Avant la guerre: des artistes libertaires allemands

Le Cavaler bleu, Éditions Taschen, relié, 21 x 26 cm, 2016, 96 p. La jaquette reproduit Café turc (détail) d'August Macke, 1914, huile sur bois, 60 x 35 cm, Munich, Städtische Galerie im Lenbachhaus. Brücke, mêmes caractéristiques, Autoportrait au modèle de Kirchner, 1907, sur la jaquette, Hambourg, Hamburger Kunsthalle.
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Publié 25/10/2016 par Gabriel Racle

L’histoire de l’art nous offre une mosaïque bigarrée, colorée et toujours diversifiée de mouvements artistiques qui s’opposent, se complètent, se marient dans le temps et dans les espaces géographiques du monde.

Parmi ces derniers, l’Allemagne tient un place de choix avec des mouvements artistiques qui ont marqué leur temps, et dont les livres pédagogiques des éditions Taschen nous offrent une synthèse aussi illustrative qu’historique. Die Brücke et Der Blaue Reiter en sont les derniers exemples.

Le Pont

En 1905, des artistes allemands expressionnistes se regroupent et forment à Dresde, une ville de Saxe, l’ensemble appelé Die Brücke (Le Pont). Le groupe compte d’abord quatre membres, des étudiants en architecture. Pour bien marquer leur orientation artistique «libertaire», ils s’installent dans un quartier ouvrier de la ville.

En effet, ils s’opposent aux conventions en vigueur qui, selon eux, limitent la liberté d’expression artistique. Ils préconisent de ne pas s’imposer de règles. «L’inspiration doit couler librement afin de donner l’immédiateté de l’expression selon les émotions et la conscience subjective de l’artiste, encourageant ainsi un dessin rapide, des couleurs vives, pures ou peu mélangées.»

Leurs œuvres révolutionnaires sont vertement critiquées par les milieux conservateurs, qui n’acceptent pas ce mépris de la forme, cette violence des couleurs qui se juxtaposent et s’affrontent, et offrent ainsi une image jugée dangereuse pour la jeunesse allemande. Cette forme d’art sera dénommée «art dégénéré» par le régime nazi.

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Taschen

Les nombreuses illustrations du livre des éditions Taschen permettent de visualiser plusieurs productions de ces artistes. Le nu est leur motif préféré et Taschen en présente plusieurs. Pour ces peintres, le nu est le «symbole de l’état paradisiaque initial» et n’est donc soumis à aucune convention de représentation artistique.

Néanmoins, ils peignent aussi tous les sujets classiques, des paysages, des natures mortes ou même des portraits, des activités sociales ou des décors urbains.

L’ouvrage des éditions Taschen présente les grands représentants de ce mouvement dont le nombre de membres s’est accru, avant qu’il ne s’éteigne à Berlin en 1914.

Eric Heckel (14 pages dans le livre) est l’un des membres fondateurs du mouvement, dont il fut aussi le secrétaire et le trésorier. Ses tableaux, dont beaucoup de nus, sont très colorés. Kirchner (32 pages) est regardé comme le peintre le plus représentant de Die Brücke. Artiste très sensible, il retrace les rues et la vie urbaine de Berlin dans des formes nouvelles et originales..

Emil Nolde est également considéré comme un des plus grands représentants du groupe. D’autres noms présentés dans l’ouvrage avec des reproductions sont ceux de Max Pechstein et Karl Schmidt-Rottluff, parmi d’autres. Die Brücke a été l’un des deux groupes fondamentaux de peintres expressionnistes allemands, l’autre étant Der Blaue Reiter.

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Le Cavalier bleu

Le Cavalier bleu (Der Blaue Reiter) est un autre groupe d’artistes allemands d’inspiration expressionniste, qui s’est formé à Munich à l’automne 1911. Il se fait rapidement connaître en organisant deux expositions en 1911 et en 1912, et en publiant cetAte année-là un Almanach, «le plus stimulant exemple du renouveau des formes esthétiques dans le domaine des arts, de la littérature, de la musique, de la scénographie». (Klincksieck)

«Bien qu’il n’ait duré que trois années de turbulence, le mouvement Der Blaue Reiter (1911-1914) a exercé une influence considérable sur le développement de l’art moderne européen. Baptisé d’après une peinture de Kandinsky, Le Cavalier bleu (1903), ce collectif d’artistes, regroupés autour de l’émigré russe Vassily Kandinsky et du peintre allemand Franz Marc, rejeta les normes établies et pénétra avec fracas dans un inconnu artistique renouvelé.» (Taschen)

Ce regroupement ou cette association comprend, outre Kandinsky, des peintres au talent reconnu, comme Gabriele Münter, Franz Marc, Heinrich Campendonk, Robert Delaunay, Alexej von Jawlensky, Paul Klee et Alfred Kubin, présentés dans le livre des éditions Taschen.

Symbolique des couleurs

C’est un intérêt commun pour la peinture, la gravure sur bois et les estampes, qui a regroupé ces artistes d’avant-garde. Ils attachent aussi beaucoup d’importance à la symbolique des couleurs, c’est-à-dire aux associations psychologiques entre des couleurs et des valeurs sociales ou morales. Ces associations varient dans le temps et dans les sociétés.

Pour les membres du Cavalier bleu, la création artistique doit être spontanée, sans chercher d’abord à répondre à des conventions établies. Il en résulte des œuvres d’art surprenantes, des chefs-d’œuvre du genre, comme le Cheval bleu de Franz Marc (1911, p. 73), le Tableau avec l’arc noir de Kandinsky (1912, p. 55) ou les Indiens sur des chevaux d’August Macke (1911, p. 61), pour ne donner que quelques exemples.

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D’une manière générale, ces artistes abordent des sujets variés, mais qui se caractérisent tous par des perspectives distordues, des lignes grossières et une «utilisation hyperbolique et expressionniste de la couleur».

Le Cavalier bleu s’est disloqué au début de la Première Guerre mondiale, après la mort de deux de ses membres éminents, Marc et Macke. L’ouvrage des éditions Taschen révèle l’influence remarquable du mouvement et en présente les œuvres majeures, les artistes et leur rayonnement ultérieur.

«L’essentiel, pour moi, est de pouvoir dire ce que je veux, de raconter mon rêve.» (Vassily Kandinsky, 1935)

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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