Un saperlipopette de bon polar!

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Publié 20/10/2015 par Paul-François Sylvestre

L’été dernier, j’ai lu le premier d’une série d’enquêtes menées par un «odd couple» dans le Londres victorien. Petits Meurtres à Mangle Street, de Martin Kasasian, met en scène un détective privé imbu de lui-même, qui boit une quantité phénoménale de thé, et une jeune femme excentrique un peu trop portée sur le gin.

J’ai dit détective privé, mais Sidney Grice insiste pour se faire appeler détective «personnel». Une chambre à coucher est privée, souligne-t-il, mais pas un détective. La jeune femme excentrique est March Middleton; elle est aussi la narratrice.

Grice a une haute opinion de lui-même, «de sa vivacité d’esprit, de ses sens aigus, de ses pouvoirs d’observation superlatifs et de son prodigieux intellect». Deux choses le font avancer dans la vie: l’amour de l’argent et la haine du mensonge.

Selon Grice, il n’y a pas eu de crimes nouveaux depuis belle lurette. Pourquoi? Parce que l’esprit du criminel est perverti et tortueux, mais il manque invariablement d’imagination.

Le crime qui déclenche l’histoire ici est le sauvage assassinat d’une femme dans le quartier pauvre de Whitechapel en 1882. Le principal suspect semble piteusement innocent aux yeux de Middleton et sournoisement coupable au dire de Grice.

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La police mène son enquête, mais Grice n’attend rien de ce côté-là. «Lorsque Dieu créa les idiots, il a mis les plus idiots de tous en uniforme et leur a donné des casques pour que les pensées n’entrent pas dans leur tête.»

Grice est certainement le personnage le plus coloré de ce roman, surtout avec son juron préféré «saperlipopette!»

Cupide et snob, il ne fait jamais preuve de courtoisie, car «les gens risqueraient de s’imaginer que je suis devenu attentionné, voire gentil». Il admet être injuste, méchant et grossier; néanmoins, «mes capacités de raisonnement ne m’ont jamais fait défaut.

March Middleton est à l’avant-scène comme narratrice, mais elle évolue dans l’ombre de Sidney Grice. Ce dernier dit qu’elle fait partie non pas du «sexe faible» mais du «sexe cruel».

March est une femme qui ne fait pas ce qu’une femme doit faire. Ce sont les vivants qui l’effraient… car il n’y a rien à craindre des morts.

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Les conversations de Middleton avec Grice donnent souvent lieu à des répliques caustiques. En voici un exemple:
« – Qu’allez-vous faire dans ce cas?
– Je n’en ai pas la moindre idée, mais soyez sûre que je le ferai.»

J’ai mentionné qu’il se boit une quantité phénoménale de thé dans ce roman. Quand Grice offre un remontant, c’est une tasse de thé; si on lui demande quelque chose de plus fort, il offre une tasse de café.

Ce que je n’ai pas mentionné, c’est que Grice a un œil de verre qui se déboîte constamment. Il l’attrape en pleine conversation avec March ou avec l’inspecteur de police.

Je ne vous dirai pas qui est coupable dans ce polar. Sachez tout simplement qu’il s’agit d’une personne qui n’a jamais aimé quelqu’un sauf peut-être elle-même, et c’est ce qui en fait une personne si dangereuse.

En anglais, Mangle Street Murders est le premier tome de la série «The Gower Street Detective». Martin Kasasian a récidivé avec The Curse of the House of Foskett (2014) et Death Descends On Saturn Villa (2015). Un quatrième tome serait en route… J’espère que les Éditions City les traduiront tous.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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