​​Faux: l’homéopathie fonctionne puisque Santé Canada l’approuve

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Publié 15/03/2016 par Raphaëlle Derome (Agence Science-Presse)

Contrairement à une croyance répandue, l’homéopathie ne fonctionne pas. Les scientifiques le répètent depuis longtemps et la dernière grande analyse, (et la plus complète) publiée l’an dernier en Australie, le démontre encore une fois.

Lorsque l’état du patient s’améliore, c’est en raison de l’évolution naturelle de la maladie (par exemple, un rhume se guérit tout seul en quelques jours) ou de l’effet placebo (le simple fait d’avoir reçu un traitement donne confiance au patient et son état s’améliore pour vrai).

Malgré l’absence de preuves scientifiques démontrant leur efficacité, des milliers de médicaments homéopathiques sont toujours vendus en pharmacie.

Santé Canada, le ministère qui réglemente la vente des médicaments et des produits de santé naturels au Canada, a en effet autorisé 8500 produits homéopathiques différents depuis l’entrée en vigueur de la réglementation en 2004.

Cette réglementation créait ainsi un processus d’autorisation distinct, fait «sur mesure» pour les produits de santé naturels ou homéopathiques.

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Moins exigeant

Beaucoup de gens l’ignorent, mais le processus d’autorisation des produits homéopathiques est beaucoup moins exigeant que celui des médicaments standard, en particulier en ce qui concerne les preuves d’efficacité qui doivent être fournies par les fabricants.

Avant d’obtenir une approbation, les fabricants de médicaments «standard» doivent en effet fournir des études cliniques — des essais menés sur des humains — qui démontrent que leur produit est plus efficace qu’un placebo. Ils doivent aussi étudier les effets secondaires du produit et les indiquer sur la boîte.

Les fabricants de produits homéopathiques, eux, n’ont pas à fournir d’études scientifiques prouvant l’efficacité de leurs produits avant de les commercialiser. Il leur suffit de démontrer que les allégations relatives à la santé (l’action prétendue du produit) figurent dans les livres de référence utilisés en homéopathie.

Or ces manuels sont écrits… par des experts en homéopathie!

Autrement dit, si les homéopathes prétendent qu’un produit est efficace, cela constitue une preuve suffisante! Le ministère canadien de la Santé précise d’ailleurs lui-même sur son site que les produits homéopathiques «ne sont pas appuyés par des preuves scientifiques».

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Dans un reportage diffusé l’an dernier à CBC, l’équipe de l’émission Marketplace a voulu démontrer à quel point ces exigences sont peu élevées en demandant une autorisation pour un produit homéopathique fictif.

Les seules preuves «d’efficacité» soumises par Marketplace étaient quelques pages photocopiées dans un vieux manuel d’homéopathie (datant de 1902) trouvé à la bibliothèque! Cela a suffi pour obtenir une autorisation de Santé Canada.

Nouvelles règles

Cet été, Santé Canada resserrera les règles d’étiquetage pour certains produits homéopathiques.

Dès juillet 2016, certains produits homéopathiques pour enfants ne pourront plus afficher d’allégations de santé sur le soulagement de la toux, du rhume ou de la grippe, sauf si ces allégations sont appuyées par des preuves scientifiques.

Sans preuves, un produit destiné aux enfants de moins de 12 ans pourra donc toujours être vendu, mais ne pourra plus afficher de phrases comme «Soulage le mal de gorge» ou «Soulage efficacement les symptômes du rhume» sur son emballage.

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L’industrie des produits homéopathiques s’oppose à ces nouvelles normes d’étiquetage et invite ses clients à protester contre cette nouvelle mesure.

En attendant, les critiques de l’homéopathie trouvent que cette législation ne va pas assez loin. «Pourquoi de fausses allégations seraient-elles acceptables pour les produits pour adultes [si elles ne le sont pas pour des enfants]? » demandait l’été dernier Joe Schwarcz, de l’Organisation pour la Science et la Société de l’Université McGill, cité dans le National Post. Bonne question.

P.S.: Si vous avez le rhume, le blogue du Pharmachien propose une bande dessinée sur le rhume pour connaître les remèdes qui marchent (et ceux qui ne marchent pas). Dans une autre bande dessinée éclairante, le Pharmachien aborde aussi le marketing douteux des médicaments en vente libre.

Trois types d’autorisation

Au Canada, tout médicament, produit de santé naturel ou produit homéopathique doit être identifié par un numéro imprimé sur le produit.

Le numéro DIN est attribué aux produits pharmaceutiques (les médicaments «standard»). Les fabricants doivent soumettre des études cliniques sur l’efficacité et l’innocuité du produit. (Ce qui ne veut pas dire qu’ils sont sans danger… mais simplement que l’on connaît leurs dangers!)

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Le numéro NPN est attribué aux produits naturels. Certains d’entre eux sont appuyés par des études cliniques, mais pour d’autres produits, il suffit que le produit soit reconnu dans la médecine traditionnelle chinoise, par exemple, pour obtenir un numéro. Difficile pour le consommateur de savoir quelles preuves ont été fournies par le fabricant.

Le numéro DIN-HM est attribué aux produits homéopathiques. Ces produits sont fabriqués par dilutions successives, à tel point que dans beaucoup de cas, le produit final ne contient plus une seule molécule de l’ingrédient actif. Le fabricant n’a pas à fournir de preuves scientifiques de l’efficacité de son médicament.

En Ontario

Le 1er avril 2015 (ce n’était pas un poisson d’avril) entrait en vigueur la Loi ontarienne sur les homéopathes instituant notamment un Ordre chargé de veiller à ce que les personnes qui exercent cette profession soient «réglementées, responsables et qualifiées».

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