Le temps de la Croisette en ébullition et du fameux tapis rouge est revenu. Pour les passionnés du cinéma, rien ne saura les détourner de cette 63e édition du Festival du Film de Cannes. Ni la tempête qui a fait entrer la mer dans la ville et qui à détruit une bonne partie des infrastructures du festival, ni le volcan et ses capricieuses fumées qui perturbent sans relâche le trafic aérien, ni le temps plutôt frais pour les normales saisonnières. Professionnels de l’industrie, journalistes et inconditionnels du film, tous se sont donnés rendez-vous à Cannes pour se plonger pendant dix jours dans l’univers du cinéma. Je ne déroge pas à la règle, et coiffée des multiples casquettes de réalisatrice, journaliste et passionnée de cinéma, je me joins à la foule. Dix jours frénétiques, happée dans le tourbillon de folie du marché du film et des projections, poussée, tirée, piétinée par les fans hystériques à l’extérieur, occupant rues, trottoirs, hôtels et bord de mer.
Une jungle féroce
Certes, le pouls est élevé et le cinéma est au cœur des débats et de l’action. Il s’agit de vendre, d’acheter. De se faire connaître ou représenter. De critiquer, d’interviewer, de signer, de photographier, et pour d’autres, d’apercevoir, d’obtenir une dédicace, un sourire, un signe de la main.
Beaucoup d’animation donc. D’agitation. De compétition. De brutalité. Dans le ventre du Grand Palais des festivals, les acteurs de l’industrie ne sourient pas et ne se regardent pas: ils se concentrent sur les badges portés par tout un chacun autour du cou, essayant d’identifier l’acheteur, le distributeur ou le programmateur sur lequel bondir pour «vendre» son produit, son service ou son talent.
Des hordes de cinéastes, comédiens et producteurs attaquent à tout bout de champ avec leurs mini-affiches et leur «screeners», tandis que des présidents de sociétés de films, des responsables d’achat se protègent derrière des lunettes noires (en sous-sol!) et un Blackberry pour fuir les assaillants.
Les journalistes se précipitent dans leurs salles de projection pour visionner les films et oublient que dehors, le soleil brille et la vie bat son plein. Les rencontres petits-déjeuners organisés par les différents intervenants du festival tournent au cauchemar et à l’émeute lorsque vient le temps des rencontres et entrevues, alors que les soirées ou cocktails «privés» rivalisent de superficialité et de vulgarité, abandonnant l’amour du 7e Art au vestiaire.