Deux lutins dans la Ville-Reine

Conte de Noël

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Publié 19/12/2006 par Paul-François Sylvestre

Il était une fois un lutin qui s’appelait Nolin. Il habitait au Pôle Nord avec les autres lutins, le Père Noël, sa femme la Mère Noël et leurs trois enfants qui se prénommaient Margot, Maryse et Marguerite. Nolin avait la réputation d’être très maladroit, pour ne pas dire nul. Les autres lutins se moquaient de lui en l’appelant Nulin.

Chaque avant-veille de Noël, le Père Noël lançait: «Tous mes cadeaux sont-ils prêts?». De sa petite voix, Nolin répondait: «Oui, oui. Tous vos cadeaux sont prêts.». Mais le Père Noël ne l’entendait pas et Nolin courait pour le rattraper en criant: «Oui, oui, vos cadeaux sont prêts.». Et chaque fois, Nolin trébuchait et échappait des cadeaux qui se brisaient. Le Père Noël, mécontent, criait de sa grosse voix: «Ce n’est pas vrai, Nulin! Maintenant ces cadeaux sont à refaire!»

En 2013, Nolin avait été plus malchanceux que jamais et avait brisé des douzaines de cadeaux. Cette année-là, le lutin se dit qu’il valait mieux quitter la fabrique de jouets et le Pôle Nord. Mais où pourrait-il déménager? Où trouverait-il un autre emploi? La réponse à ces questions était peut-être sous ses yeux, dans le journal qu’il apportait chaque semaine au Père Noël… Au lieu de remettre L’Express à son patron, Nolin prit le temps de lire les petites annonces en page 10. Deux publicités attirèrent son attention.

La première annonce portait sur la vente d’une coquette petite maison dans la Ville-Reine. On indiquait que de grands sapins se dressaient devant ce logement du quartier Choux-ville, à 500 mètres d’un parc, d’une rivière et d’une ferme. La seconde annonce se lisait comme suit: «La lutine Martine, patronne du resto-bar de la Maison de la Francophonie, cherche un serveur lutin.» Nolin sauta de joie car les deux annonces l’intéressaient.

Notre maladroit lutin fit ses bagages, emprunta le traîneau du Père Noël pour faciliter son déménagement et quitta le Pôle Nord pour Toronto. Au bout de 24 heures, il arriva à la maison, la visita, s’en émerveilla et décida de s’y installer.

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Le lendemain matin, il alla rencontrer la lutine Martine qui parlait avec un accent antillais. Elle lui dit: «Mon cher Nolin, faudra que tu prennes les commandes et que tu serves les clients.». Comme Nolin avait les mains pleines de pouces, il fit tomber les verres d’eau sur la table, les repas par terre et les carnets de commande dans les assiettes des clients. Mais au fil des jours, le lutin maladroit fit de grands progrès et s’enticha de la Ville-Reine.

Nolin s’enticha surtout de Martine. Il lui offrit un billet pour une pièce qui jouait dans un théâtre de la rue Berkeley, il l’amena voir une exposition présentée par une galerie située dans un manoir et il l’invita au restaurant Le Papillon à bicyclette. Nolin le lutin voulut exprimer son amour pour Martine la lutine, mais il n’était pas très adroit avec les mots. Comme il aimait les articles écrits par un grand monsieur barbu de L’Express, une sorte de Personnalité Francophone, il l’approcha et lui demanda conseils. Cette P. F. cisela une lettre d’amour digne du premier prix de la Trille d’or.

Lorsque Nolin arriva au resto-bar, il apprit que Martine était malade. Il servit les clients sans trop de bavures et, juste avant de quitter, il déposa la précieuse lettre sur le comptoir. En rentrant chez-lui, Nolin ne remarqua pas qu’il était suivi. Avant même d’avoir accroché sa pèlerine, notre lutin fut sauvagement assommé et sa coquette maison fut cambriolée en un tour de bras.

Comme Martine commençait à se sentir mieux, elle décida de passer au resto-bar pour voir si Nolin y était encore. Elle vit la lettre sur le comptoir et la lut avec émotion. Aussitôt elle se rendit chez le lutin et le trouva gisant inconscient devant les photos de Claudette Graveline, que les cambrioleurs avaient échappées en déguerpissant. Martine pratiqua aussitôt le bouche-à-bouche et sauva l’élu de son cœur. L’Express consacra sa une à cet incident en titrant «Martine la lutine redonne vie à Nolin le lutin».

Après deux semaines de repos et de caresses, Nolin fit la grande demande et le couple décida de se marier durant la Franco-Festivité. Comme il y avait alors relâche au Pôle Nord, le Père Noël, la Mère Noël, leurs trois filles et les anciens copains-lutins purent assister à la noce. Ce fut Noël en juin!

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Nolin et Martine eurent ensuite beaucoup d’enfants et ils les envoyèrent à l’École Gabrielle-Roy… Ah non! Ça, c’est une autre histoire qui sera racontée une autre fois!

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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