Tom Wesselmann: célèbre et mal connu

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Publié 03/07/2012 par Gabriel Racle

Cet oxymore s’applique bien à cet artiste, du moins jusqu’à présent. Mais au fait, connaissez-vous Tom Wesselmann? Non, alors une occasion unique vous est proposée pour faire sa connaissance et celle de ses œuvres. Oui, vous faites partie de ses admirateurs privilégiés, c’est la possibilité de revoir ses créations et d’autres que vous ne connaissez pas encore.

Ces possibilités, c’est le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) qui vous les propose avec l’exposition Wesselmann, au-delà du Pop Art, qui présente un grand nombre de ses œuvres jusqu’au 7 octobre 2012. Tom Wesselmann (1931-2004) est l’un des plus grands artistes associés au Pop Art étatsunien. Mais malgré sa célébrité, c’est pourtant le seul de ce mouvement phare du XXe siècle qui n’avait pas encore fait l’objet d’une présentation majeure en Amérique du Nord.

L’exposition de Montréal offre donc une occasion exceptionnelle de découvrir ou de redécouvrir cet artiste, «Le plus mal connu des artistes célèbres», comme l’écrit en titre de son article du catalogue Stéphane Aquin, conservateur de l’art contemporain au MBAM. Elle apporte une vision nouvelle sur le travail de cet artiste, dont on peut entrevoir l’évolution en suivant le parcours de l’exposition.

L’évolution de l’artiste

On divise l’œuvre de Wesselmann en deux importantes séries: le grand nu féminin (Great American Nude) et les natures mortes (Still life), des compositions faites avec des collages d’images de magazines et des objets trouvés, des fleurs en plastique, des appareils électroménagers, et aussi des reproductions de ses tableaux préférés, comme dans l’illustration de cet article.

L’exposition qui suit un ordre chronologique, depuis les premiers collages jusqu’aux magistrales abstractions et Sunset Nudes de la fin, en passant par les chefs-d’œuvre de la période Pop, permet ainsi de découvrir l’évolution de l’artiste, qui s’envole au-delà du pop art. Partant des collages de ses débuts, il revisite les genres classiques de la peinture, le nu, les natures mortes, le paysage, jugés alors désuets. C’est la période des grandes séries qui ont fait son succès.

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L’artiste novateur

Il en résulte ce que l’on a appelé «la relecture de l’histoire de l’art» de Wesselmann et l’invention d’un nouvel art pop. Ses collages prennent du relief, on y trouve des reproductions de Matisse, Picasso, Mondrian. Wesselmann était très fier «de la forme d’art qu’il avait conçue et qu’il qualifiait de formidablement novatrice», écrit Marco Livingstone dans «Tom Wesselmann. L’homme d’acier», un article du catalogue.

Ce titre fait allusion aux dessins découpés dans l’acier au laser, auxquels Wesselmann a consacré beaucoup de temps et de précision. Si le nu féminin l’intéresse presque à l’obsession, il s’écarte complètement dans ses réalisations de la tradition des grands maîtres, tout en leur faisant un clin d’œil assez explicite par les positions évoquées. Ses nus sont sans visage, aux formes planes, simplifiées, avec des touches de couleur.

Deux citations de Wesselmann, rapportées par Nathalie Bondil dans son article du catalogue, peuvent aider à saisir son travail. «Je me considérerai toujours comme un formaliste, moins préoccupé par l’image que par la manière dont elle est formée.» «Toutes les parties de l’image sont en concurrence. Je vois l’art comme une activité agressive – c’est-à-dire que l’on affirme quelque chose en face d’une résistance…»

Comme l’explicite N. Bondil, directrice et conservatrice en chef du MBAM: «La toile est son ring, où il arbitre les combats du sujet et de la forme, des couleurs et de la composition.»

Des œuvres

Et le visiteur a la possibilité d’assister à ces combats et de réagir, puisque Wesselmann le dit, notamment à propos du nu: «Je veux provoquer des réactions intenses, explosives chez le spectateur.»

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En effet, organisée avec le soutien de la succession Tom Wesselmann de New York, cette exposition présente quelque 150 œuvres de l’artiste, dont 75 peintures, bas-reliefs en plastique, découpages, sculptures en bois polychrome — ses séries les plus significatives — 75 dessins et maquettes préparatoires, ainsi que des documents d’archives.

Comme l’écrit un visiteur: «Allez voir ça et prenez votre temps. En fait, donnez-vous l’autorisation d’arrêter le temps. Asseyez-vous sur les bancs mis à votre disposition devant les œuvres et perdez-vous dans vos rêveries. Vous verrez à quel point ça peut être bénéfique pour l’âme et le corps. C’est le meilleur anti-stress que je connaisse.»

Un catalogue

C’est un ouvrage d’art à la hauteur de l’exposition, que l’on ne manquera pas de se procurer. Grand format, 35×25 cm, relié, blanc à tranche rouge, 204 p. Plus de pages de reproductions en couleur, souvent en pleine page, que de pages de textes, tous très intéressants. Cette monographie comprend également une chronologie détaillée et une bibliographie. C’est l’ouvrage souvenir d’une visite, que l’on pourra regarder chez soi à loisir, ou qui supplée à la visite que l’on ne peut faire.

«L’art ressource, l’art transforme, l’art guérit.» (Prozac culturel)

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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