Après deux romans, un récit et un recueil de poésie en une dizaine d’années, on peut douter que Michèle Vinet connaisse l’angoisse de la page blanche. Mais force est de se demander si elle n’est pas passée par là pour avoir pu concocter Le malaimant, son tout dernier roman…
La page blanche
Le protagoniste est Aurel Alphonse Toussaint, un homme tourmenté par le passé, l’amour et la page blanche. Il s’est acheté un cahier, mais sa main n’arrive pas à écrire un seul traître mot. Il se demande quoi faire pour «que la page jacasse, babille, cause, devise, bavarde, discute, se divulgue ultimo».
En moins de 150 pages, Michèle Vinet brode une intrigue semée d’embûches, de dangers et de cérémonies infernales, peuplée d’une harpie, d’un médecin et d’un shaman.
Au-delà des rebondissements inattendus, l’important demeure le moment présent, «la griffe, les mots inventés, exagérés, le franc-jeu de débiter ce qui lui passait par la tête, par le cœur, par la main».
Les paroles s’envolent…
Aurel se penche sur son inquiétant cahier, il y repose la main et même le front, «pour y demeurer, léthargique, des heures durant». Il veut à tout prix noircir du papier, pondre un texte, pisser une copie, car, comme on le sait, verba volant, scripta manent (les paroles s’envolent, les écrits restent).