Clos La Coutale Cahors 2007, vedette de la livraison Vintages du 12 juin

Pourquoi est-il rouge?

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Publié 15/06/2010 par Alain Laliberté

Les vins sont plus ou moins rouges selon les cépages qui les ont vus naître. Bien que la vinification soit un processus naturel, la chimie y est aussi pour quelque chose.

Il y a un certain nombre de constituants d’origine phénolique qui se ressemblent : les anthocyanes et les tanins. Lors de dégustations ou de visites de chais, on parle de tanins du vin, de tanins ronds, de tanins astringents. C’est la traduction d’une sensation gustative.

Les anthocyanes représentent tous les pigments rouges des plantes dans la nature. Les anthocyanes du raisin sont les mêmes molécules que dans les pétunias, les roses. On retrouve ces deux types de constituants en pharmacie puisque les extraits d’anthocyanes servent à préserver l’hypertension. Quand ces composants se retrouvent dans les tanins, ils facilitent la circulation sanguine, ils évitent des problèmes de varices, etc. On peut définir ces substances comme responsable de l’astringence et de la couleur.

La grande différence entre les vins blancs et les vins rouges est la présence dans le raisin de ces molécules d’anthocyanes localisées principalement dans la pellicule.

Ces anthocyanes sont extraites lors de la vinification. On sait qu’au cours de cette opération, il y a des remontages plus ou moins intenses au début et à la fin des fermentations selon l’humeur du vinificateur ou du raisin. Le remontage consiste à faire écouler du moût en fermentation afin de le remonter en haut de la cuve. Il sera alors en contact avec le chapeau — les matières solides qui remontent à la surface pendant la fermentation — et il y aura extraction des composés phénoliques.

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Lorsqu’on regarde la couleur du vin jeune, sa teinte est rouge cerise, un rouge très soutenu. Lorsque le vin est conservé en barrique ou en cuve avec des aérations répétées, on constate que la couleur change pour devenir rouge foncé. Si, en plus, il y a fermentation malolactique en barrique, on constate une modification de cette couleur qui devient alors sombre, violette, très dense. Et si on le conserve plusieurs mois en barrique, il perd un peu cette teinte violette pour devenir plus sombre encore.

Au moment de l’embouteillage, la couleur devient plus rouge et l’ensemble revient sur la teinte rouge du départ. Après la mise en bouteilles, cette teinte évolue plus ou moins rapidement vers une teinte orangée.

Cette évolution est irréversible. Tout vin rouge va vers l’orange avec le temps.

De quoi dépend cette évolution? Quelles que soient les conditions, ce sont toujours les mêmes anthocyanes qui en sont responsables, que le cépage soit de Californie, de France, ou de l’Ontario.

Mais revenons sur les molécules d’anthocyanes. Sommairement, il y a cinq types d’anthocyanes dont quatre réagissent facilement à l’oxygène. On comprendra que s’il y a des oxydations marquées, il y a risque de dégradations de ces molécules.

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Sur le plan quantité de ces molécules, une seule est majoritaire: la malvidine. Elle représente plus de 50% du contenu anthocyanique du raisin. Certains cépages comme le grenache en ont 90%; la syrah autour de 60%; le sangiovese, 50%; le merlot, 60%, le pinot noir, 55%, etc.

Au cours de la vinification, on extrait un certain nombre d’anthocyanes, mais par malchance, une seule subsistera dans le vin. La malvidine qui est la plus stable devient totalement majoritaire dans le vin rouge. C’est-à-dire que tout disparaît à l’exception de la malvidine.

C’est donc dire que si certains cépages comportent naturellement peu de malvidine, il y a risque d’évolutions importantes. Mais la nature fait bien les choses puisque tous les cépages contiennent au moins 50% de malvidine.

Un autre facteur important en vinification est l’ajout d’anhydride sulfureux (SO2) pour aseptiser et protéger le moût de l’oxydation. Or, ce SO2 décolore les molécules. Résultat : après le sulfitage d’une cuve, la couleur diminue.

Heureusement, ces molécules ont la propriété d’être en équilibre. En milieu acide, elles sont rouges. Quand le pH passe de 3 à 5, elles sont incolores et au-delà de 5, elles sont bleues. Or le pH du vin se situe entre 3 et 4. En laboratoire, quand on prend une solution d’anthocyanes d’un pH de 3 et qu’on ajoute du SO2, le vin devrait se décolorer dans les heures qui suivent. Or, le vin reste rouge.

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L’explication: il y a des mariages consanguins au milieu des mêmes groupes. Les tanins servent d’appui aux anthocyanes. Sans tanin dans le vin, la couleur tendrait vers l’orange. L’exemple typique est le Tavel, un vin rosé de la vallée du Rhône.

Ainsi donc, pour stabiliser la couleur, il ne sert à rien de macérer les anthocyanes s’il n’y a pas de tanin. Pour favoriser ce mariage, il n’y a que l’oxydation par l’aération. Celle-ci permet la formation de molécules particulières qui servent de liaison entre le tanin et les anthocyanes et ainsi permettent l’obtention de la couleur.

Il faut donc retenir que la couleur du vin rouge n’est pas due uniquement à la présence des anthocyanes, mais que les tanins sont aussi indispensables.

Les Tanins

Tout d’abord les tanins, c’est plus compliqué que les anthocyanes. Les tanins, molécules très complexes, sont divisés en deux types: les tanins ellagiques et les tanins condensés.

