Commerce interprovincial: Québec ne signera pas de protocole d’entente

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Doug Ford et François Legault. Photo: Patrick Woodbury, archives Le Droit
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Publié 23/07/2025 par Émilie Gougeon-Pelletier

Contrairement à son homologue ontarien Doug Ford, qui multiplie les protocoles d’entente visant à réduire des barrières interprovinciales, depuis le printemps, le premier ministre du Québec, François Legault, ne signera pas de telles ententes. «Ce n’est pas notre approche», explique son gouvernement.

Doug Ford a signé une dizaine de protocoles d’entente avec ses homologues provinciaux et territoriaux, depuis avril.

Deux de ces ententes ont été conclues ce 22 juillet avec les premiers ministres de la Saskatchewan, Scott Moe, et de l’Alberta, Danielle Smith, durant le sommet estival du Conseil de la fédération, dans les Muskoka.

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Les premiers ministres Scott Moe, Doug Ford et Danielle Smith. Photo: Doug Ford sur Facebook

Pipelines

Ces premiers ministres se sont engagés à faire pression en faveur de nouveaux projets massifs de pipelines et de chemins de fer.

Le plan vise à étudier ensemble un éventuel pipeline Est-Ouest, construit avec de l’acier produit localement, pour le relier au port en eau profonde de la baie James, en Ontario, qui n’est pas encore construit.

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Le Québec et Terre-Neuve-et-Labrador sont les seules provinces qui n’ont pas encore conclu de tels accords avec l’Ontario.

«Je pense que nous allons y arriver», a répondu Doug Ford, lorsque questionné sur l’absence d’un protocole d’entente entre l’Ontario et le Québec. «Le premier ministre Legault est une personne très brillante en affaires. Il est… très unique. Mais nous allons y arriver. Je l’aime, vraiment, mais bon, c’est important, nous allons discuter avec lui», a ajouté M. Ford.

Le premier ministre ontarien a aussi noté que de telles ententes profiteraient aux Québécois, et que ça augmenterait le nombre d’emplois dans la Belle Province.

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Les premiers ministres Doug Ford et David Eby. Photo: Doug Ford sur Facebook

«Une approche différente»

Mais ça n’arrivera pas, a fait savoir au Droit l’attaché de presse de François Legault, Ewan Sauves.

«Le Québec a choisi une approche différente», a-t-il indiqué. «Plutôt que de multiplier les ententes bilatérales, ce qui viendrait alourdir le fardeau des entreprises à notre avis, nous misons sur une action concertée pour réduire les obstacles au commerce interprovincial – sans compromettre nos compétences, notre identité ou notre langue.»

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Le gouvernement Legault a déposé un projet de loi en juin «qui prévoit des avancées majeures» en matière de réduction des barrières commerciales à l’intérieur du Canada, souligne M. Sauves.

Ce projet de loi vise notamment la reconnaissance unilatérale des produits des autres provinces et territoires, ainsi qu’un cadre pour la reconnaissance professionnelle des travailleurs.

Cette approche «devrait être partagée par toutes les autres provinces», a souligné l’attaché de M. Legault.

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Réunion du Conseil de la Fédération, présidé par Doug Ford, avec la participation de Mark Carney. Photo: Doug Ford sur Facebook

Libre circulation des produits

Les premiers ministres Ford et Legault ont été questionnés, le 22 juillet, à savoir pourquoi le Québec et l’Ontario n’ont pas encore signé d’entente.

«J’ai confiance que nous allons nous asseoir et parvenir à un accord», a répondu le premier ministre ontarien, avant que son homologue du Québec ne réponde le contraire.

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«J’ai la même intention que Doug, soit que les produits puissent circuler à la grandeur du Canada. On perd en partie accès au marché américain, donc c’est une très bonne idée que chaque province ait accès à chaque province et territoire. C’est juste la façon de faire qui diffère», a-t-il indiqué.

Patchwork

«On n’a jamais eu un aussi bon momentum pour faciliter le commerce intérieur», affirme le vice-président des affaires nationales à la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), Jasmin Guénette.

Or, même si elle se réjouit des progrès réalisés jusqu’ici, la FCEI prévient que si tous les gouvernements provinciaux et territoriaux favorisent une approche différente pour adopter la reconnaissance mutuelle, ça pourrait créer de la confusion auprès des entreprises qui souhaitent participer au commerce intérieur.

«On parle ici de la question du fromage suisse. On se retrouve dans une situation où beaucoup de juridictions ont beaucoup d’ententes, en plus des projets de loi, et ça nous inquiète, parce que ça crée un patchwork», note Jasmin Guénette.

N’empêche, «le Québec doit s’assurer de ne pas passer à côté d’opportunités qui pourraient aider l’économie du Québec et l’économie du Canada», ajoute-t-il.

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Mark Carney et Doug Ford. Photo: Doug Ford sur Facebook

Outil de communication

Les protocoles d’entente ne sont pas légalement contraignants, remarque la professeure titulaire à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa, Geneviève Tellier.

«C’est un outil de communication. Si les provinces t’approchent pour signer un protocole d’entente, je ne vois pas pourquoi tu serais réticent, puisque légalement, ça ne contraint à rien. Tout ce que ça fait, c’est de montrer que tu veux travailler avec les autres provinces», affirme la politologue.

L’Ontario a signé des accords avec dix provinces et territoires, y compris le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, le Manitoba, l’Alberta, le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut.

Ces ententes s’inscrivent dans le cadre d’une initiative menée par le premier ministre de la Nouvelle-Écosse, Tim Houston, et Doug Ford, visant à réduire les différentes règles et normes d’échanges de biens et de services entre les juridictions.

Ces règles varient d’une région à l’autre, et comprennent des normes liées aux biens comme l’alcool, mais aussi aux travailleurs comme les électriciens.

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Au printemps, l’Ontario a déposé un projet de loi sur le commerce interprovincial, visant à éliminer les obstacles qu’il impose aux provinces voisines.

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Doug Ford avec la cheffe de l’Assemblée des Premières Nations, Cindy Woodhouse Nepinak. Photo: Doug Ford sur Facebook

Menaces économiques

Depuis que le président américain Donald Trump a imposé des droits de douane de 25% sur les véhicules, l’acier et l’aluminium, et menacé d’en imposer davantage sur le Canada, une attention particulière a été portée à l’échelle nationale pour faciliter le commerce intérieur pancanadien.

Le président a accentué cette pression en menaçant des droits de douane de 35% sur les produits canadiens à compter du 1er août.

Les premiers ministres étaient dans les Muskoka, en Ontario, de lundi à mercredi, pour participer à une série de réunions dans le cadre du Conseil de la fédération.

Le premier ministre du Canada, Mark Carney, y participe, de même que des membres des Premières Nations.

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