherchons à faire, ce sont des films socialement et idéologiquement pertinents.» Peu importe la nationalité des réalisateurs ou des personnages de documentaires. Et cela marche, comme en témoigne le succès nord-américain de The Short Life of José Antonio Gutierrez, documentaire relatant la vie du premier soldat américain mort en Irak.

Ainsi, entre tradition et audace, le cinéma québécois a encore du chemin à faire pour acquérir une reconnaissance internationale.

Mais pour Anick Poirier, il est en bonne voie: «Pour un si petit pays, nous arrivons à produire un cinéma de très grande qualité. Le cinéma québécois a désormais atteint une certaine maturité et affirme sa propre identité!»

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