Une jeune comédienne disait ingénument à la grande actrice Sarah Bernhardt: «Moi, je n’ai jamais le trac sur scène». À quoi Sarah répondit: «Ne vous inquiétez pas, ma petite, ça vous viendra avec le talent».
Aujourd’hui, les acteurs n’ont jamais le trac, souvent parce qu’ils n’ont pas de talent mais surtout pas de métier. Autrefois, on passait par une école d’art dramatique, au Québec comme en France, et les meilleurs obligatoirement par le Conservatoire. On y apprenait à jouer classique et surtout à bien articuler. Une articulation claire était signe du respect du spectateur. Dès l’école primaire, on devait apprendre par cœur des textes qu’il fallait réciter avec une bonne diction.
Des générations de grands acteurs, tels Charles Dullin, Pierre Fresnay, Jean-Louis Barrault, Madeleine Renault, Sacha Guitry, Pierre et Claude Brasseur, Jean Gillibert et tant d’autres nous ont régalés de leur diction intelligente et belle. Louis Jouvet, qui bégayait, avait réussi à faire de son infirmité un style.
Tout cela est fini. Le cinéma vérité des Italiens de l’après-guerre a bouleversé le jeu des acteurs, devenu plus naturel. Il a été suivi par le théâtre. N’importe qui est recruté pour sa tête de malfrat ou son sexe appeal, sans avoir besoin de métier. On dirait que plus son articulation sera mauvaise, plus ça plaira!
Je sais bien que je suis un tantinet «malentendant», mais je comprends de moins en moins les films modernes, alors que les présentateurs de télévision ne me posent aucun problème. Il y a quelques jours, on passait le film L’Africain, avec Philippe Noiret qui a une bonne diction mais parlait à toute vitesse. Il avait pour partenaire Catherine Deneuve qui, pour faire jeune et moderne, j’imagine, massacrait articulatoirement son texte. La moitié du temps il devenait incompréhensible.