Les tanins ellagiques se trouvent un petit peu dans le raisin. Par contre, ils sont présents dans le bois, en particulier dans le chêne de tonnellerie. Ils ont une structure très différente des tanins du raisin. Quand on vous dit que le vin a une structure tannique peu suffisante et qu’on va prendre des tanins du bois, ça n’a rien à voir. Il faut faire très attention.

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Les tanins condensés comme son nom l’indique sont des molécules polymérisées qu’on trouve dans le raisin. Ces tanins condensés ont une structure toute particulière dans les pépins, éventuellement dans les rafles. Par contre, ces molécules sont présentes dans la pellicule et la pulpe. Ces molécules sont extraites lors de la vinification et présentent des propriétés intéressantes de réactivité, surtout sur le plan gustatif. On a vu qu’une de leurs propriétés est de stabiliser la couleur. Seuls les tanins du raisin peuvent stabiliser la couleur.

Dans un vin, certain constituants apportent des odeurs, des caractères sucrés voire des caractères désagréables, des caractères d’amertume, d’acidité, de dureté, d’astringence.

L’astringence, c’est quoi? C’est une relation entre les tanins et les protéines de la salive. Il y a blocage salivaire. Ce blocage peut apparaître rapidement, c’est-à-dire pendant la dégustation et après la dégustation.

Pourquoi discourir sur le tanin aujourd’hui?

Simplement parce que Vintages mettra en vente ce samedi 12 juin (mais disponible à partir de jeudi) possiblement un des plus beaux rapports qualité/prix à avoir été offert depuis belle lurette. Cahors est le vin du malbec. Ce raisin a trouvé un endroit sur terre où il peut maximiser ses qualités. Toutefois, c’est à Cahors qu’il donne tout son potentiel. Est-ce que la malbec argentin peut vieillir ? Seul le temps le dira alors que Cahors l’a déjà prouvé.

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Dans ce cas précis, Clos La Coutale Cahors 2007 (171579 13,95 $) est gourmand et si bien enrobé qu’il faudra beaucoup de volonté pour conserver quelques bouteilles et constater tout son potentiel dans vingt-cinq ans. Riche, ample, plein, corsé, bien campé sur des tanins charnus et gras, Clos La Coutale Cahors 2007 respire intensément le chocolat, le cerise noire, le tabac. La robe violacée profonde, presque noire, confirme une concentration persistante en bouche peu commune pour le prix. Notez une acidité superbement intégrée qui confère fraîcheur et maintient le vin dans une forme juvénile avec de la substance, de l’éclat et une caresse constante en finale. ****/***** (l’étiquette est celle du millésime 2008 alors que le vin est bien du 2007).

Marchesi di Barolo Barbaresco 2006 (155408 24,95 $) Robe grenat soutenu au disque un peu orangé. (Rappelez-vous la couleur des anthocyanes…) De bonne intensité, le nez étale des nuances où s’entremêlent chocolat, goudron, cerise et pot-pourri. L’attaque en bouche, ferme (combinaison acidité et tanin) et moyennement corsée, évolue sur la souplesse et l’élégance. L’ensemble est généreux et soyeux, bien fin et déploie un kaléidoscope d’arômes insistants et persistants. Très bon. ***(*)/*****

Fattoi Brunello di Montalcino 2004 (33498 34,95 $) Intense et profond, ce rapport qualité/prix fantastique sent bon la terre, le café, le graphite, les fruits noirs sur un fond minéral. Corsé et assis sur des tanins tendres et gourmands, le vin est nuancé et très bien structuré, plus dans la substance et l’élégance, que dans la force et la puissance. Issu d’un grand millésime, il est mûr et mérite une journée de carafe. **** / *****

Je continuerai sur le tanin la semaine prochaine.

Deux vins blancs

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Tawse Sketches of Niagara Riesling 2009 (89029 17,95 $) On m’aurait servi ce vin à l’aveugle et j’aurais assurément voyagé en Allemagne, plus précisément en Moselle. Qu’il provienne de la péninsule du Niagara ne me surprend pas puisque la région a déjà démontré le potentiel qualitatif du riesling.

Pourquoi Moselle? Parce que le vin est à la fois léger et aérien tout en offrant tension, minéralité, densité et corps. Demi-sec, il a une légère douceur qu’une acidité tendue et droite telle la flèche de Robin des Bois fendant l’air dompte sans compromis pour en laisser une impression finale d’un vin sec. Que dire de l’extraction et de la persistance aromatique qui tient, qui tient, et qui tient encore un long moment après avoir avalé. Nul besoin de le servir froid. «Une telle acidité désaltère autant que le vin a du poids» (lire à haute voix). Magnifique. Avec une telle combinaison douceur/acidité, Sketches 2009 devrait faire l’histoire et potentiellement durer au moins quinze ans. ****/*****

Vesevo Falanghina Sannio 2008 (51698 15,95 $) Avec un nez de bonne intensité qui respire la pêche et les fleurs blanches, la bouche suit, ronde et moyennement corsée, sur une bonne acidité pour tenir la structure et assurer la fraîcheur alors que les odeurs perçues au nez persistent longtemps. ***/***** J’ai souvent servi la falanghina, cépage particulier à la Campanie, à des gens qui ne juraient que par le pinot grigio. Ceux-ci recherchaient un vin souple, donc sans trop d’acidité et avec un caractère sphérique, donc sans angles. Je ne crois pas avoir jamais retourné une bouteille.

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