Version française de la Constitution: une collaboration fédérale-provinciale est incontournable

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Publié 17/11/2015 par Gérard Lévesque

«…la mise en œuvre de l’article 55 de la Loi constitutionnelle de 1982 par l’adoption d’une version française officielle de la Loi constitutionnelle de 1867 et les autres textes … aura pour effet … de rendre pleinement accessibles les dispositions de la loi suprême … dans les deux langues. Cela dit, la démarche préconisée par l’article 55 implique … non seulement les chambres législatives fédérales, mais aussi les assemblées législatives des provinces. Au fond, l’article 55 de la Loi constitutionnelle de 1982 mise de façon incontournable sur la collaboration fédérale-provinciale autant que sur des exigences juridiques pour viser son but.»

C’est ce qu’a déclaré Maître Warren Newman, avocat général principal à la Section du droit administratif, constitutionnel et international, au ministère de la Justice du Canada, lors de la journée d’étude «Une Constitution officiellement bilingue pour le Canada en 2017?», tenue à l’Université d’Ottawa, le 6 novembre dernier. Maître Newman a partagé avec les participants le résultat de sa réflexion sur l’obligation de rédiger et de déposer pour adoption la version française de certains textes constitutionnels.

Il réfère à deux causes entendues par les tribunaux du Québec. Dans l’affaire Guy Bertrand c. Paul Bégin, le procureur général du Québec fait valoir que le recours du demandeur est irrecevable parce que l’article 55 de la Loi constitutionnelle de 1982 n’a pas été respecté et que, par conséquent, les textes qui font partie de la Constitution du Canada sont inopérants. Le juge Robert Pidgeon, de la Cour supérieure du Québec, rejette cet argument.

Dans une affaire subséquente, La Reine c. Gérard Langlois, le défendeur soutient que, comme la version française de la Loi constitutionnelle de 1867 n’a jamais été proclamée sous le grand sceau du Canada, il s’ensuit que la Constitution canadienne tout entière ainsi que toutes les lois canadiennes (dont la Loi de l’impôt sur le revenu!) qui en découlent n’ont pas force de loi. Le juge Vallières, de la Cour du Québec, constate que l’on «peut s’étonner» d’un délai aussi long dans la mise en œuvre de l’article 55, mais décide que, «dans le cas présent, il n’est pas approprié de déclarer inopérantes les lois ou parties des lois prévues à l’annexe de la Loi constitutionnelle de 1982.»

Maître Newman rappelle le contexte politique: en avril 1997, le gouvernement du Canada avait estimé qu’il était temps de prendre les mesures permettant l’adoption d’une version française officielle et complète de notre Constitution. Or, le 13 mai 1997, dans une déclaration publique, le vice-premier ministre du Québec à l’époque, M. Bernard Landry, a refusé d’apporter la collaboration du gouvernement du Québec à ce processus. La position du gouvernement du Québec de ne pas s’associer à cette démarche a ensuite été confirmée dans une lettre signée le 21 mai 1997 par le sous-ministre de la Justice et sous-procureur général du Québec.

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La Constitution du Canada comprend un grand nombre de textes. En annexe au texte de son allocution, Maître Newman a énuméré les 17 textes constitutionnels pour lesquels il n’existe aucune version française ayant force de loi. Certains de ces textes traitent de sujets pour lesquels le consentement unanime est requis pour procéder à une modification constitutionnelle; pour d’autres, c’est la procédure dite de 7/50 qui s’applique; et pour d’autres encore, c’est la procédure bilatérale (le consentement d’une seule province et du Parlement).

À la lueur de l’analyse faite par Maître Newman, on peut conclure que, jusqu’à ce que les francophones puissent disposer de textes constitutionnels dans leur langue en toute justice, nos politiciens demeurent «condamnés à s’entendre».

* * *
Le texte de Maître Warren Newman

Auteur

  • Gérard Lévesque

    Avocat et notaire depuis 1988, ex-directeur général de l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario. Souvent impliqué dans des causes portant sur les droits linguistiques. Correspondant de l-express.ca, votre destination pour profiter au maximum de Toronto.

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