Heaslip House: un ajout précieux au campus de Ryerson

Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 17/10/2006 par Claude Bergeron

Les campus universitaires sont presque toujours une source de plaisir pour l’amateur d’architecture. De tout temps on y a réalisé des œuvres qui figurent parmi les meilleures de leur époque: University College et Massey College à l’Université de Toronto. Et dernièrement, les centres Bahen et Donnelly toujours à l’Université de Toronto et l’école d’administration Schulich à l’Université York.

Les campus offrent aussi un regroupement d’édifices variés par leur fonction et conséquemment par leur forme. On est loin de l’uniformité des tours à bureaux et des condos. Enfin, les échantillons d’édifices de diverses époques que préservent les campus les plus anciens ajoutent encore au plaisir de la balade dans ces oasis de contrastes.

Située au cœur de la ville comme l’Université de Toronto, l’Université Ryerson pourrait bien devenir une autre de ces oasis, surtout si le nouveau président Sheldon Levy réalise en 2008 son projet de transformer en mail piéton la rue Gould qui traverse le campus d’est en ouest. Il relierait sur son parcours deux autres espaces ouverts: le Devonian Square et la vaste cour intérieure de Kerr Hall.

Le campus de Ryerson n’est pas privé non plus d’édifices historiques: la maison néo-gothique de l’architecte William Thomas (1848), l’imposant portique classique de la première école normale (1852) préservé dans la cour de Kerr Hall, la cathédrale grecque Saint-George (1895) et l’édifice de style Renaissance italienne de Doubleday Canada (1912) que l’université s’apprête à acquérir.

L’ajout le plus récent à l’architecture du campus incorpore l’ancienne maison de la brasserie O’Keefe de style art déco. Inaugurée le 28 septembre dernier, Heaslip House, qui abrite l’école de formation prolongée G. Raymond Chang, est un édifice remarquable en lui-même et une impressionnante réussite d’intégration au milieu.

Publicité

Cette réalisation des architectes Rounthwaite, Dick & Hadley et de Lett Architects Inc. s’affiche sans ambages comme une œuvre moderniste où un habile assemblage de volumes géométriques crée une imposante sculpture abstraite.

Cette construction n’a pas sa fin en soi; elle complémente, et de façon grandiose, le Devonian Square, aménagé en 1978 au coin des rues Victoria et Gould. Cette plaque tournante de la circulation, que flanque un vaste bassin circulaire bordé d’arbres et de boulders de granit et qui, l’hiver, se transforme en patinoire, constituait déjà une attraction intéressante. Heaslip House introduit une dimension verticale qui la rehausse de façon brillante.

Comme les rochers qui, semblables à des îlets, parsèment le bassin, Heaslip House plante deux pilotis dans le plan d’eau, dressant ses sept étages en partie au-dessus du bassin alors que le reste est ancré au sol.

Une sculpture haute de sept étages peut sembler démesurément haute pour ornementer une étendue d’eau quand même modérée. Pas du tout. Grâce à son apparence légère elle ne subjugue la place en aucune manière. Détachée du sol, cette construction s’amincit par degrés à mesure qu’elle s’avance vers le bassin au-dessus duquel elle dresse une façade fragmentée en tranches verticales qui lui impriment un élan ascendant. En même temps qu’elle s’amincit, elle croît en hauteur. Ayant ainsi l’air de se projeter vers le haut autant que vers l’avant, Heaslip House évoque l’image d’une gigantesque proue.

Les détails de formes, très simples, et les contrastes de couleurs contribuent habilement à déconstruire la masse et créer ces élans. Les deux murs les plus éloignés, soit le mur rideau au premier plan et la maison O’Keefe en calcaire qui occupe l’arrière-plan, sont tous les deux beiges. Les sépare un pan en cuivre percé de fenêtres alignées qui renforcent l’effet d’étirement.

Publicité

Un semblable jeu de formes et des mêmes teintes rappelle dans le hall d’accueil les articulations qui caractérisaient l’extérieur. L’entrée se fait par l’ancienne maison O’Keefe qui ne conserve que sa façade sur la rue Victoria. La hauteur du hall décroît progressivement de trois à deux puis un étage, chaque pan de mur peint d’une couleur distincte. Les parois de verre continues du plancher au plafond maintiennent un contact intime entre l’intérieur et le bassin rocheux et les arbres du square.

Ce carrefour pourrait bien croître en importance dans les prochaines années. Flanqué du mail projeté, il pourrait aussi servir de parvis à la future bibliothèque que le président Levy veut ériger sur l’emplacement du magasin Sam the Record Man pour donner à son université une façade sur la rue Yonge.

L’évolution de l’Université Ryerson sera sûrement une chose à surveiller dans les années à venir.

Auteur

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur