Vers une renaissance 
de l’Afrique?

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Publié 24/05/2011 par Lucie Joie

À quelques jours du sommet du G8 en France, qui regroupe les grandes puissances de la planète, une question se pose: quelle place croissante pour l’Afrique dans la gouvernance mondiale? Une conférence sur le campus de Glendon, à l’initiative du Consulat général de France, a tenté de démêler cette question qui devient cruciale au XXIe siècle.

Pour la réunion du G8, Nicolas Sarkozy a décidé de mettre l’accent sur le thème des liens avec l’Afrique.

Ce continent marginalisé n’arrive pas à trouver sa place au sein de la gouvernance mondiale. Pourtant, en 2050, l’Afrique subsaharienne représentera à elle seule 20% de la population mondiale et au vu de ses ressources naturelles, c’est un continent très riche. C’est ici que se situe le paradoxe africain.

Car avec toutes ces richesses et une population considérable et jeune (70% de la population a moins de 25 ans), pourquoi l’Afrique n’est-elle pas intégrée comme il se doit à la planète?

La construction d’une nouvelle Afrique

«Ce qu’on nous présente de l’Afrique est sombre. Moi je veux vous parler d’une autre Afrique qui va devoir jouer un rôle dans la gouvernance mondiale, elle est obligée», a expliqué le professeur Awalou Ouedraogo en préambule à son exposé intitulé «Prendre l’Afrique au sérieux».

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Et au XXIe siècle, il devient urgent de prendre au sérieux ce continent qui a des choses à proposer.

«En Afrique, une nouvelle vision du monde émerge grâce aux jeunes intellectuels africains, une jeunesse décomplexée formée dans les meilleures universités occidentales», poursuit Awalou Ouedraogo.

Loin de la société de consommation, l’Afrique saurait se développer d’une autre manière en intégrant le développement durable. Car si toute la Terre adoptait le même principe de société de consommation qu’en Amérique, il faudrait avoir six planètes comme la nôtre pour répondre à tous les besoins.

Selon le professeur, «l’avenir du monde passera par un changement de notre façon de faire ou le monde court à sa perte. L’Afrique a des solutions quand elle puise dans ses traditions».

Mais chaque pays doit trouver son propre modèle sans vouloir copier à tout prix l’occident.

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À l’heure où le monde arabe est en ébullition avec les peuples qui se soulèvent, les regards sont tournés vers cette Afrique subsaharienne dont un grand nombre de pays sont soumis à des dictatures. Et bien qu’il s’agisse de deux civilisations différentes, le professeur Ouedraogo pressent que le Printemps arabe pourrait bientôt avoir lieu en Afrique subsaharienne.

Un problème d’unification

«Sans bonne gouvernance, il n’y aura pas d’amélioration», explique Awalou Ouedraogo. «Les politiques africaines n’ont pas su forger l’individu africain à la citoyenneté. Quand il y a des élections, l’individu vote pour son ethnie et pas pour un vrai programme», poursuit-il.

Il s’agit donc d’un problème d’unification. Une unification qui aurait pu être possible après la décolonisation. De 1963 à 2002 une première tentative d’unification des États africains a été amorcée avec l’Organisation de l’unité africaine (OUA) remplacée en 2002 par l’Unité africaine (UA).

Selon le professeur Ouedraogo, «l’Union africaine est un échec, car il n’y a pas de bonne gouvernance. Mais l’union des peuples africains est réalisable, car le problème ce n’est pas le peuple, mais ce que le discours politique fait de ce peuple».

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Et sans une unification et une solidarité entre les différents États africains, il est difficile d’avoir du poids dans la gouvernance du monde face à des continents comme l’Europe. Les professeurs conférenciers Awalou Ouedraogo et Mairi S. Macdonald, parlent d’une institutionnalisation nécessaire du pouvoir politique dans les pays d’Afrique pour pouvoir prétendre à un véritable partenariat avec les autres continents.

Le problème de l’unification passe aussi par le commerce. «80% du commerce des pays de l’Union européenne se fait à l’intérieur de ce continent alors qu’en Afrique seulement 12% du commerce est interne au continent. Il y a donc beaucoup de chemin à faire avant une unification», précise Jérôme Cauchard, consul général de France à Toronto.

L’aide internationale, responsable de tous les maux?

La décolonisation des pays d’Afrique a prix du temps et on se demande si celle-ci est aujourd’hui bien terminée. Entre des systèmes monétaires dérivés du franc français et la présence militaire de l’ONU dans certains pays, comment l’Afrique peut prétendre être un continent indépendant?

«La présence européenne est considérable en Afrique et tous ces soutiens facilitent l’émergence de ce continent», explique Jérôme Cauchard. Les ONG qui agissent pour l’Afrique se multiplient, mais aident-elles vraiment les populations africaines ou au contraire ne les déresponsabilisent-elles pas plus qu’elles ne les aident, voire les infantilisent?

«On ne développe pas un continent avec des micro-projets comme construire une école… L’Afrique est inondée d’aides, mais nous ne devons pas attendre que les instances internationales fassent notre bonheur. Il faut réfléchir par soi-même et arrêter de tendre la main, car 50 ans après, ça ne mène toujours à rien», explique Awalou Ouedraogo.

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Et quelqu’un de l’assistance d’ajouter: «Il y a des poissons qui meurent de vieillesse en Afrique, c’est inadmissible!» Il faut donc repenser cette aide apportée, voire la supprimer en changeant les mentalités, car l’Afrique a assez de richesses naturelles pour se suffire à elle-même.

Le professeur Ouedraogo affirme «qu’il va falloir faire des choix drastiques nécessaires, mais qui vont peut-être faire du mal».

L’Afrique est en train de se transformer, mais pour que cela marche il faut que les grandes puissances changent aussi par rapport à ce continent trop marginalisé.

«Une nouvelle Afrique émerge, une Afrique qui se développe, qui se démocratise», a ajouté Jérôme Cauchard pour conclure la conférence sur une note positive.

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