Des enjeux plus importants que les maquillages de Trudeau, selon notre sondage

Jagmeet Singh (NPD), Elizabeth May (Vert), Justin Trudeau ? (Libéral), Andrew Scheer (Conservateur), Maxime Bernier (Populaire).
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Publié 22/09/2019 par François Bergeron

L’affaire des «brownfaces» ou des «blackfaces» du Premier ministre Justin Trudeau, en 2001 et dans un passé plus lointain, a fait le tour du monde et a interrompu pendant quelques jours sa campagne en vue des élections du 21 octobre.

L’Express a sollicité quelques réactions dans le monde associatif franco-torontois: un «sondage» absolument pas scientifique.

Certains s’amusent de l’affaire, d’autres ont hâte qu’on revienne à des débats politiques plus traditionnels. Certaines personnes ont répondu qu’elles ne voulaient pas se mouiller; d’autres ont exprimé une opinion, mais ont demandé de rester anonymes…

Constatation intéressante ici: les blancs se montrent généralement plus sévères que les noirs envers d’anciennes manifestations discriminatoires ou offensantes. Voici quelques-unes des réponses reçues:

Déguisement

«Moi je me déguise en homme blanc tous les jours au travail. Ça n’a pas l’air de déranger qui que ce soit.»

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Hosni Zaouali (Voilà Learning)

Passons aux choses sérieuses

«Je crois que c’est du bruit pour rien. Il faut mettre l’action dans son contexte: une soirée de mille et une nuits. Il ne l’a pas fait dans un contexte dérogatoire pour dénigrer les Arabes ou les noirs.

Pas de quoi en faire un plat. Passons aux choses sérieuses: l’économie, l’emploi et ce que les francophones ont à gagner et à perdre dans cette élection.»

Gabriel Osson (écrivain)

Parlons des vrais enjeux

«Je crois sincèrement que c’était innocent de sa part. Ne déplaçons pas les problèmes et parlons des vrais enjeux électoraux.

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Je veux plutôt savoir comment les Libéraux vont assurer les services aux francophones du Canada et comment ils vont avancer les dossiers des minorités.

Je veux savoir si l’Université de l’Ontario français va être maintenue, etc.

Cette histoire de blackface est une distraction inutile selon moi.»

Préfère rester anonyme

Racisme sans visage

«La controverse du «brownface» et du «blackface» de Justin Trudeau  a pris une tournure démesurée. Je n’excuse en aucun cas ce comportement d’il y a 18 ans, car ce sont ce genre de mises en scène qui nourrit ou qui est nourri par les racines du racisme.

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Toutefois je ne pense pas que Trudeau soit raciste. Il était  inconscient, pas innocent. Je déplore qu’on déterre ce comportement d’il y a 18 ans quand, sur la photo d’Aladin, il est la seule cible bien qu’en compagnie de citoyens qui n’affichent aucunement un air de blâme ni de honte,  que des visages souriants!

Le vrai visage du racisme n’est pas que le «brownface», mais bien  tout ce système sans visage, dont le refus de me louer un appartement comme femme noire sans une co-signature d’une personne blanche ou d’autres multiples facettes de la discrimination basée sur la race, l’ethnicité, le genre, etc.

J’ose espérer que l’enjeu du racisme dans son sens large va pouvoir faire les tables et les plateformes de ces élections, car il est grand temps que  la société canadienne arrête de prendre le mal par les symptômes, mais par les causes, les racines.

Il faut accepter les excuses sincères de Trudeau et ne pas nous laisser distraire, mais saisir le momentum. Ça ne change pas ma perception de Trudeau et j’espère que ce soit un teachable moment pour lui et pour nous tous et toutes.»

Dada Gasirabo (Oasis Centre des femmes)

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Populisme inquiétant

«Il faut à tout prix poursuivre la lutte contre le racisme, surtout dans une époque où le populisme a retrouvé une légitimité troublante. L’avenir de nos enfants en dépend, peu importe nos origines, peu importe nos convictions politiques.

Pour ce faire, il est primordial de tirer des leçons des erreurs du passé. Sans cet apprentissage, il sera impossible de défaire, ensemble, les mécanismes d’humiliation qui ont permis la colonisation et la domination d’autrui, ici comme ailleurs. Quand je fais une erreur, je l’avoue, je m’excuse et je travaille fort pour ne pas la répéter.

C’est ce que monsieur Trudeau a fait, et, personnellement, je pardonnerais toujours un politicien qui avoue son erreur, d’autant plus que ses actions comme Premier ministre depuis cinq ans prouvent sans l’ombre d’un doute qu’il n’est pas un raciste.

Il n’en demeure pas moins qu’en sachant que ces photos existaient, il aurait dû et pu en parler lui-même avant qu’elles soient diffusées par les médias. Il aurait été un allié plus efficace pour cette cause importante.»

Joël Beddows (Théâtre français de Toronto)

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Au Québec

Sans surprise, c’est au Québec – où on est plus circonspect face à la vision Canadian du multiculturalisme – qu’on a traité l’affaire du «brownface» et les excuses de Justin Trudeau avec le plus de légèreté ou de perplexité, notamment chez des personnalités noires comme Dany Laferrière et Boucar Diouf.

Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, qui est pourtant un adversaire politique, a résumé le sentiment populaire en commentant: «Justin Trudeau a bien des défauts, mais il n’est pas raciste.»

Le chroniqueur nationaliste Mathieu Bock-Côté a imagé que «l’évêque a été pris avec une danseuse».

Le hic, en effet, pour le premier ministre libéral, c’est qu’il est lui-même le plus grand champion du multiculturalisme et de la diversité tous azimuts. Et, de tous les Canadiens, il est peut-être le plus troublé par son propre comportement passé, qu’il a attribué à un «angle mort» résultant de son «privilège blanc».

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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