Quand l’art devient passion

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Publié 18/06/2013 par Gabriel Racle

C’est l’histoire presque incroyable d’un couple de citoyens de Nashville, la capitale de l’État du Tennessee aux États-Unis, qui ont constitué une collection d’art exceptionnelle, et dont l’histoire n’est pas banale.

Des amateurs texans…

L’histoire débute à Gainsville, une petite ville du Texas, où il n’y a ni art, ni musée, avec la rencontre d’un garçon et d’une fille âgés de 14 ans, qui se marient à 19 ans et forment le couple Marlene et Spencer Hays, un nom désormais célèbre.

«Nous étions tous deux d’origine très modeste», d’expliquer Spencer, qui commence à travailler à Nashville en vendant des livres.

«Un jour, mon épouse me propose d’acheter un tableau d’un peintre hollandais du XVIIe, siècle pour décorer notre maison de Nashville». Un peu étonné, Spencer accepte. Et c’est ainsi que tout a commencé. Pourtant, «ce sont des autodidactes en histoire de l’art, de dire Guy Cogeval, président du Musée d’Orsay. C’est là leur force».

…devenus collectionneurs

Au début des années 1970, alors que Spencer dans la trentaine s’établit de plus en plus comme homme d’affaires prospère, les Hays commencent à acheter des tableaux pour orner leur maison.

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Comme beaucoup de leurs concitoyens, ils s’intéressent d’abord à la peinture d’artistes de leur pays de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle, dans des ventes aux enchères à New York ou à Londres.

Ils prennent vite goût à l’art. «Puis vient la passion, cet aiguillon qui bouleverse leur vie, transformant le talentueux businessman en chasseur à l’affût.» Leur champ de recherche s’élargit à l’occasion de leurs séjours habituels à Paris. «Il court les musées, les galeries d’art, les antiquaires. Ils admirent les hôtels particuliers… dont ils copient le modèle pour leur nouvelle demeure de Nashville. L’art français devient leur patrie.»

Dans les années 1980, ils découvrent les Nabis et tombent irrésistiblement sous le charme de leurs compositions, «une peinture plus intellectuelle, pleine de mystère et de rêve, difficile parfois à décrypter au premier coup d’œil ».

Un livre d’art passionnant

Marlene et Spencer, bien conseillés par des historiens d’art, des conservateurs de musée et de galerie d’art, vont acquérir des chefs-d’œuvre de l’art nabi. Ce mouvement postimpressionniste est né vers la fin du XIXe siècle, en réaction contre l’académisme. «Ensemble, disent-ils, nous avons méprisé l’école et les écoles, les rapins, leurs traditions, leurs farces et leurs bals inutilement nudistes. Ensemble nous nous sommes sérieusement amusés.»

Une passion française s’ouvre par une préface de Guy Cogeval – d’où sont tirées les citations qui précèdent – situant l’évolution des amateurs-collectionneurs, avec lesquels il s’entretient ensuite en compagnie de deux collaborateurs. Ces neuf pages d’entrevue permettent de mieux saisir l’aventure du couple Hays. Elles éclairent le choix des œuvres reproduites ensuite avec au besoin un texte explicatif et historique.

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Une exposition tout aussi passionnante

Le livre d’art donne la possibilité d’avoir entre les mains les pièces maîtresses de la collection Hays. Il reproduit, à titre de souvenir d’une visite ou de substitution à celle que l’on n’a pu faire, ces mêmes œuvres exposées jusqu’au 18 août 2013 au Musée d’Orsay à Paris.

En collaboration avec le couple, le musée a donc conçu l’exposition intitulée Une passion française, qui présente près de 200 œuvres, des peintures, des dessins, des sculptures d’artistes nabis.

Parmi eux, on trouve Paul Sérusier (1863-1927), Maurice Denis (1870-1943), Pierre Bonnard (1867-1947), Henri Gabriel Ibels (1867-1936), Rippl-Rónai (1861-1927), Roussel, Ker Xavier (1867-1944), Paul Ranson (1864-1909), Vuillard (1868-1940), Verkade Jan (1868-1946). C’est peut-être l’occasion de connaître certains de ces artistes qui nous sont inconnus ou peu connus.

Pierre Bonnard et Édouard Vuillard sont particulièrement bien représentés. Bonnard, leurs deux premières acquisitions nabies, s’est illustré par «un ensemble important de variations autour de scènes de la vie domestique, prises sur le vif». Pour Spencer, Vuillard est «l’artiste le plus doué pour évoquer une atmosphère intimiste et faire entrer le spectateur à l’intérieur de la vie de ses personnages comme les acteurs sur la scène».

Mais l’exposition et son livre d’art présentent aussi d’autres artistes comme Odilon Redon, Edgar Degas, Gustave Caillebotte, Camille Corot, Aristide Maillol (sculpteur), Amedeo Modigliani, sans oublier Fantin-Latour, Berthe Morisot ou Toulouse Lautrec.

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Découverte

Il n’est pas possible d’énumérer tous les trésors artistiques que recèlent cette exposition et le Beau-Livre qui l’accompagne. Mais c’est incontestablement l’occasion unique de découvrir un ensemble inconnu, à quelques exceptions près, et d’enrichir ainsi ses connaissances artistiques.

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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