Laurette Lévy, qui a vécu à Toronto pendant vingt ans, a décidé de révéler les réalités singulières auxquelles sont confrontées des femmes atteintes du VIH. Son récit, Debout en clair-obscur, s’inscrit dans une époque charnière, qui correspond à l’arrivée des premiers traitements efficaces contre le sida. C’est aussi le témoignage d’une évolution sur le plan des connaissances de la maladie, de son traitement et de la lente mais nécessaire transformation de l’attitude des gens face au VIH/sida.
En juin 2002, après treize ans de résidence à Toronto, Béatrice quitte la métropole pour retourner dans sa ville natale, Québec. Tout au long du trajet qui la ramène à Québec, elle se remémore les épisodes marquants et bouleversants qui ont façonné sa vie depuis son diagnostic de séropositivité en 1994 : sa rupture avec Peter, son amitié forte et durable avec un ami gai, son engagement à défendre la cause des personnes qui vivent avec le VIH, sa solitude, ses angoisses et ses espoirs aussi.
À proprement parler, le roman s’étend sur une demi-journée, le temps de quitter Toronto et d’arriver à Québec, en passant par Belleville, Kingston, Brockville, Cornwall, Montréal et Trois-Rivières. Entre chacune de ces villes, il y a des retours en arrière, des pans de vie complets qui nous sont révélés, de 1994 à 2002. On y apprend que Béatrice Langlois, ou Béa, a été infectée par un homme «tout de noir et d’usagé vêtu, grand, mince et des yeux à la Roy Dupuis».
Elle se demande comment tolérer «cette chose insidieuse» qui s’est glissée dans son corps et qui, «jour après jour, gagne du terrain, envahissant la moindre de [ses] cellules, s’y cramponnant sans jamais lâcher prise, qui change constamment pour ne pas se faire éradiquer». Même si Béa a réussi à apaiser sa douleur, «les sentiments d’abandon, de trahison et de colère n’ont pas complètement disparu». Elle a encore beaucoup de réticence à faire confiance aux gens, aux hommes surtout. Et elle vit toujours seule.
Pour narguer et défier la maladie, Béa fait du bénévolat dans des associations venant en aide aux sidéens et sidéennes. Elle se joint à un groupe de soutien afin de «rencontrer d’autres femmes avec lesquelles échanger et partager ses expériences, ses émotions». Cela s’avère très positif.