Limiter les débats dans les médias pour faire avancer la science? Non merci.

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Mauvaises nouvelles? Où ça? L'affiche de la Semaine québécoise des médias en avril 2019.
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Publié 18/07/2019 par François Bergeron

Un collectif français (?) NoFakeScience de 20 «scientifiques, journalistes et citoyen·ne·s préoccupé·e·s» vient de lancer «un cri d’alerte sur le traitement de l’information scientifique dans les médias, ainsi que sur la place qui lui est réservée dans les débats de société».

Estimant que «la défiance envers les médias et les institutions atteint des sommets» (ça se discute: cette défiance est parfois bien méritée), ils demandent que les sujets à caractère scientifique puissent être traités «sans déformation sensationnaliste ni idéologique».

Les 20, dont le manifeste a été endossé par plus de 250 signataires, veulent soustraire au débat d’opinion au moins six «consensus scientifiques»: sur les vaccins (efficaces) et l’homéopathie (placébo), l’usage agricole de glyphosate et les OGM (inoffensifs), le changement climatique d’origine humaine (réel) et l’énergie nucléaire (utile).

La Terre plate

«La science n’a pas réponse à tout», admettent-ils. «Il existe des questions qui n’ont pas conduit à un consensus clair, voire qui restent sans réponse.» C’est seulement là, selon eux, qu’il devient «légitime» pour un média de présenter et d’expliquer le débat.

Mais «si un consensus existe (…), il n’est pas souhaitable de donner autant de poids à un fait scientifique dûment établi qu’à sa négation».

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Et d’évoquer la rarissime croyance en la Terre plate, sorte de point Godwin du débat scientifique: «Il serait impensable qu’après 15 minutes d’un sujet sur la station spatiale internationale, l’on donne 15 minutes d’antenne à un·e adepte de la Terre plate.»

Oui, d’accord. Vous connaissez vraiment des gens qui croient en la Terre plate? Moi non plus.

Scientifiques corrompus?

Par contre, s’agissant d’un sujet moins tranché, comme le changement climatique anthropique catastrophique, «nous comprenons que des marchand·e·s de doute, y compris certain·e·s scientifiques, aient tenté et tentent encore de détourner le public du consensus»…

N’en déplaise à ces détenteurs infaillibles de la vérité, ce n’est pas une telle excommunication qui va mener à «un débat public apaisé et rationnel», et qui va «éviter de creuser le fossé entre scientifiques et journalistes».

Si la science, en effet, est quasi unanime sur l’efficacité des vaccins et la nullité de médecines douces populaires comme l’homéopathie, elle l’est un peu moins sur les pesticides, les OGM et le nucléaire.

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Ces trois technologies effraient beaucoup de monde en Europe (moins en Amérique du Nord) et, à mon avis, profiteraient grandement de débats plus vigoureux, justement pour finir par dissiper les peurs non fondées.

Pas le consensus attendu

C’est encore plus vrai pour le changement climatique. Ses tenants et ses aboutissants ont toujours fait l’objet de vifs débats chez les scientifiques, autant que chez les économistes et dans la population en général.

Ce n’est certainement pas en décourageant les débats et les «opinions» là-dessus qu’on va favoriser l’émergence d’un consensus progressiste humaniste.

Si ça se trouve, le consensus produit par des débats honnêtes dans les instituts scientifiques, dans les médias et sur la scène politique, pencherait plutôt pour une très faible influence humaine sur le climat… comparable à la très faible influence des remèdes homéopathiques sur la santé!

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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