Un roman léger, frétillant et succulent, écrit à quatre mains

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Publié 10/06/2008 par Paul-François Sylvestre

Après Voyage avec mes parents, Marie-Louise Gay et David Homel récidivent en offrant Saucisson d’âne et bave d’escargot, un autre roman écrit à quatre mains en anglais, puis traduit à deux mains en français par Michèle Marineau. Même s’il est destiné à un jeune public, ce livre réjouira aussi les adultes, voyageurs comme pantouflards.

Papa et maman ont décidé que la famille au grand complet passera toute une année en France. Max, qui écoute aux portes sous prétexte d’être Sherlock Holmes, est fier d’annoncer la nouvelle à son grand frère Charlie. Ce dernier, qui est le narrateur du roman, n’en revient pas. Paris, les 1 165 marches de la tour Eiffel, Euro Disney, le métro et les égouts de la Ville Lumière, l’endroit précis où a plongé le bossu de Notre-Dame… À moi Paris!

Ce serait beaucoup trop facile d’aller à Paris. Comme d’habitude, les parents ont choisi une tout autre destination: Panais (comme le légume), un trou perdu quelque part dans les montagnes du sud de la France. Mais quel trou! Les deux frères vont passer une année mémorable entre courses de taureaux, attaques de moutons, inondation et autres aventures rocambolesques.

Les deux garçons n’ont pas aussitôt mis les pieds à Panais qu’ils commencent à se poser des questions. Le village n’est-il pas un endroit étrange? Existe-t-il des gens normaux qui s’adonnent à des activités normales dans ce village?

Charlie et Max arrivent à la fin de l’été, une période qui donne lieu à des festivités où le but semble être «de faire les trucs les plus débiles possible, de façon à alimenter les conversations toute l’année jusqu’à la fête suivante». La course des taureaux en demeure un exemple aussi corsé que coriace.

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Les parents de Max et Charlie ne sont évidemment pas comme tout le monde. Le père est écrivain et travaille tout le temps, même en vacances. La mère écrit des histoires et les illustre. Voilà des drôle de métiers dans un coin où tout le monde travaille dans les vignobles. Ce qui fait dire à Charlie que «ce n’était pas la première fois que [ses] parents le mettaient dans l’embarras!» On peut sans doute y voir une réflexion autobiographique des coauteurs.

À la rentrée scolaire, les deux Canadiens remarquent que les vendanges ont préséance sur les classes et le foot. Charlie découvre, à sa grande satisfaction, qu’il a du succès auprès des filles, surtout celles qui ont du mal à apprendre l’anglais. La prof d’anglais, elle, se rend compte que Charlie parle mieux anglais qu’elle. «Ça l’a beaucoup vexée et embarrassée, et les autres élèves en ont été ravis.»

La France étant le pays du fromage, les coauteurs ne ratent pas l’occasion d’y faire allusion. Voici deux courtes descriptions qui donnent au récit une sensation olfactive: «Des fromages coulants dont l’odeur rappelait le vestiaire des garçons» et «des fromages de chèvre à l’odeur si forte que je n’aurais pas été surpris de les voir se lever et se mettre à marcher.»

La famille profite du congé de Noël pour faire un voyage en Espagne. À Barcelone, Charlie note que les gens parlent catalan, une langue où on a enlevé presque toutes les voyelles pour les remplacer par des consonnes. «Il y a des x partout.» Le garçon conclut donc que le catalan serait une langue géniale pour jouer au scrabble.

La mère déplore que, en France, «il y a la fête de ceci, le congé de cela… Je me demande si vous allez apprendre quoi que ce soit, cette année.» Une de ces fêtes a lieu au printemps. Il s’agit de la Fête de la transhumance ou déménagement des moutons vers les montagnes où le temps est plus frais, et l’herbe plus verte et plus savoureuse. Les chiens de berger font le gros du travail et «ignorent complètement un gros bol de nourriture tant qu’ils n’ont pas fini leur travail». Ce qui fait dire à Charlie que Max ne pourrait jamais décrocher un emploi de chien de berger!

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Avec quatre mains, Marie-Louise Gay et David Homel n’ont pas manqué de jongler avec les mises en situation, les sous-entendus, les quiproquos et les jeux de mots aussi. En voici un bel exemple. Quand la mère de Charlie doit finir une illustration pour la fin de semaine, «elle est complètement dans sa bulle».

Saucisson d’âne et bave d’escargot est un roman qui se lit et se savoure d’une traite. Sans être moralisateur, loin de là, il offre néanmoins le message suivant: on a beau vivre dans une grande ville remplie de gens, de voitures et d’édifices de toutes sortes, il y a parfois bien plus de choses à faire dans un petit village.

Marie-Louise Gay et David Homel, Saucisson d’âne et bave d’escargot, roman traduit de l’anglais par Michèle Marineau, Éditions du Boréal, collection Boréal Junior 93, Montréal, 2008, 210 pages, 11,95 $.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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