Le 400e anniversaire de Québec est l’occasion pour nombre de maisons d’édition de publier des ouvrages historiques, des carnets de réflexions, des albums de photos et, pourquoi pas, des romans historiques. VLB éditeur a fait paraître Meurtre au Soleil, un roman policier dont l’intrigue tourne autour de l’assassinat d’un journaliste du quotidien Le Soleil de Québec en 1898. Ce premier roman d’Antoine Yaccarini est un bijou.
Ancien professeur de sciences qui vit à Québec depuis 1970, Antoine Yaccarini affirme n’avoir jamais commis d’erreurs de jeunesse. Il juge qu’il n’est pas trop tard et il signe son premier roman. Heureuse erreur puisque l’ouvrage est intelligent, bien écrit, avec de sympathiques clins d’œil à des classiques littéraires. Yaccarini coiffe chaque chapitre de sommaires qui ne sont pas sans rappeler ceux des ouvrages du XIXe siècle. Ces sommaires regorgent d’ironie, ce qui donne du relief à l’approche distanciée et moderne que l’auteur adopte à l’égard de son sujet.
Le journaliste assassiné est Arthur Laflamme, un «rouge» ou un libéral, comme tout le monde à l’emploi du Soleil. Il est ouvertement anticlérical, ce qui permet à l’auteur de peindre un portrait rapide de l’Église catholique au Québec dans les années 1890. «Dans notre province de Québec, écrit-il, l’Église considère le Parti libéral comme un nid d’intellectuels anticléricaux, aux idées dangereuses, alors que les conservateurs passent pour ses meilleurs alliés. Cela la conduit à s’ingérer continuellement dans les affaires politiques.» On sait que, dans leurs sermons, les curés de cette époque n’hésitaient pas à clamer que «le ciel est bleu alors que l’enfer est rouge!»
Le roman réunit des Canadiens français et des Irlandais, des libéraux et des conservateurs, des francs-maçons et des membres influents du clergé. Plusieurs personnages sont des personnalités de l’époque: Mgr Louis-Nazaire Bégin, archevêque de Québec, Frank Pennée, chef de police, Ernest Pacaud, fondateur du quotidien Le Soleil, et Honoré Beaugrand, fondateur des journaux Le Fédéral (Ottawa) et La Patrie (Montréal).
Le chef de police Pennée est un anglophone qui fait «figure d’exception dans le paysage social» de Québec. Il est Anglais et non Irlandais; il est catholique, contrairement aux autres Anglais de la ville; et il est parfaitement à l’aise dans les deux langues, ce qui le distingue d’à peu près tout le monde, sauf le sergent Francis Leahy, à qui Pennée confie l’enquête. Leahy est un Irlandais parfaitement bilingue.