Immigrer, c’est stressant

Café scientifique des Instituts de recherche en santé du Canada

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Publié 03/11/2009 par Annik Chalifour

Les personnes qui, pour des motifs économiques ou politiques, ou pour leur sécurité, quittent leurs pays d’origine pour s’installer au Canada, font face à nombre d’enjeux qui peuvent avoir un impact sur leur santé mentale.

Selon les recherches, les problèmes de santé mentale vécus par les nouveaux arrivants sont directement liés à leurs défis d’adaptation.

«L’apprentissage d’une nouvelle langue, l’éloignement de la famille et un emploi temporaire ou mal rémunéré représentent quelques-uns des facteurs qui exercent une forte pression sur les nouveaux arrivants», expliquait Laura Simich, du Centre de toxicomanie et de santé mentale et professeure à l’Université de Toronto, au récent Café scientifique organisé par les Instituts de recherche en santé du Canada à l’hôtel Gladstone, rue Queen ouest.

«Les Cafés ont pour but de sensibiliser le public aux déterminants sociaux de la santé; entre autres, les conditions d’emploi, la culture, l’éducation, la situation économique», explique Élaine Lachance, agente de santé publique et co-organisatrice de l’événement.

La rencontre de mardi dernier, se déroulant dans une salle à caractère décontracté du Gladstone, a permis au grand public d’échanger librement avec les experts invités, quant aux facteurs de stress liés à l’immigration et leur impact sur la santé mentale des nouveaux arrivants.

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Outre Laura Simich, on y trouvait Peter Smith, de l’Institut de recherche sur le travail et la santé et professeur adjoint à l’Université de Toronto, et Martha Ocampo, gestionnaire chez Across Boundaries Mental Health Centre.

Le Dr Kwame McKenzie, scientifique principal, Centre de toxicomanie et de santé mentale et professeur à l’Université de Toronto et l’Université de Lancashire, en était l’animateur.

Stress post-traumatique

«Le stress post-traumatique, que vivent principalement les réfugiés, représente un autre facteur important qui ajoute à cette pression», dit Mme Simich. Le haut niveau de stress ressenti par les nouveaux arrivants, causé par les difficultés de leur acclimatation, entraînerait un effet important sur leur santé mentale.

Mme Simich réfère, entre autres, aux personnes issues du Soudan et du Sri Lanka. «Deux pays dévastés par les conflits et désastres naturels, d’où les ressortissants sont souvent des survivants.»

Encore faut-il faire face à la stigmatisation associée aux enjeux de la santé mentale, à laquelle vient s’ajouter la difficulté pour de nombreux arrivants de comprendre la notion de stress, telle que conçue en fonction du contexte de vie nord-américain.

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Attentes très élevées

Peter Smith soutient, selon ses recherches, que «les conditions de travail difficiles, ajoutées au manque aigu d’information quant au système de compensation, de la sécurité et la santé au travail, figurent parmi les facteurs importants de stress chez nombre de nouveaux arrivants».

Plusieurs ne sont pas familiers avec la nécessité de travailler dans des lieux sûrs et sains; les normes visant à promouvoir la santé et la sécurité au travail; et le système d’indemnisation lié aux accidents de travail.

Laura Simich ajoute que «le stress causé par le travail ne cible pas uniquement les nouveaux arrivants moins instruits, mais d’autant plus, ceux qui arrivent ici avec des attentes très élevées. Notamment les mieux nantis et détenteurs de diplômes universitaires, qui se retrouvent dans un boulot subalterne.»

Plusieurs nouveaux arrivants et réfugiés font face à la précarité d’emploi; à un travail non valorisant et à la discrimination; à une faible situation socio-économique qui mène au stress pouvant causer des problèmes familiaux et d’ordre psychologique, selon Mme Simich.

Nombre de nouveaux arrivants sont également chargés d’appuyer financièrement les membres de leur famille élargie restant dans le pays d’origine; une autre source constante de stress.

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Identité fortement ébranlée

Il y a aussi le choc culturel que vivent plusieurs nouveaux arrivants et qui varie d’un individu à un autre, selon la réaction de la personne face aux changements imposés par sa nouvelle vie.

On ne peut minimiser l’impact du choc culturel, au coeur du stress de l’immigrant, dont plusieurs aspects de son identité et ses valeurs se trouvent ébranlés à travers l’installation dans son nouveau pays.

«52% de notre population est constituée de diverses communautés issues de l’immigration», déclare le Dr Kwame McKenzie.

En outre, on sait que les nouveaux arrivants ont besoin, en moyenne, d’une dizaine d’années, avant de se sentir complètement intégrés au système de vie canadien.

Pourtant les recherches démontrent que l’aide nécessaire pour les nouveaux arrivants et les réfugiés en matière de santé mentale, dérivant des difficultés que comportent leur installation au Canada, sont notoirement insuffisantes.

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«L’assurance-santé de l’Ontario (OHIP) ne procure aucune couverture de soins de santé mentale, si ce n’est la possibilité d’être référé par un médecin de famille à un psychiatre, avec une longue période d’attente. Tout nouvel arrivant en Ontario, doit aussi attendre trois mois avant d’obtenir la carte OHIP», clame une dame du public.

Action communautaire

Martha Ocampo, fondatrice et codirectrice d’Across Boundaries, organisme de santé mentale communautaire, réfère aux services offerts par l’organisme aux communautés ethniques et marginalisées, et qui défend ses intérêts.

Across Boundaries a développé des moyens créatifs de venir en aide aux communautés marginalisées par les services de soins de santé mentale en général, en utilisant entre autres des thérapies holistiques comme l’Âyurveda, l’acupuncture.

On doit sensibiliser et outiller les nouveaux arrivants face à la santé mentale, et ce, à travers les réseaux communautaires, tout en empruntant une approche culturelle. Par exemple, en utilisant des personnes ressources qui sont issues de la culture d’origine du groupe ciblé, selon Mme Ocampo.

www.cafescientifique.cihr.gc.ca

Auteur

  • Annik Chalifour

    Chroniqueuse et journaliste à l-express.ca depuis 2008. Plusieurs reportages réalisés en Haïti sur le tourisme solidaire en appui à l’économie locale durable. Plus de 20 ans d'œuvre humanitaire. Formation de juriste.

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